C’est à partir du lundi 8 juillet que l’Arcom remet en jeu l’attribution de 15 fréquences de la télévision numérique terrestre (TNT). En tout, 24 candidats seront auditionnés jusqu’au milieu de la semaine prochaine par Roch-Olivier Maistre et ses équipes dans les bureaux du Quai André Citroën à Paris. Rappelons que les fréquences de la TNT ont le statut de domaine public et que leurs exploitants, qu’il s’agisse d’une émanation de l’État ou d’un opérateur privé, sont tenus à un cahier des charges bien précis, incluant notamment des obligations de tenue de l’antenne et de lutte contre les discriminations.
Certains des concurrents en lice sont des nouveaux venus dans le secteur de la télévision. Par exemple le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, qui ambitionne de lancer la chaîne Réels TV, ou l’éditeur du quotidien Ouest-France, porteur du projetOF TV. Mais la plupart sont des candidats à leur propre reconduction, tels que le groupe M6, qui va demander à continuer d’émettre les chaînes W9, Gulli et Paris Première, et qui a été le premier à passer son grand oral lundi matin (pour Gulli).
Mais celui qui risque le plus gros dans cette affaire n’est autre que l’homme d’affaires Vincent Bolloré. Son groupe Vivendi va présenter des dossiers de renouvellement pour rien moins que sept de ses filiales : Canal +, Canal + Sport, Canal+ Cinéma(s)), Planète +, CStar, C8 et CNews. Le 15 juillet, tous les regards se porteront en particulier vers cette dernière, dont le grand oral est prévu ce jour-là entre 9 heures et 10h30. Depuis des mois, d’innombrables journaux de gauche ou du centre accusent la chaîne d’information du groupe Canal d’être un vecteur de propagande pour l’extrême droite, quand bien même celle-ci respecte scrupuleusement les règles de pluralisme auxquelles elle est obligée.
À cela s’ajoutent les sanctions de l’Arcom. Dernier exemple en date, en mai dernier, CNews a été condamné à 50 000 euros d’amende pour des propos tenus à l’antenne par le directeur de rédaction du JDD, Geoffroy Lejeune, qui avait affirmé en septembre 2023, alors qu’il était invité dans l’émission de Pascal Praud (« L’Heure des pros 2 ») que l’antisémitisme et la surpopulation carcérale étaient des conséquences de « l’immigration arabo-musulmane »…
On le voit, CNews est dans le collimateur. Il y a deux mois, le rapporteur d’une commission parlementaire sur la TNT, le député insoumis Aurélien Saintoul, écrivait même dans son document de synthèse qu’il « ne comprendrait pas que les chaînes CNews et C8 puissent se voir en l’état renouveler leurs autorisations de diffusion ». On se souvient aussi qu’en mars 2023, Rima Abdul-Malak, alors ministre de la Culture, avait sur France Inter fustigé les « menaces » que ferait peser selon elle Vincent Bolloré sur la « liberté d’expression et de création ».
À l’heure où tant d’éditorialistes font preuve d’une éclatante partialité sur les autres ondes françaises, de BFM TV à TMC en passant par France Info, en appelant à « faire barrage contre le RN », le gendarme de l’audiovisuel sera-t-il sensible aux attaques des belles âmes contre CNews, dont certaines constituent de flagrantes violations du principe de séparation des pouvoirs ? Ou au contraire, préférera-t-il affirmer son indépendance et une préférence pour la variété des opinions et des angles dans le paysage audiovisuel français ? Réponse fin juillet.
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