Quelle est votre réaction à chaud ?
Cassandre Beaugrand : C’est incroyable. Je dis la même chose à tout le monde, je n’ai pas les mots. C’est fou ce qu’il m’arrive. Si on m’avait demandé ce matin si j’y croyais, je n’y aurais jamais cru.
"Ce matin j’étais toute paniquée, je me suis mise à vomir avant le départ. Cela ne m’est jamais arrivée. Je ne voulais pas reproduire la même chose qu’à Tokyo où j’étais trop stressée et où j’ai perdu tous mes moyens".
Vous n’avez pas levé les bras à l’arrivée. Pourquoi ?
C.B : Sur la ligne d’arrivée, je ne réalisais pas. J’avais envie qu’on me réveille. Je me disais : je l’ai fait. Déjà, on a couru aujourd’hui alors qu’il y avait des incertitudes. "Ce matin j’étais toute paniquée, je me suis mise à vomir avant le départ. Cela ne m’est jamais arrivée.Je ne voulais pas reproduire la même chose qu’à Tokyo où j’étais trop stressée et où j’ai perdu tous mes moyens". J’ai réussi à me refocaliser et, franchement, le nombre de fois où mon mental a été ma faiblesse, il a été ma force aujourd’hui. C’est une revanche sur le passé. J’ai fait une course dont je vais me souvenir longtemps et j’aimerais qu’on arrête de me dire que je flanche avec le mental. Ce n’est pas que ma médaille. C’est la médaille de tous ceux qui ont cru en moi, de ceux qui m’ont poussé et relevé lorsque j’étais au plus bas. Après cela n’a pas été un chemin facile et je n’ai pas cessé d’y croire. Championne olympique c’était le rêve de ma vie et je le réalise aujourd’hui.
— Jeux Olympiques (@jeuxolympiques) July 31, 2024
Qu’est-ce qui a fait la différence dans les derniers kilomètres ?
C.B : La Suissesse mettait un train très élevé, je pensais pas que ça serait elle qui ferait ça. Nous étions toutes à la limite. Dans le dernier tour, quand cela a commencé à accélérer, je me suis dit qu’elles savent que j’ai un bon finish et que je suis capable de sortir. J’étais coureuse de 1500 m et dans le dernier 1500 je suis parti au bluff. Je ne savais pas si elles tenaient, ou pas, derrière. Je me suis concentrée sur moi.
Je me suis dit : "T’es en séance d'entraînement avec les gars de ton groupe, tu y vas.
Et j’ai essayé de ne pas me laisser déstabiliser car mon corps était tendu avec tout ce public. J’avais des frissons partout.
On a l’impression que tu as bien géré ta course…C.B : Et pourtant je me suis fait des frayeurs plusieurs fois parce que le courant nous emportait. Cela n’était pas facile de nager dans la Seine. On n’avait pas trop de repères, on n’avait que la course de l’an dernier et que le courant était plus fort aujourd’hui. On se laissait vraiment emporter. C’était dur. J’ai essayé de recoller à chaque fois. Ensuite, en vélo, je savais que ça allait attaquer tout au long. Je suis restée vigilante. Il y a des chutes à côté de moi, le but était de rester sur mon vélo et de montrer que j’étais là. Que les attaques ne m’atteignaient pas. Enfin, je pouvais faire la différence à pied grâce à mon finish.
— francetvsport (@francetvsport) July 31, 2024
Avant le vélo était ta faiblesse…C.B : À Tokyo, je me serais laissée décrocher plusieurs fois parce que j’étais paniquée par les routes mouillées. Au final, partir en Angleterre et rouler pendant deux ans sous la pluie m’a habituée à ces conditions. En fait, je n’ai jamais paniqué une seule fois.
Vous êtes arrivée il y a dix ans sur le circuit en étant annoncée comme la grande pépite, dix ans plus tard vous êtes championne olympique…C.B : Cela a été long, très long. Cela n’a pas été facile. Depuis deux ans, on dit que je passe un cap en étant partie en Angleterre. Mais, je pense surtout que cela a été un gros travail sur moi car personne n’a vu lorsque j’étais au fond du trou après les Jeux de Tokyo.
Tout le monde affirmait que je n’étais pas à ma place mais je ne les croyais pas. Je n’y arrivais pas. Je pensais que je n’avais pas de mental.
Au final, j’ai cru en moi aujourd’hui. Il y a beaucoup de bluff en triathlon. J’ai bluffé et j’ai gagné.
Avez vous été portée par le public ? C.B : J’ai essayé de ne pas me laisser emporter car j’avais tout mon corps qui se tendait avec tout ce monde qui criait. Je n’entendais plus rien, même pas les écarts. D’ailleurs je n’ai entendu aucun écart, je ne savais pas où était le groupe de derrière. C’était incroyable.
J.D et K.C