Sa Caravane n’a jamais cessé d’être Sur la route, depuis son premier album, Hôtel de l’Univers, jusqu’à Une autre vie, son dixième. En 24 ans, Raphaël a grandi, mûri mais sans renier une élégance, un style et une écriture qui font de lui un artiste inclassable dans la lignée d’un Christophe.
- Votre 10e album, Une autre vie, est sorti le 8 mars : qu’est-ce que vous retenez des 24 dernières années ? "Je trouve que j’ai bien travaillé (rires) ! Il y a encore beaucoup de choses que j’aimerais faire. J’ai conduit assez imprudemment mais je suis quand même arrivé dans des endroits sans trop me planter".
- Quel a été votre cheminement depuis Hôtel de l’univers ? "Il n’y a pas eu un cheminement en particulier, c’est chaque jour une petite pierre à l’édifice. On travaille sur un projet d’album, puis, au fur et à mesure, les couleurs et le style s’affinent, on fait des choses, on se dit que ça, on l’a déjà exploré donc on fait autre chose. C’est aussi au gré des rencontres et des hasards. On se laisse porter en fait et on peaufine le tir. C’est comme si on travaillait sur le même grand tableau en permanence. Ce qui est sûr, c’est qu’il n’y a pas de plan de carrière, je ne me dis pas : “Je veux aller là, je veux faire ça, je voudrais être tel genre de personne”. Beaucoup de choses étaient déjà là dans les deux ou trois premiers albums. Ce sont des explorations supplémentaires. Mais je n’ai pas du tout fait le tour de la question !"
- On fêtera déjà les 20 ans de l’album Caravane en 2025… "J’en garde un très bon souvenir, ça avait très bien marché… Je ne vais pas faire de célébration particulière, c’est très commercial et ça ne me ressemblerait pas du tout.À Riom, je vais quand même rejouer Caravane, Ne partons pas fâché, 150 ans…Je les adore hein ! Elles évoluent, elles changent de couleurs, d’arrangements d’année en année mais je les aime toujours autant et elles ne s’épuisent pas du tout."
Je ne me sens pas très crédible en rocker. Je n’ai plus du tout ce mode de vie ! J’achète du lait pour bébé !
- Très rock au début, votre musique a évolué vers les balades, c’est un choix ? "Je suis moins intéressé par le rock ; j’aime beaucoup le folk, le jazz, le classique, les voix, les arrangements très simples et les choses émouvantes. Le rock, ça va avec une énergie, la fougue de la jeunesse mais là je ne me sens pas très crédible en rocker. Je n’ai plus du tout ce mode de vie ! J’achète du lait pour bébé ! Tu me diras, les rockeurs doivent forcément en acheter pour leurs enfants, mais ça va avec une vie un peu plus agitée que la mienne. Et ce n’est pas mon goût personnel, je n’écoute pas beaucoup de rock. J’aimais bien Led Zep quand j’étais petit et Chuck Berry ou les Arctic Monkeys…"
- Et toujours Bowie ? "Occasionnellement, j’adore, je replonge dedans ! Je suis un grand fan de Bowie mais je ne l’écoute pas tous les jours."
- Dès lors, y a-t-il un style musical qui vous définit le mieux ? "Plutôt de la chanson française avec des arrangements anglo-saxons, du blues, du rock, du jazz. C’est là-dedans que j’ai grandi et, quand j’étais gosse, je n’écoutais que ça. De la chanson française, pas de la chanson réaliste mais en faire quelque chose de moderne et qu’il y ait une attitude rock."
Avec Christophe, on a une voix qui peut-être proche par moments. Un truc dans le sourd, comme si on manquait d’air. Je me sentais très proche de lui.
- Avec beaucoup d’ambiances et de voix comme le faisait un Christophe aussi… "J’aimais beaucoup sa manière de se poser sur la musique. On a aussi fait des concerts en commun, il a chanté mes chansons et moi les siennes. Il m’a sûrement influencé beaucoup mais je ne m’en rends pas compte ! Parfois, il y a ce côté yéyé, un peu sixties que lui avait vachement et à la fois ce côté expérimental sur la musique. On pourrait dire aussi David Lynch qui a le même rapport à la musique, à la fois très innocent et avec des textures inquiétantes qui se greffent par-dessus. Avec Christophe, on a aussi une voix qui peut-être proche par moments. Un truc dans le sourd, comme si on manquait d’air. Je me sentais très proche de lui."
- Comment avez-vous écrit Une autre vie ? "J’essaye déjà d’écrire des choses qui racontent ma vie. Je commence par avoir quelque chose à dire. Ensuite, je fais des petites maquettes et je cherche un réalisateur, des musiciens avec lesquels je pourrais travailler parce que j’aime leur son, les disques sur lesquels ils ont travaillé… Souvent, il y a une envie au départ, que le disque sonne de telle manière et au final, ça devient autre chose. On se laisse porter quoi ! C’est la musique, les rencontres qui déterminent beaucoup. Ce n’est pas comme un livre où l’on est tout seul du début à la fin."
- Certains thèmes reviennent régulièrement, la nostalgie, notamment… "On peut être nostalgique de plein de choses mais je ne le suis pas tant que ça. J’aime la nostalgie comme un sentiment réconfortant mais ce n’est pas mon caractère."
Je réfléchis à une prochaine tournée, fin 2025, qui sera, je l’espère, quelque chose d’aussi extraterrestre que Bande magnétique, voire un peu plus. J’ai vraiment envie de faire des créations, pas qu’un tour de chant.
- Davantage l’amour alors ? "Oui ! L’amour évidemment, le sentiment amoureux, d’amour pour ses enfants, sa famille, ses amis… Ce sont les choses les plus importantes pour moi au monde."
- En novembre 2022, vous étiez à Issoire pour votre spectacle Bande magnétique, totalement différent du show que vous présenterez à Riom ? "On sera plus sur du festival, plus classique avec de très bons musiciens. On monte sur scène, on joue 1 h 30, on essaie de s’éclater, c’est l’été ! Je réfléchis à une prochaine tournée, fin 2025, qui sera, je l’espère, quelque chose d’aussi extraterrestre que Bande magnétique, voire un peu plus. J’ai vraiment envie de faire des créations, pas qu’un tour de chant, du film, de la vidéo, mais tout peu changer !"
- Et votre été à part Riom ? "On a 17 dates, je ne sais pas si c’est beaucoup mais c’est un petit été délicieux (rires)."
- Vous auriez voulu avoir justement Une autre vie que la vôtre ? "Ça me correspond très bien mais il y a tellement de choses passionnantes dans la vie… J’aurais aimé être navigateur, alpiniste, un grand médecin, un grand pianiste. Faire une ou deux choses pas mal, ça prend déjà du temps et on ne l’a pas, ce temps. Je ne suis pas dans un karma éloigné du mien. À 8 ans, j’avais envie de faire ce métier et je le fais encore."
François Jaulhac
Raphaël en concert pour les Frénésies, mercredi 31 juillet, à 20 h 30, au Pré Madame. Gratuit.