"Si +Netumbo+ va gagner ? Facilement, il suffit de regarder la foule", plastronne Alpheus Mvula, sculpteur de 52 ans et "membre de la Swapo depuis la naissance", en pointant les milliers de silhouettes bleues, rouges et vertes abritées sous les barnums.
Foi militante ou exercice d'auto-conviction ? Même "Netumbo" - Netumbo Nandi-Ndaitwah, dite "NNN", candidate à la présidentielle de l'Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (Swapo), qui a lutté pour la libération du pays - a incité ses partisans à se montrer "très sérieux" face à la menace de l'opposant Panduleni Itula.
L'actuelle vice-présidente de 72 ans, qui pourrait devenir la première femme à diriger le pays, a invité les siens à "parler aux citoyens" et leur "expliquer comment il faut voter" lors de la présidentielle et des législatives, au cours d'un discours-fleuve d'une heure et quart en forme de plaidoyer pour son parti.
"Ils disent que votre gouvernement n'a rien fait", a-t-elle martelé, reprenant les attaques de l'opposition avant de les démonter, pour réveiller la foule ramollie par la chaleur - 33 degrés Celsius annoncés.
Les "Viva Swapo ! Viva !" poings levés, le 4x4 pétaradant à la remorque décorée d'une forêt de drapeaux aux couleurs de la Swapo et le concert d'afro house à la suite du meeting entrecoupé de prières ont fini par redonner de l'énergie aux participants.
La plupart des présents sont militants par atavisme, comme Eva Shangelao Nangolo, née en 1988 à Cuba, où ses parents étaient en exil du temps du combat pour l'indépendance face à l'Afrique du Sud de l'apartheid.
"Peut-être qu'elle (la candidate de la Swapo) fera la différence pour les jeunes qui ont besoin d'emplois", veut croire cette barmaid. Le chômage des jeunes est massif, d'après les derniers chiffres diffusés en 2018: 46% des 15-34 ans étaient alors sans emploi.
Pluie bienvenue
De nombreuses militantes espèrent voir une femme présidente pour la première fois. "Quand une femme est aux commandes, tout se passe bien", assure Natende Rebeka, 22 ans, étudiante en informatique. "Exactement comme quand la mère prend les choses en main à la maison."
Parmi les visages les plus juvéniles, certains reconnaissent être venus surtout "pour le show".
Deux noms reviennent sans cesse: les Sud-Africains DJ Maphorisa et Master KG. Leur présence était annoncée sur les affiches du meeting tenu sur le parking du stade Sam Nujoma, du nom du premier président (1990-2005) et père de l'indépendance acquise en 1990.
Sa statue dorée est visible au loin, surplombant le township de Katutura depuis le toit du siège massif de la Swapo. Encore inachevée, le coût de la construction de ce bâtiment de verre et de métal mordoré par une entreprise chinoise s'élève à 50 millions d'euros, d'après la presse locale.
Plusieurs scandales de corruption ont affaibli la cote du parti historique en Namibie, qui demeure le deuxième pays le plus inégalitaire du monde, d'après un classement de la Banque mondiale.
L'avocat Panduleni Itula, 67 ans, avait réussi la prouesse de rassembler 29,4% des voix à la dernière élection présidentielle sans s'appuyer sur un quelconque parti. Mort en février, l'ex-président Hage Geingob, avec 56% des voix, avait échappé de peu à un second tour inédit dans la jeune histoire du pays.
"La majorité ne peut être vaincue par la majorité", a balayé l'actuel président Nangolo Mbumba, avant d'inviter au pupitre la "camarade" Netumbo Nandi-Ndaitwah, tête couverte de son habituel "doek" bleu - un couvre-chef local.
La prise de parole de "NNN" à peine commencée, les gouttes de pluie ont arrosé Katutura.
"La pluie commence au moment où je commence", a souri la vétérane de la lutte pour l'indépendance de ce pays largement désertique où les précipitations, si rares, sont accueillies comme un bienfait. Et de lancer: "C'est le message du Seigneur."