Here in the Pitch est un disque qui commence presque par la fin : l’ouverture Life Is sonne comme un générique qui viendrait idéalement clore un doux mélo, secrètement déchirant. Mais surtout, ce titre magnifique installe l’une des nouveautés de ce quatrième album : une section rythmique qui insuffle discrètement aux grandioses miniatures de Jessica Pratt une pulsation larvée, tapis moelleux ou
goutte-à-goutte obsédant (Nowhere It Was), pour accompagner son phrasé velouté et le piquant de sa voix.
En troquant l’intimisme de sa guitare fragile pour une orchestration ouvragée, qui doit autant à la bossa qu’à Brian Wilson, Pratt pousse les murs mais conserve le murmure. C’est le premier miracle de Here in the Pitch, le plus évident : malgré ses dimensions propices à l’écho, l’endroit où sa musique nous installe reste un confessionnal. Un espace solitaire.
Si l’album quitte un peu les atmosphères gothiques de Quiet Signs (2019) pour faire entrer un soupçon de lumière californienne, on pourrait lui apposer le même titre : des “signes calmes”, c’est exactement ce qui habite ce disque, réclamant qu’on les débusque avec soin. Un disque qui vous demande – vous intime – de passer un bout de temps avec lui et de lui accorder une attention semblable à celle que l’on devrait toujours réserver aux mystères de l’existence.
Here in the Pitch (City Slang/PIAS). Sortie le 3 mai. En concert à l’Alhambra, Paris, le 2 juin.