Chez les pompiers, tout est question d’échelle. C’est donc à la démesure des feux qui, cet été, ont notamment décimé les forêts des Landes, de la Gironde, du pourtour méditerranéen, mais aussi de la Bretagne et des Vosges, qu’il faut apprécier les mesures annoncées, vendredi, à l’Élysée, par le président de République lors d’une cérémonie d’hommage à plus de 300 pompiers, maires, pilotes d’hélicoptères, bénévoles et acteurs de la société civile ayant pris une part active à la lutte contre ces incendies.
Quelque 72.000 hectares n’en ont pas moins été la proie des flammes ; « soit six fois plus que la moyenne des dix dernières années », a déploré Emmanuel Macron. Et, parce qu’avec le réchauffement climatique, il n’y a guère à attendre des nuages, il a fait sien l’adage « Aide-toi, le Ciel t’aidera »* en présentant les grandes lignes d‘une « stratégie nouvelle » de lutte et de prévention contre les incendies.Une enveloppe supplémentaire de 150 millions d’euros sera ainsi, en 2023, octroyée aux services départementaux d’incendie et de secours (Sdis).
Nouvelle flotteGros sous encore avec un investissement de 250 millions d’euros « d’ici la fin du quinquennat », en 2027, afin de remplacer les douze avions bombardiers d’eau amphibie déjà en service non par douze, mais par seize nouveaux appareils. Le déploiement de douze hélicoptères bombardiers d’eau – dix seront loués et deux achetés – ainsi que de drones devrait aussi renforcer cette flotte, ( au double sens du mot).
Moins visible, mais tout aussi utile, « une carte nationale à la maille la plus fine » recensera « les zones particulièrement vulnérables ». Et l’Office national des forêts assurera un « rôle de vigie ».
Emmanuel Macron a, en outre, promis « la plantation d’un milliard d’arbres » sur le territoire hexagonal « d’ici dix ans », soit « 10 % de notre forêt », pour compenser les pertes dues aux incendies, mais aussi fixer le carbone et préserver la biodiversité. Il ne s’agira donc pas de multiplier les pins…
Mégafeux : le monde à la merci d’une étincelle
Enfin, parce que sans les hommes, les matériels ne sont rien, un « plan de soutien au volontariat » dans les Sdis visant à « allonger la durée pendant laquelle les entreprises pourront libérer leurs sapeurs-pompiers volontaires », en indemnisant mieux celles-ci, est dans les tuyaux.
Recruter« Les 253.000 sapeurs-pompiers de France saluent ces annonces fortes, qui s’inscrivent dans le cadre d’une ambition de résilience et d’avenir pour nos territoires », s’est aussitôt félicitée la fédération nationale des sapeurs-pompiers de France« L’allongement de la durée pendant laquelle les entreprises devront libérer leurs sapeurs-pompiers volontaires, moyennant une meilleure indemnisation en contrepartie, est une bonne chose, a abondé Jean-François Barili, président de l’Union départementale des sapeurs-pompiers du Puy-de-Dôme. Ça nous aidera à recruter. On arrive juste à maintenir les effectifs alors qu’on sait qu’il nous faut les augmenter pour faire face au défi climatique. Le réchauffement, ce n’est pas seulement des feux plus importants et plus nombreux, c’est aussi des orages, de la grêle, des inondations… » Et, donc, des interventions plus importantes et plus nombreuses .
« Sur 253.000 pompiers, rappelle le capitaine Barili, 200.000 sont volontaires. Il en faudrait 250.000, soit 25 % de plus. Quant à doubler les colonnes, on a déjà eu du mal à les compléter cet été… Et ce doublement ne doit surtout pas se faire aux dépens d’autres territoires ! »
Les forêts face au défi du réchauffement climatique et des mégafeux
« Le système de la sécurité civile en France, insiste-t-il, est basé sur le volontariat. Dans ce cadre, indemniser les entreprises pour qu’elles puissent libérer leurs sapeurs-pompiers volontaires, est une nécessité même si ce sera toujours plus facile pour les grosses entreprises que pour les petites. »« L’enveloppe de 150 millions d’euros à destination des Sdis, conclut-il, est un geste positif au même titre que les matériels supplémentaires, même si quelque part il s’agit de rattraper le retard. »(*) Le chartier embourbé, Jean de La Fontaine
Jérôme Pilleyre