C’est une grande pièce avec un canapé, des fauteuils douillets, une petite table basse et un paperboard pour pouvoir écrire. C’est là, à l’étage de l’Udaf de Tulle, une association agréée par la Caf, que se tiennent les séances de médiation familiale que l’association propose aux parents séparés ou en cours de séparation et dont la rupture impacte les enfants. On vous explique comment se passe cette médiation et comment elle peut aider les familles à retrouver une forme de sérénité, malgré la fin des liens amoureux.Marie Merckx est médiatrice à l'Udaf.
1. Qu’est-ce que la médiation familiale ?« Elle vient des États-Unis, rappelle Marie Merckx, médiatrice familiale. Elle est apparue suite à des constats menés chez des couples dysfonctionnels avec des enfants à haut potentiel de conflit. En France, elle est arrivée dans les années 80 mais elle s’est ouverte à ce qui peut mettre à mal la famille. » L’objectif de cette médiation est, via la parole qui reste confidentielle, de dénouer une situation familiale compliquée. C’est un accompagnement pour que la famille, même si le couple est séparé, trouve une coparentalité efficace (un acocord sur le mode de garde, par exemple) et ainsi vive mieux.
2. Qui peut demander l’accompagnement d’une médiatrice familiale de l’Udaf ?Toutes les personnes qui sont en séparation ou vont l’être et dont la situation a des conséquences sur les enfants. À l’Udaf, 70 % des personnes qui demandent une médiation sont des parents séparés. La plupart d’entre eux demandent d’eux-mêmes une médiation, l’autre partie étant envoyée à l’Udaf par le Juge aux affaires familiales (JAF). Les 30 % restants sont des situations difficiles liées à la famille, mais de manière périphérique comme des grands-parents qui ont perdu tout lien avec leurs petits-enfants ou des liens délicats entre frères et sœurs…
3. Comment se déroule une médiation familiale ?Le préalable est que les deux parties doivent être d’accord pour participer, « sinon cela n’a aucun sens », estime Clothilde Bruter, responsable des services aux familles de l’Udaf. Une fois ce prérequis obtenu, tout commence par un entretien d’information. En 2023, 344 personnes ont été reçues pour un entretien d’information. « 80 % enchaînent sur une médiation », confie Clothilde Bruter. La médiation repose alors sur différents axes : « On leur demande quels sont leurs objectifs ? Quelle est leur logique de changement ?, liste Marie Merckx. On revisite les ruptures, les passages à vide, comment le couple en est arrivé là et chacun des deux doit donner ses objectifs de changement et comment il va s’y prendre pour les atteindre. La question est “que puis-je faire pour moi, pour l’autre et pour les enfants ?” Cela peut prendre du temps mais c’est important. » Tout cela se fait via une séance d’une heure trente par mois. Car il faut du temps entre deux séances pour que les deux parties avancent, chacune à son rythme pour voir sur quoi elles sont d’accord. « On rédige un accord d’intervalle et à la séance suivante on voit s’il a été respecté ou si des choses, comme les heures de retour des enfants au domicile du parent qui en a la garde, doivent être modifiées. Et cet accord change beaucoup de choses parce que la médiation repose sur l’engagement des parents, c’est à eux d’expérimenter des solutions », ajoute-t-elle. « Parce que toutes les personnes que nous rencontrons ont un réel amour pour leur enfant et c’est par ce biais-là que l’on peut avancer. On travaille dans l’intérêt de l’enfant qui est en devenir », précise Marie Merckx.
4. À quoi cette médiation peut aboutir ?Elle peut aboutir à un accord oral ou écrit. Cette “convention parentale” peut contenir le montant de la pension alimentaire, le mode de garde des enfants… « Elle peut ensuite être envoyée par la famille au JAF qui l’entérine », ajoute la médiatrice. La médiation concerne aussi les enfants dont le lien s’est distendu avec un parent. Ainsi des ateliers permettent d’écouter les enfants qui viennent parler de leur souffrance. « Ces parcours de reliance sont très demandés, rappelle Lise Pasquet, coordinatrice du service de médiation familiale. Nous n’avons pas de liste d’attente mais beaucoup d’enfants chaque semaine. »
5. Comment faire pour obtenir une médiation familiale ?Il faut appeler l’Udaf au 05.55.29.98.40 ou 07.61.41.22.61 pour prendre rendez-vous. L’entretien d’information préalable est gratuit. En revanche, les séances de médiation familiale sont payantes, en fonction des revenus.
La médiation autour des aidants. C’est un phénomène qui s’accroît, notamment en Corrèze. L’Udaf est de plus en plus sollicitée pour des conflits de fratries autour de la question des aidants. « Nous sommes dans un département rural avec une population vieillissante et il y a de plus en plus d’aidants et cela peut générer des conflits, notamment quand l’un des enfants est aidant et pas les autres. Dans certaines familles, cela peut créer un déséquilibre. Nous avons vu un aidant estimer que la maison des parents lui revenait parce qu’il les avait aidées et le reste de la famille n’était pas d’accord », se souviennent les médiatrices qui mettent alors en place une médiation et qui s’attendent à une multiplication dans l’avenir de ces situations délicates à gérer.
Estelle Bardelot
