En cette période de grand froid, la maraude de la Croix-Rouge devant la gare de Brive (Corrèze) est cruciale pour les personnes en détresse. Accueillies dans un gymnase, celles-ci sont moins nombreuses dehors.
La gare de Brive (Corrèze) se vide petit à petit, vers 19 heures, ce mercredi 10 janvier 2024. Les derniers trains, de plus en plus espacés, seront peu remplis. Celui pour Toulouse est parti il y a quelques minutes.
Ahmad (*) l’a raté : « Je ne comprends rien aux trains ici, déplore ce demandeur d’asile soudanais hébergé à Toulouse, dans un anglais hésitant. Je ne sais pas où dormir ce soir… » Nous lui apprenons qu’une maraude s’apprête justement à passer. La nuit, le hall et le parvis de la gare appartiennent à ceux qui n’ont pas grand-chose…
Des gants et des couvertures19?h?30. Le fourgon de la Croix-rouge débarque. « On va avoir des gants et des couvertures?! » s’exclame Sandrine (*) en le voyant entrer sur le parking. La quinquagénaire, hébergée chez un ami, est une habituée de la maraude.
Les sans domicile fixe ont, d’ailleurs, déserté la gare ce soir. Neuf d’entre eux ont rejoint le gymnase ouvert par la préfecture la veille. Sept personnes ont fait le déplacement ce soir, depuis les chambres d’hôtel ou les squats qui les accueillent.La soupe réchauffe les corps, pendant que les sourires réchauffent les cœurs. Photo Stéphanie Para
À part Ahmad, bloqué à Brive faute de train, aucun des bénéficiaires n'est sans-abri. Dans une atmosphère calme, à l’écart du parvis de la gare, se joue un spectacle qui apprend l’humilité à quiconque y assiste. Un petit bol de soupe, un sandwich, un café, un yaourt… Mais surtout des mots de réconfort et des sourires.
« Il ne faut jamais demander aux gens “vous dormez où ce soir ?” »« Ce n’est pas la maraude habituelle aujourd’hui, souffle Catherine, l’une des trois bénévoles de la Croix-rouge. En général, il y a une quinzaine de bénéficiaires et l’ambiance est un peu moins calme. Une fois, on en a déjà eu vingt-deux. »Dans le fourgon de la Croix-rouge, Françoise sert de la soupe, des sandwichs et du café aux bénéficiaires. Photo Stéphanie Para
Elle énonce une règle d’or : « Il ne faut jamais demander aux gens “vous dormez où ce soir??” mais “avez-vous une solution d’hébergement??” »
« On essaye de venir le moins possible », s’excusent presque Tonio (c’est lui qui nous a glissé ce prénom d’emprunt) et sa compagne Alexandra (*), un jeune couple de 23 et 22 ans. « Nous, on a un appartement avec un bail. On n’est pas les plus à plaindre. »
Des propos qui font bondir Catherine : « Ah non, vous n’avez pas à renoncer à venir pour ça?! On aide tout le monde. »
Anthony Derestiat (*) Tous les prénoms ont été modifiés.