Chefs, ingénieurs agronomes, nutritionnistes, diététiciens… ils planchent dessus depuis des années. Sodexo Live! a été retenu par le CIO pour orchestrer les quelque (tenez-nous bien) 40 000 repas mangés quotidiennement lors des Jeux de 2024. Pour ça, la filière du géant de la restauration, connue pour son engagement à Clairefontaine ou Roland Garros en matière d’évènement sportif, a dû suivre le cahier des charges définie par la food vision de Paris 2024, avec des points forts concernant la RSE (Responsabilité sociétale des entreprises), l’empreinte carbone, la réduction de viande…
Avant les recettes, priorité aux produits ! D’autant qu’un maximum seront bruts, non assaisonnés, comme au salade bar. 100 % des produits sont de saison, 80 % d’origine France, et 25 % sourcés localement à moins de 250 km de Paris. « Pour construire les 550 recettes, on a laissé parler le culinaire, grâce au travail de notre chef exécutif Charles Guilloy, pour que ça soit bon avant tout. On s’est entouré de diététiciens comme Hélène Defrance pour la partie nutrition », pose Carole Galissant, directrice transition alimentaire et nutrition pour Sodexo France, présidente de la Commission Nutrition du Syndicat national de la restauration collective.
Carole Galissant, diététicienne nutritionniste de formation, parle de « proposition multiculturelle accessible à tous » : « On a été à l’écoute des désidératas des différents Comités nationaux selon les régions du monde. Un vrai puzzle ! » D’où la déclinaison en quatre grandes thématiques : France, Asie, cuisine du monde, Afrique/Caraïbes/Moyen-Orient. « Il a fallu aller chercher la bonne recette. On ne fait pas un bon riz gluant en le faisant trop cuire ! », en sourit la directrice.
Si on devait résumer le plus grand défi de Sodexo Live! ? « Marier ces mangeurs pluriels – du fait de leur discipline et de leur culture – au gustatif. Que les sportifs soient rassurés de ce qu’on leur propose pour leur performance ». Pour ça, des valeurs nutritionnelles et d’empreinte carbone seront affichées à côté des plats.
« En s’interrogeant sur l’origine des produits s’est posée la question de leur intérêt nutritionnel : les huiles 1ère pression à froid non raffinées, les variétés de sucre, des céréales blanches à complètes, des produits peu transformés, du sans gluten ou encore du sans lactose sollicité par certains comités nationaux », cite la directrice. Réputée assez viandarde, la gastronomie française fera aussi preuve d’équilibre avec les protéines végétales : « 30 % de nos plats seront végétaux, via légumineuses et oléagineux, ce qui est assez nouveau aux Jeux, grâce à une montée de la végétalisation dans le milieu sportif. Des petites graines, il y en aura partout à tous les étages ! » s’enjoue Carole Galissant. W
« Parce ce que l’offre est variée, elle conviendra à tous. À chaque athlète de composer selon ses attentes, son timing »
Que retenez-vous de votre expérience olympique en matière d’alimentation ?
Avec mon sport, nous étions à la Marina, délocalisés à 1h du village dans un hôtel. L’offre alimentaire manquait de créativité et n’était pas adaptée, on se lassait vite. Et de ce dont je me souviens de mon expérience post-compétition au Village olympique, c’était un immense espace de restauration avec beaucoup de brouhaha, on se perd un peu dans l’offre, c’était tellement immense.
En quoi la façon de vous alimenter a été un levier dans votre carrière sportive ?
Lorsque je mets un pied dans le haut niveau, je n’ai aucune éducation en termes de nutrition sportive, aucune notion de comment organiser mon alimentation par rapport à ce que je demande à mon corps. Je n’ai même pas 18 ans et il commence à montrer des signes de désadaptation. Plutôt que de me renforcer et de développer mon potentiel, je me fatigue et me blesse. J’ai pris conscience de la nécessité de m’entourer d’un expert. Ça a été un levier, vu les résultats sur mon organisme en termes d’énergie, de sensation, de résistance… Sans ça, je n’aurais jamais pu accéder au top mondial.
Quelle formation avez-vous suivie pour vous immerger dans le sujet ?
Après un BTS diététique, je suis entrée en DU Nutrition, micronutrition, exercice et santé. Je découvre une science, une façon d’aborder la nutrition qui me passionne. J’y rencontre Denis Riché (nutritionniste spécialisé dans le sport, expert de la sphère digestive et de l’immunité), qui me fera atteindre mes objectifs sportifs. Il a enrichi mes connaissances vitesse grand V.
Vous avez eu un regard sur les recettes proposées aux athlètes des jeux de paris 2024, à quoi avez-vous été vigilante ?
Au sein du pôle « Food and Beverage » du Cojo, j’ai été impliquée dans les phases de préparation de la restauration, à passer au peigne fin les propositions aux côtés de deux diététiciennes de l’Insep et des chefs Sodexo Live!. Il y a eu des choix à faire mais on a misé sur la variété et l’équilibre. C’est parce que l’offre est variée qu’elle conviendra à tous. À chaque athlète de composer selon ses attentes, son timing.
Comment composer quand il y a pléthore de choix ? 500 recettes, il y a de quoi s’y perdre !
Les JO sont une compétition unique mais l’athlète se prépare pendant quatre ans ! Quand on arrive aux Jeux, on sait ce qu’on doit faire puisqu’on a construit un plan avec un expert en nutrition pendant plusieurs années. On a dans notre carrière beaucoup de compétitions importantes pour lesquelles on a déjà mis en place un protocole les saisons précédentes. On ne se fait pas forcément accompagner durant les Jeux car on a bâti ça en amont.
Comme j’ai été accompagnée individuellement par un expert durant ma carrière, j’essaie d’apporter ce dont j’ai bénéficié. Si j’ai démarré en collectif avec 5 saisons en club pro à l’OM, on me sollicite aujourd’hui en individuel en natation, athlétisme, boxe, gym, tennis, et ne cesse d’enrichir mon expertise.
(Instagram : @defrancehelene)