L’un a moins de 18 ans, les deux autres 18 et 19 ans.
Ils avaient « faim », il était 2 h du mat’, ce vendredi 26 juillet.
Alors, ils ont décidé de se servir, de rentrer par effraction dans un commerce de Moulins pour récupérer des sous et « prendre à manger », explique l’un d’entre eux, devant le tribunal correctionnel de Moulins, ce mardi 30 juillet, en audience de comparution immédiate.
Les deux majeurs ont été jugés à Moulins, comparaissant détenus ; le mineur fera l’objet d’une composition pénale à Mâcon.Cette nuit-là, le trio est filmé par la vidéosurveillance : ces « gamins » arrivent près de la porte arrière, se mettent à trois pour la forcer, entrent, déclenchent l’alarme, s’enfuient, puis reviennent quinze minutes plus tard, prennent le fond de caisse, reviennent encore dix minutes plus tard pour voir s’il reste de l’argent. Un voisin assiste aux entrées-sorties, a pu prévenir la police et fournir des descriptions précises. Deux d’entre eux se font interpeller rapidement rue de Paris ; le troisième, mineur, un peu plus tard à la gare.
« Amateurisme »« Si on veut se faire attraper, on ne s’y prendrait pas autrement », plaide en défense Me Jauvat, qui avance de concert avec Me Goyon, le « manque de discernement », « l’amateurisme », « l’errance » et la « prise de risque considérable pour un butin réduit ».Le gérant de la boutique de déco cambriolée, leur lance en direct, abattu par ses propres difficultés : « Ce n’est pas dans les commerces qu’il faut venir voler. Il n’y a plus d’argent. On est tous à l’agonie. On ne sait même plus pourquoi on se lève le matin. Le plus dur dans l’histoire, c’est pour la porte, ce sont de grosses dépenses, qui devraient être prises en charge par l’assurance », espère-t-il. Le gérant, qui se constitue partie civile, pourra, lors d’une autre audience, le 9 octobre à 9 h 30, avancer ses demandes indemnitaires avec des justificatifs.
Pas de train : ils repartent en villeLes deux prévenus se sont rencontrés via des « connaissances communes ». Ils étaient à Moulins pour « voir des amis ». Puis devaient « reprendre un train », mais il était « trop tard ». Il sont donc repartis en centre-ville. Et… « la tentation », explique l’un. « J’avais bu », explique l’autre.
Les deux sont jeunes mais ont déjà été condamnés, notamment par le tribunal pour enfants.
L’un, tout juste 18 ans (et un mois), vient du Montenegro, il s’est retrouvé quasi seul alors mineur et a enchaîné les suivis par la Protection judiciaire de la jeunesse et les actes de délinquance (jusqu’à être « interdit d’Allier »). Il a déjà été incarcéré au quartier mineurs de Moulins-Yzeure et « ça ne s’est pas bien passé », s’inquiète Me Jauvat, en pensant à la prison avec des codétenus bien plus âgés. Il a été cette fois condamné à un an de prison ferme.
L’autre est parti de chez lui (dans le sud), « pour raisons familiales ». Famille qui avait fait le déplacement pour être à l’audience (et ça a compté). Il a été condamné à huit mois de prison ferme, plus deux mois de révocation d’un précédent sursis probatoire. Tous les deux sont en récidive, souligne la procureure, qui avait requis ces quantum de peine précis, toutefois avec maintien en détention.
Sortis de détention, mais…Mais tous les deux peuvent compter au moins sur un membre de leur famille pour demander un aménagement avec bracelet électronique, ce qu’a autorisé le tribunal. Mardi 30 septembre au soir, les deux garçons ont donc pu sortir de la prison.
Mais il leur reste tout à faire, a prévenu le tribunal, surtout travailler à se construire un avenir. Au moindre faux pas, ils purgent leur peine derrière les barreaux, avec les adultes. On veut tous croire qu’ils arrêteront « les conneries ».
Mathilde Duchatelle