Des agriculteurs dans la région de Doukkala, au nord-ouest du Maroc, ont procédé à la destruction d’une partie de leurs récoltes de légumes, notamment de tomates, en raison de la baisse de la demande, a rapporté ce 12 juillet le site Bladi en citant le quotidien arabophone marocain Assabah.
Les agriculteurs de Doukkala ont confié au quotidien n’avoir vendu aucun fruit ou légume depuis un mois. Bien que le pays connaisse une sixième saison de sécheresse consécutive, la filière vient d’enregistrer une nouvelle performance. «Non seulement le prix de la tomate a chuté, mais les agriculteurs ont été obligés de la détruire en quantités», a relaté le journal marocain.
D’après ce dernier, les exportateurs de tomates vivent la même situation et éprouvent des difficultés à les écouler sur les marchés étrangers. Depuis quelques mois, a expliqué le journal, les fruits et légumes marocains sont «indésirables» dans certains pays européens. Des camions de tomates marocaines ont été même attaqués en France et en Espagne, a rapporté Assabah.
Deuxième exportateur mondial de tomates derrière les Pays-Bas, le Maroc exporte principalement vers la France (320 000 tonnes en moyenne par an), le Royaume-Uni (122 000 tonnes), les Pays-Bas (65 000 tonnes), l’Espagne (45 000 tonnes) et la Mauritanie (26 000 tonnes), d’après les chiffres d’AgriMaroc.
Selon les chiffres de la Commission Européenne, les importations de tomates par l’UE en provenance de pays tiers ont considérablement augmenté au cours de la dernière décennie. De la période 2014/15 à celle de 2022/23, le volume de tomates importées dans l'espace européen a presque doublé, passant de 424 274 tonnes à 821 918 tonnes.
Selon les données d’Eurostat, le Maroc a dépassé l’Espagne en volume de tomates vendues dans l’UE au cours des trois premiers mois de l’année, positionnant le Maroc comme le deuxième fournisseur de l’UE après les Pays-Bas. En 2015, l’Espagne vendait dans l’UE deux fois plus de tomates que le Maroc, soit 153 680 tonnes supplémentaires.
Pour la campagne 2023/24, d’octobre à mars, l’UE a importé 551 015 tonnes de tomates de pays tiers, dont 373 421 tonnes provenaient du Maroc. La France est de loin le plus grand importateur, avec 293 113 tonnes, soit 78,5 % des tomates marocaines destinées à l’UE selon la plateforme Freshplaza.
Le Maroc, principal fournisseur, a vu ses exportations vers l’Europe passer de 329 696 à 539 307 tonnes, représentant ainsi 65,6 % des importations totales lors de la dernière campagne. En termes de revenus, le Maroc a généré 363,41 millions d’euros de ventes de tomates dans l’UE au premier trimestre 2024, avec un prix moyen de 1,73 euro par kilo.
Des excellents résultats pour les producteurs marocains mais qui suscitent une attitude hostile des agriculteurs européens. D’après AgriMaroc, l’importation de tomates marocaines fait peur aux producteurs de tomates en Europe, notamment en France et en Espagne.
Ces derniers mois, plusieurs associations et organisations de producteurs français, soutenues par leurs homologues espagnoles ont été véhémentes. «Une vraie politique de désinformation et d’attaque ciblée a été menée en conséquence», raconte le site spécialisé.
Le 16 mai dernier, une mobilisation d’une cinquantaine d’agriculteurs des Pyrénées-Orientales a pris d’assaut l’autoroute A9 à Perpignan, ainsi qu’un supermarché local, pour protester contre ce qu’ils appellent «la concurrence déloyale» des fruits et légumes importés du Maroc, rapportait L’Indépendant de Perpignan.
La chaine BFMTV rapportait le 1er février dernier que des centaines de kilos de légumes avaient été déversés sur l'autoroute A7 du côté de Montélimar, dans la Drôme, par des agriculteurs qui s'en sont pris à des camions venus de l'étranger, et plus précisément en provenance du Maroc. «Ils veulent la peau des tomates marocaines», écrivait BFMTV, expliquant cette grogne par un certain «favoritisme» dont bénéficierait le Maroc au détriment de l’offre française.
La France importe désormais presque autant de tomates qu'elle n'en produit, pointait encore la chaîne d'information, soulignant que le pays est aujourd'hui le troisième importateur mondial de tomates dans le monde, derrière les États-Unis et l'Allemagne.