Son restaurant, à Durtol (Puy-de-Dôme), s’appelle Le Pré. Sa cuisine est une ode aux produits de sa région, l’Auvergne. Les herbes y occupent une place de choix : Xavier Beaudiment, chef deux étoiles au guide Michelin, est un cueilleur de la première heure.
Pour réaliser une belle cueillette, il faut se lever tôt. C’est à l’aube que, caressées par la rosée, les plantes sauvages sont à leur apogée. Depuis onze ans, une fois par semaine, le chef du restaurant Le Pré, à Durtol (2 étoiles au guide Michelin), part de bon matin arpenter les prairies et vallées du Puy-de-Dôme. Il a été formé par le botaniste puydômois Guy Lalière, qui l’accompagne toujours aujourd'hui.
« Comprendre les plantes permet de comprendre le monde végétal. Dans une plante, il y a la tige, la feuille, la fleur, la graine. C’est un ensemble incroyable qui nous permet d’élargir notre palette ». Prenons des plantes aussi communes que la ciboulette ou le persil. Avez-vous déjà pensé à utiliser leurs fleurs ?
Xavier Beaudiment a choisi, dès l’ouverture de son restaurant, d’ouvrir sa cuisine aux plantes sauvages d’Auvergne.
« La Chaîne des puys, c’est une opportunité formidable pour travailler les herbes. Et la meilleure façon de parler de notre territoire, c’est la terre. »
xavier beaudiment
Le végétal et les herbes sauvages se sont naturellement déployés dans le cheminement créatif du chef, participant à la singularité de sa cuisine. « Sur nos cueillettes, on a rencontré près de 250 herbes, comptabilise-t-il. Il y en a 50 que l’on utilise régulièrement ».
Cuisiner l'ail des ours. Très répandu en Auvergne, l’ail des ours est une plante qui a de la ressource ! Xavier Beaudiment nous donne quelques idées pour la cuisiner. On peut ciseler cette plante comme du persil, pour agrémenter une omelette aux champignons.
On peut aussi la mixer avec des noisettes torréfiées, de la baie de genévrier, du sel, et de l’huile pour réaliser un pesto d’ail des ours. A savourer avec des pâtes, ou une volaille rôtie, accompagnée d’une crème de pesto.
Avec son parfum enivrant, la tanaisie en fait partie. Le chef la travaille avec un foie gras juste poché. L’égopode aussi, lui qui se marie à merveille en émulsion avec la morille. L’achillée millefeuille, évoquant l’air iodé de l’océan, accompagne subtilement les salades estivales. La reine-des-prés se prête aux consommés ; le tagète, proche du thym et de l’origan, apporte son grain de sel dans les desserts.
Si la nature auvergnate est riche, elle n'est pas exhaustive. Voilà pourquoi, en plus des cueillettes, Xaver Beaudiment cultive un jardin d'herbes aromatiques.
Une parcelle jouxte le restaurant ; une autre s’épanouit au grand air de la vallée des Saints. Là, Xavier et Florine, sa femme, font pousser de la mélisse, des capucines, de la coriandre, du persil… Ils ont aussi planté des pommiers dont les fruits approvisionneront le restaurant. Comme son mari il y a onze ans, Florine entame aujourd’hui sa formation de spécialiste des plantes sauvages et herbes aromatiques.
« Comme moi, elle est passionnée. Elle a vraiment envie de s’investir dans cette partie », confie le chef, dans un enthousiasme teinté de fierté. De nouvelles saveurs, un nouveau terrain d’inspiration en perspective pour progresser encore, toujours fidèle au credo originel. Du territoire à l’assiette, raconter une (savoureuse) histoire contemporaine.
Catherine Jutier