Sur les bords du lac d’Orient, les températures sont encore un peu fraîches pour la saison. Peu importe. Robin et son fils ont décidé de se jeter à l’eau. "Elle est trop froide", concèdent-ils en regagnant la plage de sable fin de Mesnil-Saint-Père. Les deux touristes suédois ont décidé de se poser dans ce petit coin de l’Aube, à une vingtaine de kilomètres de Troyes. Une étape bienvenue dans leur périple à travers l’Europe.
"Quand il fait beau, c’est blindé"Il faut dire que le site, au sein du parc naturel régional de la Forêt d’Orient, n’a rien à envier à certaines stations balnéaires. Si le flot de baigneurs se fait encore attendre, les adeptes de sports nautiques sont déjà bien là. Trois planches à voiles côtoient six foils poussés par un vent généreux. Bien calés dans une barque, deux pêcheurs surveillent leur ligne, en plein milieu du lac.Au lac d'Orient, l'animation n'est pas seulement sur le sable mais aussi sur l'eau."Quand il fait beau, c’est blindé, racontent Isabelle et Cédric, les patrons du Bar de la plage. Les gens viennent pour le sable. Le lac est vraiment bien coté. On a que de bons retours. Non seulement il est beau, mais il est également très propre."
Le site profite d’une situation idéale, non loin du flux de l’A26 et de l’A5. "Beaucoup de personnes viennent par hasard parce qu’ils ont vu les panneaux sur l’autoroute, expliquent les deux gérants. Ils s’arrêtent pour découvrir. Et comme on a la chance d’avoir une offre d’hébergement qui est pas mal, ils peuvent rester."
Photo Céline Niel"C’est moins cher et plus proche que d’aller sur la côte".
Au pied de sa flottille de pédalos, Martine fait partie des figures historiques du lac d’Orient. "J’ai commencé ici en 1968, à l’âge de 12 ans", confie-t-elle. Soit deux ans seulement après la mise en service de ce lac artificiel. "Au début, il n’y avait que des barques, se souvient-elle. C’était moins cadré. On y faisait du camping sauvage et des feux de camp sur la plage. Ça a changé depuis. Le succès a tout de suite été au rendez-vous. Aujourd’hui encore, les gens viennent pour se baigner et pour trouver une ambiance de vacances. Ça bouge, ça vit. Et puis, c’est moins cher et plus proche que d’aller sur la côte."
Trois lacs, trois ambiancesSi le lac d’Orient est séduisant, les deux autres réserves situées dans son prolongement méritent qu’on s’y attarde. "Chaque lac a sa fonction", résume Benjamin Vu Van, chargé du tourisme au sein du Parc. Si le lac d’Orient est prisé pour ses activités nautiques, celui du Temple permet d'observer la faune. Sur le troisième site, l’ambiance n’a rien à voir. Le lac Amance est connu pour ses activités motorisées. On peut s’initier au wakeboard et à la bouée tractée et même se former au permis bateau. Bref, les trois étendues d'eau méritent bien plus d’une journée pour en profiter pleinement.Un héron pourpré de la réserve naturelle. Photo Céline Niel
Essayer de "déconcentrer" l'activité des lacsLe parc naturel régional ne se limite pas à ses trois lacs. C’est là tout l’enjeu du territoire aubois : arriver à faire découvrir aux visiteurs la diversité de ses espaces, répartis sur 58 communes. "Les lacs sont notre atout, notre fil conducteur", constate Benjamin Vu Van. "C’est à Mesnil-Saint-Père que l’on trouve le plus de monde. Sur les plages, quand il fait beau en période estivale, il peut y avoir la foule. Actuellement, nous ne rencontrons pas de problème de surfréquentation. Mais il faut agir maintenant pour l’éviter à l’avenir. Notre objectif est donc de déconcentrer l’activité des lacs. On veut notamment amener les gens hors de la Champagne humide (ndlr, le secteur des lacs) et les faire rester plus longtemps chez nous."Le sentier du Colosse aux pieds d’argile est jalonné d’intrigantes portes. Photo Céline NielEn dehors des lacs, le parc a la chance d’être bien doté en chemins de randonnée. "Ils sont très recherchés, explique Benjamin Vu Van. De façon générale, le tourisme tourne autour des activités de plein air. Les visiteurs viennent ici pour se reconnecter à la nature. Sur le territoire, on a entre 250 et 300 km d’itinéraires de randonnée, dont 195 km gérés par le parc." Pour le décor de ces circuits, les visiteurs peuvent idéalement compter sur plus de 20.000 hectares boisés où chênes et charmes sont bien représentés.
