Le gouvernement tente de colmater les brèches comme il peut. Alors que les réquisitions demeurent dans les raffineries de TotalEnergies à Gonfreville-l’Orcher, près du Havre (Seine-Maritime) et de Donges (Loire-Atlantique), les incinérateurs devraient opérer un retour (presque) à la normale. Niveau carburant, la situation reste tendue dans certains départements du sud et de l’ouest du pays. À la veille d’une nouvelle semaine de mobilisation, la colère contre la réforme des retraites ne tarit pas.
Le tribunal administratif de Rouen a rejeté, ce dimanche 26 mars, la requête en référé de la CGT contestant la légalité des réquisitions de grévistes de la raffinerie TotalEnergies de Gonfreville-l’Orcher (Seine-Maritime) opérées vendredi par la préfecture. Dans son ordonnance, consultée par l’AFP, le juge administratif a estimé que l’arrêté du préfet de Seine-Maritime "n’apparaît pas manifestement attentatoire au droit de grève reconnu et protégé par la convention de l’Organisation internationale du travail".
Dans cette raffinerie, quatre salariés chargés de la livraison de kérosène ont été réquisitionnés. Cela doit permettre l’approvisionnement des aéroports parisiens, jugé "critique" par le ministère de la Transition énergétique. Selon la justice administrative, l’état des réserves de kérosène de l’aéroport parisien de Roissy n’autorisait un "fonctionnement raisonnable" que pendant trois jours. L’aéroport n’aurait ensuite pas pu "maintenir un trafic aérien qui prévienne des perturbations de l’ordre public liées à la présence massive de passagers privés de vols", ce qui risquait de "provoquer des incertitudes susceptibles d’impacter la sécurité aérienne".
Dans la raffinerie de Donges (en Loire-Atlantique), l’assemblée générale des salariés a voté, vendredi 24 mars, la poursuite de la grève sur le site pétrolier jusqu’au mardi 28 mars 2023. Au total, six employés ont fait l’objet d’une réquisition. "Trois salariés sont réquisitionnés pour envoyer du carburant par pipeline à Vern-sur-Seiche", un dépôt de carburant près de Rennes, pour le quart de l’après-midi, avait précisé vendredi à l’AFP le délégué CFDT Adrien Vaugrenard. Les gendarmes sont venus frapper à la porte de trois salariés vendredi matin "pour aller les réquisitionner, pour aller tourner des vannes", avait de son côté expliqué Fabien Privé Saint-Lanne, le délégué CGT. Au même moment, trois autres salariés déjà présents dans la raffinerie ont été réquisitionnés jusqu’à la fin du quart du matin.
Vendredi 24 mars, les forces de l’ordre sont aussi intervenues pour débloquer deux dépôts pétroliers : à Port-la-Nouvelle (Aude), qui était bloqué depuis le 16 mars, et à Frontignan (Hérault). Dans le sud de la France, les réquisitions de "trois salariés par relève" ont été prorogées au dépôt pétrolier de Fos et les camions réapprovisionnent les stations-service du département.
Environ 15 % des stations-service étaient en rupture d’au moins un carburant ce vendredi matin, selon des données publiques analysées par l’AFP. Dans les neuf départements les plus touchés, entre deux et cinq stations-service sur dix sont à sec. Il s’agit de la Loire-Atlantique, du Morbihan, de la Mayenne, du Maine-et-Loire, de l’Ille-et-Vilaine, de l’Ariège, des Bouches-du-Rhône, de l’Hérault et du Var, selon ces données.
La situation reste tendue dans le sud de la France et dans les Bouches-du-Rhône en particulier. Samedi 25 mars, la préfecture a pris un nouvel arrêté pour réquisitionner des stations-service "pour l’approvisionnement en carburant de certains véhicules prioritaires". De son côté, nos confrères de l’antenne locale de France 3 font état de 42 % des stations du département en rupture sur au moins un carburant.
Deux des trois d’usines d’incinération traitant les déchets de Paris ont rouvert vendredi matin après deux semaines et demie de grève contre la réforme des retraites, des réquisitions étant en cours dans la troisième, a rapporté le syndicat métropolitain Syctom à l’AFP.
"Les salariés de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) et d’Issy ont voté la fin du mouvement social et les usines sont débloquées", même si l’usine d’Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) a fait l’objet au matin d’un "petit filtrage, objet de personnels extérieurs à l’usine", affirmait le Syctom. Quant au troisième site, le plus important, à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), "la réquisition des salariés de l’exploitant" était "en cours" en milieu d’après-midi, avait déclaré le Syctom à l’AFP. L’incinérateur va être remis en service progressivement.
La CGT a de son côté déposé un préavis de grève des éboueurs du garage à bennes de l’entreprise de collecte de déchets Derichebourg, situé à la Courneuve (Seine-Saint-Denis), à partir de ce dimanche soir et pour une durée indéterminée, selon France Bleu. Cette nouvelle devrait perturber le ramassage des déchets dans les 1er, 2e, 4e, 10e, et 18e arrondissements de Paris, géré par ce prestataire privé. Des arrondissements jusqu’ici épargnés par la grève des éboueurs.