"Il s’agira d’un super vice-président". Donald Trump est resté plutôt laconique au micro de Fox News ce lundi concernant l’identité de son colistier pour l’élection présidentielle américaine. Le candidat républicain a tout de même distillé quelques indices : il faut "quelqu’un qui nous aidera à nous faire élire", mais aussi quelqu’un qui serait "capable de faire un excellent boulot en tant que président" (à comprendre, prêt à lui succéder en cas de force majeure).
Pourtant, le candidat républicain à la présidentielle va devoir accélérer : son choix devrait être officialisé avant la convention républicaine de Milwaukee la semaine prochaine, lors de laquelle le duo que Donald Trump formera avec son colistier sera officiellement couronné par le parti. Les rumeurs ne manquent pas. Trois noms sortent pour l’instant de la mêlée : l’expérimenté Marco Rubio, l’idéologue J.D. Vance ou encore le fortuné Doug Burgum. Mais d’autres figures, comme Elise Stefanik ou Tim Cotton, sont également toujours en embuscade et pourraient bien décrocher le ticket.
Marco Rubio est loin d’être une personnalité inconnue dans la politique américaine. Sénateur de la Floride depuis 2011, il s’était notamment présenté à la primaire républicaine de 2015 sur une ligne voulue plus modérée et presque anti-Trump, allant jusqu’à qualifier ce dernier d'"escroc" aux "petites mains". Avant de finalement devoir se retirer de la course, emporté comme tous les autres par la vague trumpiste.
Parmi les avantages cités par la presse américaine, cette expérience politique pourrait justement faire pencher la balance en faveur d’un ticket Trump-Rubio. Fils d’immigrés cubains, celui que Trump a longtemps aimé appeler "Little Marco" pourrait être une figure de poids pour attirer l’électoral hispanophone dans certains swing states - ces Etats qui oscillent souvent entre les démocrates et les républicains. Il apporterait également une certaine crédibilité sur les questions internationales, ayant été un membre influent des commissions des relations extérieures et du renseignement du Sénat.
Mais sera-t-il accepté par son propre camp ? Car même si Marco Rubio a largement apaisé ses relations avec Donald Trump ces dernières années - ils se sont encore affichés ensemble lors d’un meeting en Floride cette semaine - la hache de guerre n’est pas totalement enterrée avec une large partie de l’électorat républicain. Ces derniers ont toujours une dent contre lui pour un projet de réforme migratoire en 2013, bien moins radical que la ligne trumpiste. En 2016, Marco Rubio avait également très clairement expliqué qu'il refusait d'être le colistier de Donald Trump. La rancune peut parfois être tenace, surtout chez Donald Trump.
James David Vance est sénateur de l’Ohio depuis 2023. Agé de 39 ans, son ascension éclair dans le milieu conservateur américain est largement due à son best-seller publié en 2016, Hillbilly Elegy. Un récit mêlant autobiographie et analyse sociologique sur l’Amérique de la classe ouvrière blanche délaissée, une thématique largement exploitée par Donald Trump pour son élection à la tête du pays en 2016.
A l’époque pourtant, J.D. Vance était loin de considérer Donald Trump comme l’homme providentiel tant attendu. Dans des messages privés rapportés par le média NBC News, celui-ci se serait demandé si Trump était davantage "un trou du cul cynique comme Nixon" ou bien le "Hitler américain".
Mais ça, c’était avant. Vance s’est officiellement lancé en politique aux élections sénatoriales en Ohio en 2022, où il a obtenu un soutien appuyé de Donald Trump. Depuis son élection au Sénat, il est un fervent soutien de l’ex-président américain, là où certains élus ont parfois cherché à prendre leurs distances avec lui. "L’âge de J.D Vance - il aura 40 ans en août - pourrait également être un atout dans une élection où les deux candidats les plus âgés de l’histoire des grands partis sont en lice", ajoute le Washington Post.
Néanmoins, son ferme attachement à l’idéologie trumpiste ne permettrait pas forcément à Donald Trump d’élargir son électorat aux indécis et aux indépendants, ce qui pourrait lui coûter sa place dans un éventuel ticket. "J.D. Vance est farouchement opposé à l’avortement, ce qui pourrait accroître les difficultés du parti sur cette question", rappelle également le New York Times, alors que les positions radicalement anti-IVG de certaines figures républicaines avaient coûté cher au Grand Old Party lors des élections de mi-mandat de 2022.
Doug Burgum, 67 ans, est gouverneur de l’Etat du Dakota du Nord depuis 2016. Figure relativement anonyme aux Etats-Unis, il s’était présenté à la primaire républicaine, avant d’être le premier à se retirer en décembre dernier et de soutenir la candidature de Donald Trump
Un argument loin d’être négligeable le fait ressortir du lot : sa richesse. Avant la politique, Doug Burgum avait fait fortune dans la technologie, en vendant notamment en 2001 une start-up de logiciels à Microsoft pour plus d’un milliard de dollars. Forbes estime ainsi son pécule personnel à plus de 100 millions de dollars. Il pourrait également être une figure rassurante au sein du milieu des affaires pour convaincre d’autres riches investisseurs du bien-fondé du soutien à Donald Trump. Un raisonnement qui pourrait convaincre le candidat républicain, alors que la bataille des dollars est inextricable d’une campagne présidentielle aux Etats-Unis.
Malgré son expérience de gouverneur depuis près de huit ans, son manque de stature politique au niveau national pourrait ainsi être autant être un avantage qu’un désavantage, selon le degré d’incarnation personnelle que Donald Trump souhaite pour les derniers mois de sa campagne présidentielle. Car une chose est sûre : Doug Burgum ne sera pas celui qui fera de l’ombre au sulfureux milliardaire.
Si les trois noms cités figurent parmi les grands favoris pour devenir le colistier de Donald Trump, d’autres figures des Républicains sont toujours en embuscade. Byron Donalds (45 ans), élu à la Chambre des représentants depuis 2021, est l’une des incarnations de la nouvelle génération pro-Trump au sein du parti. "Il est l’un des rares personnes noires à occuper un poste au sein des républicains et ajouterait de la diversité raciale au programme, à un moment où les républicains cherchent à détourner cet électorat du camp démocrate", souligne le New York Times, qui pointe néanmoins (comme d’autres) son manque d’expérience comme pouvant être un frein à ce choix.
Elise Stefanik, représentante dans l’Etat de New York depuis 2015, fait également partie des figures de son camp ayant prouvé leur loyauté à Donald Trump. Elle a pris une tout autre stature dans le camp conservateur lors de l’audition de trois présidentes d’université très prestigieuses (MIT, Harvard, Penn) sur l’antisémitisme à la suite de l’attaque terroriste du 7 octobre en Israël et les manifestations sur les campus américains, ayant conduit à la démission de deux d’entre elles. Agée de 40 ans, cette figure féminine pourrait être un avantage pour Donald Trump. Même si son profil de très ardente trumpiste ne permettrait pas forcément d’élargir l’électorat du candidat républicain.
Tom Cotton, vétéran de la guerre en Irak et sénateur de l’Arkansas depuis 2015, serait également un candidat susceptible de plaire à Donald Trump, et son nom revient très régulièrement ces dernières semaines dans la presse américaine. Comme celui de Tim Scott, le seul sénateur républicain noir, très apprécié dans son parti, même s’il ne figure pas parmi les soutiens les plus absolus à Donald Trump. Les chances de voir Nikki Haley, la dernière à s’être opposée à Donald Trump durant la primaire, devenir la colistière du candidat républicain, paraissent en revanche bien plus maigres. Mais la politique réserve toujours son lot de surprises.