"Il faut redresser la presse": voilà le programme fixé par le républicain lundi pendant sa première conférence de presse depuis l'élection présidentielle du 5 novembre.
Pour y arriver, le milliardaire de 78 ans, qui prendra ses fonctions le 20 janvier, va passer d'abord par les tribunaux, avec une avalanche jamais vue de plaintes pour divers motifs dont la diffamation.
Dans son viseur: une légende du journalisme américain, Bob Woodward, dans une affaire d'enregistrements, mais aussi la chaîne CBS, accusée d'avoir manipulé une interview de Kamala Harris de manière à faire paraître la vice-présidente, et candidate démocrate malheureuse, sous un meilleur jour.
Il a déjà porté plainte contre un quotidien de l'Iowa ayant publié un sondage qui lui était défavorable, tandis que la chaîne de télévision ABC a accepté de payer 15 millions de dollars pour mettre fin à une procédure en diffamation.
Le républicain a aussi estimé que le New York Times et le Washington Post devraient être privés du prix Pulitzer récompensant leur couverture des opérations d'ingérence russe autour de l'élection de 2016, qu'il avait remportée.
"S'autocensurer"
De nombreux juristes estiment que beaucoup de procédures n'aboutiront pas. Reste qu'elles créent "un effet d'intimidation", juge Melissa Camacho, professeure de communication à la San Francisco State University, en pointant le risque que les journalistes "commencent à s'autocensurer".
Pour Donald Trump, "le succès ce n'est pas de gagner au tribunal, mais la couverture médiatique et les concessions qu'il peut obtenir", analyse Khadijah Costley White, professeure de journalisme à l'université Rutgers.
La bataille annoncée de l'ancien et désormais futur président contre les médias ne sera toutefois pas que judiciaire.
Il a placé des fidèles à certains postes clés. L'ancienne présentatrice Kari Lake, qui nie la victoire de Joe Biden contre Donald Trump en 2020, prendra la tête du média public Voice of America, et l'entrepreneur et multimilliardaire Elon Musk, chargé par le président élu de réduire les dépenses, promet de tailler les subventions à l'audiovisuel public.
Les proches de Donald Trump assurent qu'ils dynamiteront les usages en matière de communication, à commencer par le "briefing" quotidien des porte-parole de la Maison Blanche.
La répartition des sièges dans la célèbre salle aux tons bleus est gérée par les médias au travers de l'Association des correspondants à la Maison Blanche, qui organise aussi le fonctionnement du "pool", le petit groupe de journalistes accompagnant le président américain dans ses déplacements.
"Secouer Washington"
Pendant le premier mandat de Donald Trump, ce rendez-vous de routine est souvent passé aux oubliettes, parfois pendant de longues périodes - plus de 300 jours de suite.
A la différence de Joe Biden, le républicain raffolait toutefois d'échanges avec les journalistes. Et il communiquait directement à coups de tweets, à toute heure du jour voire de la nuit.
Le républicain "va secouer Washington à partir du 20 janvier, et cela passera par la salle de briefing", prédit un ancien porte-parole de Donald Trump, Sean Spicer, dans une tribune publiée mardi sur un site d'informations conservateur.
Critiquant les bonnes places réservées aux grands médias comme le New York Times, le Washington Post ou CNN, il préconise un système du "premier arrivé, premier servi".
La chaîne préférée des conservateurs, Fox News, est aujourd'hui présente au premier rang de la salle de presse, mais d'autres médias de prédilection de la droite dure américaine, par exemple le tabloïd New York Post, sont relégués plus loin du pupitre, voire n'ont pas de siège attribué, ce qui réduit leurs chances de poser une question.
Autre piste étudiée dans le camp Trump: inviter au briefing les podcasteurs et influenceurs marqués à droite sur lesquels l'ancien homme d'affaires s'est appuyé pendant sa campagne.