Des agriculteurs manifestent ce mercredi 20 novembre pour le troisième jour consécutif en France, avec la Coordination rurale à la manœuvre, le gouvernement condamnant des dégradations et des blocages "pas acceptables" dans six départements mardi soir.
Au péage du Boulou, tout près de la frontière franco-espagnole entre Barcelone et Perpignan, le blocage installé mardi midi dans le sens Espagne-France sur l’A9 tient toujours. "On est toujours bien accroché à notre action, on a le renfort de gens qui n’étaient pas là hier", a expliqué à l’AFP Philippe Maydat, président de la Coordination rurale (CR) des Pyrénées-Orientales. Pour le deuxième syndicat agricole, qui a lancé une vague d’actions mardi, le but est de bloquer "dans la durée" le trafic de poids lourds allant de l’Espagne vers la France. Selon les autorités françaises, en lien avec leurs homologues espagnoles, "des déviations ont été mises en place pour limiter les perturbations".
D’autres actions de la CR sont attendues mercredi en Occitanie, où un autre blocage est annoncé au niveau de la frontière espagnole à Fos, en Haute-Garonne. A l’autre bout de la France, à Charleville-Mézières, des agriculteurs ont passé la nuit devant la préfecture des Ardennes, à l’appel également de la CR. Ils ont installé de la paille dans des bétaillères et dormi dans des sacs de couchage, selon le responsable syndical Thierry Lebègue. Ils comptent encore rester sur place une partie de la journée et ensuite "sans doute aller bloquer les frontières et on espère que ça suive un peu partout, jusqu’à l’Allemagne", a-t-il expliqué à l’AFP.
Alors que l’alliance syndicale majoritaire FNSEA-Jeunes agriculteurs (JA) a aussi manifesté en début de semaine, avec des actions symboliques comme l’allumage de "feux de la colère" à la nuit tombée, la CR a choisi des modes de protestation plus virulents. Mardi, outre le blocage à la frontière espagnole, des manifestants de la CR ont déversé des déchets et du fumier devant plusieurs préfectures. A Guéret, la porte d’entrée de l’Office français de la biodiversité a été forcée. Selon des images diffusées par le journal La Montagne, il s’agissait de manifestants avec des bonnets jaunes et des gilets de la Coordination rurale.
Devant les bureaux de l’OFB, les manifestants déposent les débris. La porte est fracassée. #Gueret #Agriculteur #Manifestation pic.twitter.com/kAYHY4QiRO
— La Montagne Creuse (@montagne_creuse) November 19, 2024
Mercredi matin, la ministre de l’Agriculture Annie Genevard a estimé sur France 2 que les "actes de dégradation, de blocage à la frontière espagnole" n’étaient "pas acceptables" et risquaient d’entamer la "sympathie" des Français envers la profession. "Je pense que ce n’est pas raisonnable et ça ne sert pas la cause agricole", a-t-elle ajouté.
Moins d’un an après une mobilisation historique, les syndicats agricoles estiment n’avoir pas obtenu suffisamment d’avancées. L’alliance majoritaire FNSEA-JA prévoit d’ailleurs de manifester à nouveau "mardi, mercredi et jeudi" prochains "pour dénoncer les entraves à l’agriculture", a annoncé sur franceinfo mercredi le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau. La semaine prochaine, "dans chaque département", ces syndicats "cibleront des contraintes ou des entraves qu’ils jugent importantes. Ça peut être des représentants de l’Etat, des agences, ça peut être des liens avec les administrations. C’est eux qui décideront", a esquissé Arnaud Rousseau.
"L’objectif est encore une fois de mettre la pression pour dénoncer aujourd’hui ce qui n’est pas acceptable. Et, je le redis, toujours dans le respect des biens et des personnes", a-t-il ajouté, tenant à se distinguer des actions organisées par la CR. Dans les campagnes, "tout le monde est à bout. Et quand vous êtes à bout, appeler au chaos, je considère que c’est totalement irresponsable", a-t-il dit sur franceinfo.
La veille, FNSEA et JA avaient salué "une première victoire" après l’annonce de la tenue d’un débat suivi d’un vote le 26 novembre à l’Assemblée nationale sur le traité de libre-échange négocié entre l’UE et des pays du Mercosur, largement rejeté en l’état par la classe politique française.
Ces manifestations d’agriculteurs se tiennent à quelques semaines de leurs élections professionnelles, qui détermineront la gouvernance des chambres d’agriculture et les subsides versés à chacun. A la tête de trois chambres d’agriculture (Lot-et-Garonne, Vienne, Haute-Vienne), la CR entend en "prendre 15 à 20" à la FNSEA à l’issue des élections de janvier.