Cet accord dit de poursuites différées (DPA), enregistré vendredi auprès d'un tribunal fédéral de Virginie (Est), vise à mettre fin à des poursuites pénales après une surveillance de cinq ans.
Le prestigieux cabinet était accusé d'avoir contribué à la crise des opiacés en conseillant des groupes pharmaceutiques comme Purdue Pharma, fabricant de l'anti-douleur OxyContin.
Il a reconnu avoir, "en toute connaissance et de manière intentionnelle, conspiré avec Purdue Pharma et d'autres pour aider et encourager à fournir une mauvaise communication sur des médicaments prescrits sur ordonnance", stipule le texte.
Et aussi d'avoir, "par les actions d'un haut responsable de McKinsey, détruit et caché en toute connaissance des archives et des documents" pour faire obstruction aux enquêtes.
Le groupe a licencié, rapidement après le début du scandale, deux salariés pour destruction de documents dans cette affaire.
Le DPA précise également que McKinsey a déjà déboursé près d'un milliard de dollars dans le cadre de plusieurs accords conclus hors tribunaux depuis 2019 aux Etats-Unis.
"Nous sommes profondément désolés de nos services pour notre ancien client Purdue Pharma et des actes d'un ancien responsable qui a détruit des documents", a réagi McKinsey dans un communiqué.
"Cette terrible crise de santé publique et notre travail passé pour des fabricants d'opiacés seront toujours sources de profonds regrets", a-t-il poursuivi, soulignant avoir accepté dans le DPA "la responsabilité de (sa) conduite".
Cet accord "clos ce chapitre de l'histoire" de McKinsey.
Le procureur général de Virginie Chris Cavanaugh, lors d'une conférence de presse avec des homologues d'autres Etats et des enquêteurs, a relevé que c'était "le premier cabinet de conseil tenu pénalement responsable pour des conseils ayant entraîné la commission d'un crime par son client".
Pas de narcotiques
McKinsey s'est engagé il y a plusieurs années déjà à ne plus conseiller d'entreprises sur le développement, la fabrication, la promotion, le marketing, la vente, l'utilisation d'un opiacé ou de tout autre narcotique.
Il avait notamment conseillé Purdue Pharma pour l'aider à doper les ventes de l'OxyContin après un creux des ventes, une stratégie baptisée "TurboCharge", selon M. Cavanaugh.
Selon lui, les 650 millions du DPA représentent 85 fois les honoraires perçus par le cabinet dans le cadre de cette mission stratégique.
Le cabinet avait aussi recommandé à Purdue - qui a abandonné les opiacés en 2018 - de se concentrer sur les dosages élevés, considérés comme les plus lucratifs mais très addictifs.
La surprescription de ce médicament est généralement considérée comme le déclencheur de la crise des opiacés aux Etats-Unis.
Selon les données des Centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC), plus de 700.000 personnes ont succombé dans le pays entre 1999 et 2022 à une overdose liée à la prise d'opiacés, obtenus sur ordonnance ou de manière illégale.
Pour la première fois depuis 2018, le nombre de morts liées aux opiacés (principalement le fentanyl) a légèrement diminué en 2023.
Visé par une avalanche de poursuites, le laboratoire Purdue s'est déclaré en faillite en 2019 mais il s'est heurté à plusieurs rejets par les tribunaux de son plan de faillite.
Il a saisi la Cour suprême à Washington mais celle-ci a annulé fin juin la dernière mouture, qui prévoyait la création d'une nouvelle entité et le paiement d'au moins 5,5 milliards de dollars sur dix-huit ans.
Les Sages ont estimé que le plan exonérait la famille Sackler, propriétaire de Purdue, de toutes futures poursuites émanant de victimes. Les Sackler sont accusés d'avoir promu de façon musclée l'OxyContin tout en ayant connaissance de son caractère très addictif, ce qui leur a rapporté des dizaines de milliards de dollars.
De grands distributeurs de médicaments comme les chaînes CVS, Walgreens et Walmart, ou encore une filiale du géant français de la publicité Publicis ont également été poursuivis pour leur rôle dans cette crise.