Le dernier sur le territoire : le second pont de Moulins. Les habitants entretiennent des liens très affectifs avec ces ouvrages de construction « qui les relient ».
En novembre dernier, certains tenaient même à baptiser le petit dernier avant son inauguration. Avec des noms de personnalités locales, voire de spécialités culinaires d’ici, comme le « Pontpaugrattons ». Comme pour définitivement l’enraciner dans notre patrimoine.
La Maison de la rivière Allier, à Moulins, consacre une exposition temporaire à la grande variété de ponts qui traversent les cours d’eau des 44 communes du Pays d’art et d’histoire de Moulins Communauté.
Par des panneaux installés sur son toit, cette exposition fait voyager le public à travers l’histoire locale et les techniques d’ingénierie qui permettent, depuis toujours, de relier les terres… et les hommes. On y découvre par exemple un plan de Moulins, datant de 1690, sur lequel figure le pont Ginguet (qui arrivait dans l’axe de la rue qui porte son nom aujourd’hui). Son emplacement y est dessiné en pointillés.
Une quinzaine détruits, avant le RégemortesL’ouvrage était donc déjà détruit, quatre ans après sa mise en service. Au moins une quinzaine de ponts, en bois ou en pierre, édifiés avant lui, n’ont pas tenu non plus. « Autrefois, tous les ponts étaient construits au point le plus étroit de la rivière. Sauf que c’est l’endroit où le débit est le plus élevé », explique Sophie Guet, animatrice du patrimoine.
Jules Hardouin-Mansart a ensuite voulu construire un pont un peu plus en amont. Il n’a pas tenu cinq ans non plus et s’est effondré en 1710. Enfin, Louis de Régemortes conçoit, en 1763, le pont qui a réussi à tenir, mais au prix de nombreux aménagements. Des digues pour contenir les crues jusqu’ici dévastatrices sont construites et un quartier, rive gauche, ainsi qu’un port, sont détruits.
L’objectif : étendre le lit de la rivière pour diminuer le débit de l’Allier. L’exposition évoque également le défi technique de construire au-dessus de la rivière, dont le lit est constitué de 15 mètres de sable. Un problème résolu par Régemortes avec la mise en place de fondations sous toute la longueur de son pont, un « radier », permettant de stabiliser l’ouvrage, en le protégeant des infiltrations d’eau.
Plus proche de nous, pour bâtir le pont de fer, au XIXe siècle, une autre technique a été utilisée pour pallier cette problématique de sable : le procédé Triger. Lors de la construction, les ouvriers ont pu creuser sous la rivière grâce à de l’air comprimé, permettant d’atteindre un sol dur à 15 mètres de profondeur où poser les fondations.
Encore plus récemment, le second pont, construit par l’entreprise Bouygues, a quant à lui des fondations à 20 mètres de profondeur, creusées grâce à des digues provisoires permettant le travaille d’une foreuse.De nombreuses autres techniques d’ingénierie sont détaillées dans l’exposition, conçue par le service patrimoine de Moulins. Notamment par Vincent Thivolle, conseillé par plusieurs ingénieurs des ponts et chaussées.
Elle ne se concentre pas uniquement sur Moulins, mais aborde aussi des ouvrages sur le canal latéral à la Loire ou d’autres sur l’Allier, comme au Veurdre. L’occasion de revenir sur un ingénieur et star locale, Eugène Freyssinet. Désormais une référence mondiale, il a inventé la technique du béton précontraint, lorsqu’il œuvrait dans l’Allier, au début du XXe siècle.
Pratique. L’exposition est visible en libre accès jusqu’à la fin de l’année, aux horaires d’ouverture de la Maison de la rivière, 4 route de Clermont à Moulins.
Emeric Enaud