Dans la foulée de son nouvel opus La Réplique, Olivia Ruiz vient de démarrer une tournée qui va la conduire sur de nombreuses scènes, dont celles des festivals, cet été. Avec un show qui promet de convoquer le ventre et les hanches.
Femme libre, Olivia Ruiz s’affranchit de tous les codes. La Réplique, son nouvel album, différent, électronique, chaloupé, poétique, intime, profond, universel, le prouve. Sept ans se sont écoulés depuis son dernier opus, pourtant Olivia Ruiz n’a jamais quitté la scène. Elle arpentait celle des librairies et festivals de littérature où ses deux romans, La commode aux tiroirs de couleurs (2020) et Écoute la pluie tomber (2022), ont rencontré un immense succès (plus d’un million de lecteurs). Olivia embrasait aussi les scènes des théâtres avec Bouches cousues, le spectacle musical qu’elle a écrit et interprété en hommage aux exilés, et où la langue espagnole levait souvent le poing bien haut.
Influence hispaniqueCette influence hispanique se retrouve intensément en textes et en musiques dans son nouvel album, La Réplique, inauguré par le bouillant single du même nom. Une porte d’entrée idéale sur un nouvel univers. Un titre dans lequel résonne la définition de son ADN :
Je suis de celles qui nagent à contre-courant, qui refusent le sens du vent, qui refusent d’être la réplique de la réplique de la réplique…
Olivia Ruiz sera à l'affiche du festival Europavox à Clermont du 28 au 30 juin
Il y a quelques années que vous n’avez pas pris la route pour une tournée comme celle que vous venez de débuter. Votre état d’esprit ?
Un mélange d’excitation et de trac car, effectivement, il y a longtemps que je n’ai pas tenu un concert d’une heure trente, hyper-énergique, avec des morceaux parfois très dansants et qui vont donc me demander d’être très incarnés physiquement. Le petit trac, c’est aussi celui qui fait que l’on n’est pas trop mauvais (sourire).
Le trac et ses effets, parfois immédiats, parfois retards.
Absolument. C’est un peu comme l’écriture en fait, c’est toujours dans un second temps. Il y a cette phrase que j’adore, que l’on attribue tantôt à Hemingway, tantôt à Dorothy Parker : "Je n’aime pas écrire, mais j’adore avoir écrit". C’est un peu la même chose, les démarrages de tournée, dès que le spectacle est un peu rodé, le plaisir arrive, et il n’y a que la place pour ça !
En l’occurrence pour une invitation, notamment à la danse.
Ah oui ! La Réplique est une invitation à se lier, à se toucher, à quelque chose qui est de l’ordre de la communion. Ce sont des chansons qui sont tournées vers l’autre, qui mettent en avant l’importance du lien.
Vous parliez de l’écriture il y a quelques secondes, justement, c’est quoi l’écriture pour vous ? Les écritures d’ailleurs, entre livres et chansons… Se nourrissent-elles ? Sont-elles étanches ?
C’est difficile de le mesurer, mais il y a deux chansons sur l’album, Piernas sueltas et Tes silences, qui sont très directement liées au personnage d’André, lequel partage la vie de Rita, l’héroïne du roman (La commode aux tiroirs de couleurs, NDLR). Chansons qui pourraient s’appeler les chansons d’André. Il y a des choses très directes, d’autres un peu moins et que, peut-être, je vais découvrir en prenant un peu de recul sur ces dernières créations.
Ce ne sont pas des choses que l’on identifie au moment de l’écriture.
Pour Tes silences, il y avait cette petite musique du mot qui était déjà là… Même lorsque je suis dans l’écriture d’un roman, la musique m’habite. Parfois, je peux avoir quelque chose qui vient du livre et m’amène à la musique ou réciproquement. Un texte que je n’ai pas gardé pour l’album sera une base pour un des chapitres de mon prochain livre, c’est très probable.
Déjà en cours ?
Déjà dans ma tête (rires). Qui commence à exister par petites phrases perdues dans mes notes. Et qui sera écrit dès que je vais avoir le temps. Je suis assez monotâche. Contrairement à Mathias Malzieu (*) par exemple, capable d’écrire un bouquin pendant une tournée, ce qui m’épate totalement.
Même si la musique est présente à l’endroit de l’écriture, il y a comme un jeu d’équilibre dans la conception d’un album entre musique et mots. Peut-être encore plus lorsque la musique danse et que les mots sont, et c’est le cas, parfois très lourds.
Je crois que c’est quelque chose qui est dans mon ADN en fait. Même sur le premier album, avec des textes qui n’étaient pas les miens, il y a quelque chose de ça. Une forme de noirceur dans le propos, contrebalancée par une énergie et une joie au niveau de l’arrangement. J’aime danser, bouger, me sentir vivante lorsque j’interprète des chansons […] Je ne suis pas trop capable d’écrire joyeux. Je sais mettre de l’espoir et de la joie dans des sujets parfois difficiles, mais je ne sais pas écrire léger… À la fois j’essaie de mettre la poésie nécessaire pour que l’on puisse ne pas prendre le sens premier si l’on a n’a pas envie... La femme chocolat, par exemple, beaucoup sont passés à côté et longtemps, du sens premier du texte…
(*) Mathias Malzieu, leader du groupe Dionysos.
Julien Dodon