Les uns regardent les autres comme de dociles et apeurés moutons face à l'autorité et à la menace virale. Ces mêmes autres les toisant en retour comme d'égoïstes et inconséquents défenseurs de leur nombril. Une ligne de fracture – une de plus – entre provax et antivax, parcourt cette France estivale, prise par surprise par le Delta et secouée par d'âpres débats sur les libertés, de la rue jusqu'au Parlement où des garde-fous se mettent en place, en passant par les repas de famille. Mais faut-il que nous soyons en manque de sensations fortes pour dramatiser à ce point ce moindre mal qu'est le pass sanitaire, une fois borné contre les dérives ? À moins qu'il ne soit devenu un levier idéal chez certains pour coaguler et raviver des colères recuites ? Davantage qu'un débat sur les libertés, nous assistons en direct à un conflit de valeurs, ce qui conduit immanquablement à un dialogue de sourds. Ce conflit, la pandémie ne l'a pas généré mais seulement révélé. Il est là depuis longtemps, dans ce commun grignoté par l'individuel. À la fin, comme toujours, le virus, sourd à nos agitations philosophiques, imposera sa vérité. Jusqu'à présent, il nous asservit tous.
l'éditorial
Florence Chédotal