Michel Desjoyeaux s’est formé et entraîné à La Forêt-Fouesnant, au Centre d’entraînement national pour la course au large, devenu le Pôle Finistère Course au Large, surnommé la « Vallée des Fous ». Seize des 40 skippers de ce Vendée Globe, comme Charlie Dalin et même Violette Dorange, se sont préparés là-bas. Ce lieu unique en France, créé il y a 30 ans, est une véritable fabrique de champions. Michel Desjoyeaux a d’ailleurs préfacé le livre Les champions de la Vallée des Fous, la véritable histoire de cette fabrique à champions, écrit par son directeur Christian Le Pape.
Comment expliquer en quelques ligne une histoire de plusieurs années, qui perdure aujourd’hui ?
1990, il n’était pas dans la culture des coureurs au large, déjà de s’entrainer, et encore moins en groupe. Si débriefing il y avait, ça s’apparentait plus à « On refait le match », au bar des Sports. Le virage va venir de la base. Finistère course au large ne nait pas d’une démarche parachutée des institutions mais bel et bien d’une volonté des coureurs, orchestré, canalisé plutôt, par un homme-clé, Christian Le Pape. Les coureurs, dont je faisais partie, ont rapidement compris qu’avec l’arrivée du monotype Figaro Bénéteau 1, la préparation à la course majeure, le must du solitaire, se ferait par la confrontation, la comparaison avec ses futurs concurrents. Une démarche déjà pratiquée dans tous les sports de haut niveau, mais aux abonnés absents dans la course au large. Et pour encadrer ce petit monde, dont quelques fortes personnalités, il fallait une main de velours, et pas mal de sel sur le gant. Christian, tout prof de sport qu’il fut, ayant usé son ciré avec certains d’entre nous, se posa rapidement comme chef d’orchestre, prenant son propre semi-rigide pour nous mouiller les premiers parcours d’entrainement, réussissant même à nous faire faire du sport à côté !, nous propose des formations, des intervenants, l’histoire était lancée.
Sans le Centre, on aurait eu des résultats individuels, ça a forcément joué un rôle d’accélérateur de carrière pour nous tous. La première année, on était un petit groupe fermé, volontairement, et avec un peu de communication, les autres concurrents pensaient qu’on était une machine de guerre, avec des médecins, des entraineurs, des techniciens, des ateliers, une panoplie complète, alors qu’il n’y avait qu’un pauvre fax posé sur une planche et 2 tréteaux, dans un bureau retranché de la capitainerie de Port La Forêt. On laissait dire, trop content que la supercherie fonctionne, et pendant ce temps-là, on travaillait.
A chaque fin de saison, où on pouvait être fier de nous, on se demandait ce qu’on allait bien pouvoir faire pour progresser, et Christian nous trouvait un nouvel os à ronger, une matière qu’on n’avait pas abordée, et ça repartait pour une saison. La première génération, par ce mode de fonctionnement ambiance « découverte du milieu marin », a mis quelques années à assimiler tous ces savoirs. Aujourd’hui, en deux ans, un coureur ayant déjà un solide bagage (oui, il y a une sélection à l’entrée, ce n’est pas une école de voile, c’est un Centre d’entrainement !) peut devenir une belle machine encore plus performante !
Sans oublier un point essentiel : l’état d’esprit. On vient au Centre pour partager, par juste pour consommer. A quoi les p’tits jeunes disent :
Trente ans déjà que ça dure, et ça ne va pas s’arrêter ! Christian et Ponpon ont créé la machine, l’encadrement se renouvelle aujourd’hui, pour le bonheur de ceux qui dorénavant regardent, de ceux qui y sont, de ceux qui y rentreront demain.
Michel DESJOYEAUX
Le livre est disponible en librairie ou par correspondance ici https://www.courseaularge.com/produit/champions-de-vallee-fous-christian-pape. Editions Albatros 29,00 €