Pour pénétrer dans l’enceinte du chantier expérimental de Guédelon, les visiteurs peuvent désormais traverser une passerelle suspendue… Et un pont-levis. Deux travaux qui monopolisent l'équipe des charpentiers du château depuis trois mois, et touchent au but.
Pour les découvrir, quittez l’allée principale qui mène au château. Prenez à droite pour rentrer par la porte latérale. Là, vous arriverez en face d’un mur qui, longtemps, était en grande partie ouvert. Cette année, le voilà presque entièrement bâti. Le chantier de ces deux œuvres devrait s’achever dans les prochains jours, offrant un spectacle visible nulle part ailleurs en France.
Une ouverture au village et vers la suite des constructionsSur la passerelle encore en travaux, les huit charpentiers de l’équipe s’affairent. "Ça fait trois mois qu’on est dessus. On a tout fait du dessin au plateau, explique François, charpentier. Là, on fait les finitions du pont. Il est en chêne, c’est ce qui pousse ici. Tout a été fait à la main par l’équipe. On pose les rambardes, le platelage…" Bientôt, l’ouvrage final permettra au public de franchir cette entrée pour la première fois.
C’est une nouvelle étape pour la seigneurie de Guédelon qui s’ouvre.
"C’est la première fois que le château aura une sortie vers le village et le jardin, explique Florian Renucci, maître d’œuvre du chantier. Ce qui amorce l’agrandissement du fief et annonce la construction de la suite. Il y a un usage symbolique, la sortie fait le lien avec le village." Le professionnel évoque l’histoire du château, et l’importance de ce nouveau mécanisme pour se protéger des ennemis. Ici, on construit et on pense XIIIe siècle.
Les charpentiers finalisent depuis plusieurs jours les ouvrages.
Simple passage pour les visiteurs, ces nouvelles constructions relèvent pourtant de l’extra-ordinaire. "Pour la conception, on va chercher des ouvrages d’époque, rapporte Florian Renucci. On part de modèles qui ont existé et le but est de les reproduire à l’identique. La particularité de cette passerelle, par exemple, c’est qu’elle n’a pas de clous. Les assemblages de bois permettent de verrouiller l’ouvrage. L’ensemble devient rigide et solide. En France, des ponts-levis du XIIIe siècle, il n’y en a pas?! Cette hypothèse de restitution est une première."
Pas d’inventions, ni d’approximations. Pour y parvenir, un immense travail de recherche précède toute construction. "On cherche des traces, on consulte des iconographies, on visite des sites, explique Sarah Preston. On émet des hypothèses pour tester, et on recommence." "Ce sont des techniques de taillage ancestrales, complète le chef de chantier, Théo Roche. On n’utilise pas de machines, on dessine."
Le système de relevage est encore à imaginerVéritable pièce maîtresse, le pont-levis s’inspire de la porte de Villeneuve-sur-Yonne. Reproduite à l’identique, jusqu’aux trous dans la pierre qui doivent accueillir le mécanisme de relevage. Dont le secret de la construction n’a toujours pas été découvert. "On a beau faire des recherches depuis des mois, aucune source nous dit comment faire. C’est ce qui est intéressant et excitant, s’amuse Florian Hemery, spécialisé dans la recherche et l’archéologie. On peut imaginer une potence avec une poulie… Il faut trouver ces petites techniques."
Les plans et la photo de la porte de Villeneuve-sur-Yonne sont exposés aux yeux des visiteurs.
Pour la saison touristique 2024, la porte restera ouverte et fixée à la passerelle. L’étape du relevage viendra à l’automne, lorsque les maçons auront élevé l’échafaudage du mur qui entoure la porte. D’ici-là, le chantier continue d’évoluer. "Cet été, les visiteurs peuvent voir la construction d’archères, de belles cheminées, la cage d’écureuils tourner et de nouveaux ateliers participatifs, liste Sarah Preston. Pour la saison suivante, ce sera la fabrication de vantaux, donc une énorme porte pour fermer l’entrée principale. On est toujours dans le progrès."
Nouveauté. L’atelier des bâtisseurs ouvre ses portes cette année. En situation de chantier, cet atelier permet de mieux appréhender les techniques de construction des bâtisseurs du Moyen Âge. Tarif : 8.50 €. Ouvert à tous. Réservation conseillée.
Mila Gosseaume