Des itinéraires de randonnée en pleine nature"Moi, je ne vais pas du tout sur les plages. Je suis plutôt du genre à fuir la foule. Mon exutoire, c’est la forêt", confie Jean-Michel, un habitué croisé devant la Maison du parc, à Piney. "Ici, on a un beau terrain de jeu. Il faut juste savoir où aller et quoi regarder", raconte ce passionné de girolles et de photo.
Cette année, les visiteurs vont pouvoir arpenter un nouveau circuit dépaysant sur 7 km. Le sentier du Colosse aux pieds d’argile, au départ de la Maison du parc, est jalonné d’intrigantes portes, autant d’entrées pour une sortie dépaysante. Au cœur d’une très belle chênaie de production, il offre une vue sur le lac du Temple et plusieurs stations qui invitent à réfléchir sur la fragilité de la forêt et le dérèglement climatique.
Ceux qui préfèrent pédaler plutôt que marcher ne seront pas en reste. Le secteur est très bien aménagé pour que les cyclistes roulent en toute sécurité. "On a notre autoroute", explique Benjamin Vu Van qui fait référence à la voie verte qui permet de faire le tour du lac d’Orient et de longer l’ensemble des trois lacs (comptez près de 6 heures). Les plus courageux pourront même tester la totalité de l’aménagement, soit 42 km, entre Troyes et Port-Dienville. Une belle mise en jambes.
Prendre le temps de découvrir la faune localeAu plus près de la nature, les amoureux de la faune pourront prendre le temps et profiter des observatoires. "Une grande partie du Lac du Temple est classée en réserve naturelle nationale, précise Benjamin Vu Van. C’est un havre de paix pour la faune. On compte plus de 300 espèces d’oiseaux." Quatre postes d’observations permettent de les contempler. Les plus chanceux croiseront peut-être un héron cendré ou une cigogne noire.
Une activité prisée par les touristes, notamment les Anglais. "On est sur un axe majeur de migration. C’est pour cela que le territoire est riche au niveau de l’ornithologie", rappelle Benjamin Vu Van. La Forêt d’Orient est également dotée d’un parc animalier. Un espace faune regroupe de grands mammifères d’Europe. On y croise cerfs, daims, bisons d’Europe, mouflons… "Ce n’est pas un zoo. Les animaux évoluent en quasi-autonomie toute l’année. C’est comme si on les voyait dans leur habitat naturel."Un escape game se déroule près du lac du Temple. Photo drone Marc CharassonPour partir à la découverte du parc de façon ludique, cinq escape games ont été mis en place. L’un d’eux, en plein air, est sur la thématique des templiers. Dans le périmètre du parc, ces derniers possédaient en effet une exploitation forestière. Le scénario du jeu est tiré de la fameuse bande dessinée Triangle secret, de Didier Convart.?Cette série a pour particularité de se dérouler en Champagne avec de nombreuses références au territoire, dans un esprit ressemblant au Da Vinci Code.
Les amoureux d’histoire ne quitteront pas le parc régional sans aller faire un tour en plaine briennoise, au musée Napoléon de Brienne-le-Château. C’est ici que le futur empereur a suivi les cours de l’école militaire pendant cinq ans. Le moulin à vent de Dosches ainsi que Trannes et sa production de champagne sont également plébiscités pour des étapes à un séjour en terres auboises.
Coup de cœur. Plus petit que la randonnée du Colosse aux pieds d'argiles, le sentier du Palais du roi chêne (totalement accessible aux personnes à mobilité réduite) se limite quant à lui à 800 mètres.Photo drone Marc CharassonIl faut l’emprunter pour ses sculptures en bois brut et sa somptueuse mare pédagogique recouverte de lentilles d’eau où de nombreuses grenouilles ont trouvé refuge. On peut y rester très longtemps, à l’affût des batraciens.Photo Céline Niel.
Texte : Marc CharassonPhotos : Céline Niel et Marc Charasson