Dans la combe des Malavaux, sur le bord de la route encaissée menant à Molles, une imposante stèle est là qui rappelle le lâche assassinat, le 20 juin 1944, dont fut victime ici le ministre de l’Éducation nationale et des beaux-arts du gouvernement du Front populaire de Léon Blum.
Jean Zay allait avoir 40 ans quand trois miliciens, sous prétexte d’un transfert, sont venus l’extraire de sa cellule de la prison de Riom où il aura passé les quatre dernières années de sa vie, (condamné pour avoir tenté de rejoindre l’Algérie à bord du Massilia, afin de continuer le combat contre l’occupant), et l’ont emmené jusque-là.
Deux corpsSes bourreaux l’obligent à gravir un chemin pentu enfoui dans la verdure menant au sinistre endroit dénommé le Puits du diable, une profonde excavation au milieu d’un bois. C’est là que Zay aura eu le temps de crier « vive la France » avant d’être lâchement abattu par cinq balles de mitraillette, son corps jeté au fond de ce trou lugubre, sommairement recouvert de terre et gravats.
Ce n’est que le 22 septembre 1946 que deux corps seront retrouvés ici par des chasseurs, celui de l’ancien ministre, identifié grâce à ses empreintes dentaires, et un deuxième qui n’a pu être identifié.
Seul Charles Develle, l’un des trois meurtriers, sera retrouvé et jugé en 1953. C’est lui qui a révélé les circonstances de cette sinistre exécution. Il échappera à la peine de mort, condamné aux travaux forcés, puis libéré deux ans plus tard…
Grâce à la patiente détermination du « Comité en l’honneur des 80 parlementaires du 10 juillet 1940 et des passagers du Massilia », présidé par le docteur Joseph Bléthon, et l’aide précieuse de la ville de Cusset, ce chemin du supplice que Jean Zay dut gravir est désormais jalonné de dix-neuf panonceaux disposés de loin en loin, rappelant quelle fut la vie de celui qui était l’un des plus ardents défenseurs de l’école publique qu’il avait à cœur de moderniser et démocratiser, et qui repose maintenant au Panthéon.
Le promeneur, au bout de ce sentier de mémoire, trouvera un solide banc de bois où il pourra souffler un peu après cette courte ascension, sur lequel est gravée une phrase à caractère prémonitoire écrite par Jean Zay dans l’un de ses nombreux carnets deux jours avant son exécution : « J’ai le cœur et la conscience tranquilles, je n’ai aucune peur ».
Un Ginkgo BilobaAu bord de la route, près de la stèle, un arbre se dresse depuis peu, rappelant que l’ancien ministre avait tenu à planter deux saules dans la cour de la prison de Riom.
En sa mémoire, cet arbre est un Ginkgo Biloba, symbole de résistance et de paix, seul arbre ayant réussi à survivre à la suite du bombardement d’Hiroshima. Gageons que cet arbre représentant l’éternité, saura s’enraciner en ce lieu et gardera le plus longtemps possible la mémoire de ce grand homme tombé sous les balles d’un régime totalitaire.