« Des prairies avec des vaches limousines, des arbres omniprésents, certains centenaires, une flore parsemée d’espèces dites atlanto-méditerranéennes, uniques en Corrèze, une kyrielle de grottes et d’abris sous roche, une poignée de tout petits villages rejetés sur les premières pentes et puis un modeste ruisseau qui se plaît à musarder en justifiant son nom occitan de planche tordue. »
Retraité de l’Éducation nationale (il enseignait l’histoire et la géographie), Jean-Michel Valade décrit ainsi la vallée de Planchetorte, un espace « aux paysages ruraux » de 938 hectares situé sur le territoire de Brive (Corrèze), « à moins de quatre kilomètres du clocher de la collégiale Saint-Martin », auquel il consacre un ouvrage (lire par ailleurs) né de ses promenades hebdomadaires.
Voilà cinq choses à savoir sur ce site « protégé » dont, observe-t-il, « la richesse et l’authenticité sont méconnues de beaucoup ».
Un ruisseau « taquin »Pas de « cours d’eau d’importance » dans cette vallée, mais un ruisseau « taquin » de moins de dix kilomètres de long « qui prend sa source dans la commune de Jugeals-Nazareth, près du lieu-dit Combefosse, à 240 mètres d’altitude » avant d’entrer dans Brive, « en amont du village de Bellet », puis de poursuivre « son court voyage vers le nord et de frayer avec la Corrèze ».
« En dépit d’un cours tout en retenue, sa pente moyenne étant de l’ordre du 11 pour mille, l’étroit ruisseau de Planchetorte a réussi, par le passé, à dégager une belle vallée verdoyante, à fond résolument plat, dans les grès triasiques », souligne l’auteur.
« Les triplés », symboles de la République« Riche en arbres », Planchetorte abrite, « en lisière du sentier de randonnée », ce que l’ancien professeur appelle « les triplés, trois robustes chênes nés du même gland tombé de la besace d’un geai étourdi ».
Pour Jean-Michel Valade, ils symbolisent « avec force et vigueur » la République française et sa devise Liberté, égalité, fraternité.
Une flore « exceptionnelle »Planchetorte se démarque, dixit le Briviste, « par la singularité et la variété de sa flore » que les scientifiques du Conservatoire botanique national du Massif central qualifient même d’« exceptionnelle ».
L’une des « 520 espèces ou sous-espèces répertoriées » retient particulièrement l’attention de Jean-Michel Valade : « La plus remarquable de cette multitude de plantes est à l’évidence une petite fougère atypique en Limousin, le Capillaire de Montpellier. Elle mérite bien d’être aperçue, car lorsque le soleil donne […], sa chevelure s’ébroue pour accrocher la lumière et s’animer de petites ondes. »
Une très ancienne présence humaineElle remonterait « probablement » au « Paléolithique supérieur, soit entre 31.000 et 20.000 ans avant le présent (*) », indique l’historien.
Il note qu’il n’y avait « pas d’occupation humaine permanente dans les grottes » ni « encore de sédentarisation en ces temps préhistoriques », mais « sans doute une très faible densité de chasseurs-cueilleurs de passage, l’été, depuis le Périgord d’alors, à la recherche de gros mammifères tels rennes ou bouquetins. »
Un trésor à Planchetorte ?Jean-Michel Valade raconte que des fouilles menées par des membres du clergé, à partir de 1860, « ont fait naître, à Chèvrecujols (un des villages de Planchetorte, NDLR), une légende transmise de génération en génération ».
Laquelle ? « On dit que les curés étaient à la recherche d’un trésor de bijoux et de pièces d’or ayant appartenu à la reine d’Angleterre. L’histoire ne précise pas de quelle reine il s’agit, mais on pense que c'est peut-être Aliénior d’Aquitaine, au XII siècle. Bon, ça reste une légende… »
(*) Jean-Michel Valade précise que la locution « avant le présent » est « désormais utilisée par les spécialistes pour dater à rebours du 1er janvier 1950, et en nombre d’années, les âges.
« Pas un livre d'histoire ». Jean-Michel Valade consacre 112 pages, en 12 chapitres, à la vallée de Planchetorte. « Ce n’est pas un livre d’histoire, précise-t-il. Cet ouvrage s’efforce de répondre à une lacune éditoriale. Il n’y avait pas de travaux d’ensemble sur la vallée, simplement des articles sur tel ou tel aspect. J’ai vu l’intérêt de mener à bien une démarche synthétique. Ce livre, s’il ne dit pas tout, est une pierre ajoutée à l’édifice. Il est le point de départ à de nouvelles recherches destinées à parfaire la connaissance de cet espace remarquable. »L’ancien enseignant d’histoire et de géographie dit avoir mobilisé « des archives et des données en matière de géologie, de préhistoire et de géographie », ainsi qu’« un soupçon d’ethnographie et davantage d’histoire contemporaine. »Avec Planchetorte, une vallée en Brive (aux éditions Mon Limousin, 17 euros), Jean-Michel Valade affiche l’ambition de mettre en avant « une vallée que peu de personnes connaissent et qui mérite d’être découverte ou redécouverte ».
Guillaume Blanc