À peine l’association est-elle en place en Corrèze, que déjà deux cas ont été repérés. Et pour Jean-Paul Trichet, à la tête de l’Aide psychologique aux entrepreneurs en souffrance aiguë (Apesa 19), la période s’annonce compliquée : "On craint une hausse des procédures collectives, avec le risque de voir de plus en plus d’artisans ou des patrons de TPE ou PME en détresse psychologique".
Quitte à mettre à terre le mythe du dirigeant combatif et toujours sûr de lui, les chefs d’entreprises "sont des êtres humains comme les autres".
Quand les choses vont mal pour leurs affaires, dans lesquelles ils ont parfois tout investi (argent et temps), ils sont souvent livrés à eux-mêmes, parfois aspirés par les "4 D" (décès d’un proche, déprime, divorce, dépôt de bilan).
"Poser les bonnes questions""Le chef d’entreprise a tendance à cacher sa détresse", estime Jean-Paul Trichet, par ailleurs vice-président du syndicat patronal Medef en Limousin.
Inspiré par un dispositif en place dans d’autres départements, comme le Lot qui détecte 25 à 30 cas chaque année, un "réseau de vigilance" se met en place en Corrèze.
Une trentaine de "sentinelles", des professionnels qui fréquentent au quotidien les chefs d’entreprise (expert-comptable, juge consulaire, huissier, avocat…), ont été formés "à poser les bonnes questions".Une trentaine de personnes ont suivi une première formation pour devenir "sentinelles" dans les locaux de la CCI de Brive.
"Au téléphone ou en visuel, il s’agit de détecter celles et ceux qui sont en souffrance, détaille la formatrice. Les sentinelles ne sont pas des professionnels de santé. Ils passent ensuite le relais à des psychologues, avec l’accord du dirigeant."
Outre les organismes consulaires, les syndicats patronaux et la préfecture, le tribunal de commerce joue un rôle majeur dans le dispositif.
80 tribunaux de commerce utilisent ce dispositif en France"Lors de nos procédures, nous avons en face de nous des personnes affectées, mais aucun moyen de les accompagner", témoigne la présidente.
Le passage à la barre du tribunal ou la déclaration de dépôt de bilan peut être vécu comme un échec, un déshonneur, accompagné d’un sentiment d’abandonner des salariés que l’on connaît bien ; des sentiments qui peuvent aussi émerger lors d’une simple cession.
Désormais, un suivi personnalisé pourra être déclenché, "pour éviter le pire". À ce jour, 80 tribunaux de commerce utilisent ce dispositif en France, 7.000 chefs d’entreprise y ont eu recours depuis sa création, fin 2013.
En Corrèze, l’association est encore en quête de psychologues agréés et prévoit une deuxième formation de sentinelles dès la rentrée prochaine.
Contact. Par mail : apesa19.correze@gmail.com. L’association accepte les dons financiers, le coût d’une procédure pour la prise en charge d’un entrepreneur est estimé à 500 €.
