Saverio Baio a entraîné pendant plus de 40 ans, mais il n'a croisé qu'un Andrea Giani.
"C'est son professeur de sport au collège qui nous l'a amené à 12 ans, il mesurait déjà 1,80 m", se souvient l'ancien entraîneur des équipes de jeunes du club de Sabaudia, station balnéaire construite dans les années 1930 par le régime fasciste, à une heure de route au sud de Rome.
"Il avait cette faculté incroyable d'intégrer les choses très rapidement. On s'entraînait par exemple aux contres, il pouvait être un peu maladroit et la semaine d'après quand on refaisait l'exercice, il le faisait parfaitement avec une incroyable facilité", détaille-t-il.
Le phénomène impressionne tellement qu'il intègre rapidement l'équipe réserve, puis quelques mois plus tard l'équipe première qui évolue en A2, la 2e division italienne, à seulement 14 ans !
Avant d'être son coéquipier en équipe d'Italie et peut-être son adversaire lors des JO-2024, Ferdinando De Giorgi, entraîneur de la Nazionale, a été le témoin de ses débuts en A2.
Couteaux et pistolets
"Je jouais à Ugento et un soir à Sabaudia, on a vu arriver un gamin que personne ne connaissait et qui a fait un match vraiment extraordinaire", se souvient De Giorgi.
"Il a montré tout de suite qu'il avait l'étoffe d'un grand, confirme Saverio Baio. Je me souviens d'un match à San Giuseppe Vesuviano, une des salles les plus chaudes du championnat, avec des spectateurs qui venaient parfois avec des couteaux et des pistolets".
"Dans leur équipe, il y avait deux internationaux bulgares je crois, rigole-t-il encore. Quand ils vont vu Andrea sur le terrain, ils ont commencé à se moquer du +petit gamin+. A la fin du match, ils les avaient contrés une douzaine de fois".
Le volley n'était pourtant pas son premier sport: "Il jouait gardien de but au foot, le Napoli notamment avait approché sa famille", se souvient M. Baio.
Mais "LE" sport de la famille Giani est l'aviron: Dario, le père, a participé aux JO-1964 de Tokyo et a entraîné ensuite les meilleurs rameurs italiens sur le lac de Sabaudia.
Tout naturellement, son fils cadet a commencé, enfant, à ramer et à gagner des régates en mini-skiff: 79 sur les 80 auxquelles il a participé selon la légende, confirmée par l'intéressé.
Obélix
C'est finalement en volley qu'il a fait carrière. Avec les "phénomènes", la génération dorée du volley italien, il a quasiment tout gagné: trois titres mondiaux consécutifs (1990, 1994, 1998), trois médailles olympiques (argent en 1996 et 2004, bronze en 2000), quatre couronnes européennes (1993, 1995, 1999, 2003) et sept éditions de la Ligue mondiale !
Après ses débuts remarqués à Sabaudia, le jeune Andrea est recruté par Parme en 1985. Dans ce club alors référence du "pallavolo", il découvre la 1ère division à 15 ans, du jamais-vu avant et depuis.
Andrea Zorzi a joué le rôle de grand frère pour l'adolescent qui a emménagé, seul, dans son premier appartement, et voyageait à travers l'Italie et l'Europe, tout en allant à l'école malgré des retours de matches tard dans la nuit.
"Je n'ai jamais vu Andrea en difficultés, il était loin de sa famille, il était très jeune, mais on avait l'impression qu'il transférait l'assurance qu'il avait sur les terrains en dehors", se souvient l'ancien international, devenu consultant TV.
Plus encore que sa force mentale, c'est sa force physique qui impressionne ses coéquipiers qui lui trouvent vite un surnom, Obelix.
"Quand il avait 3-4 ans, il avait été hospitalisé à Rome pour des graves problèmes pulmonaires, les médecins l'avaient soigné avec des traitements expérimentaux. On lui disait que comme la potion magique de Panoramix, cela lui avait donné sa force prodigieuse", sourit Zorzi.
Durant sa longue carrière (474 sélections entre 1988 et 2005), Andrea Giani a joué à tous les postes, à l'exception de passeur, avant d'entrainer des clubs, dont Modène, et des sélections, dont la France depuis 2022.
"Andrea est fait pour le volley, il est parfaitement à l’aise quand il est sur un terrain", résume Zorzi.