Arrêter les automobilistes en pleine rue, le challenge ne fait pas peur à l’écologiste Amandine Dewaele. En campagne ce jour-là dans le quartier populaire des Chapélies, à l’est de Brive, elle va droit au but : " Bonjour. Je suis la candidate du Nouveau Front populaire, de toute la gauche. "
La formule suffit parfois à engager une conversation ou… à rendre tout dialogue impossible. " Quand je m’adresse à un électeur du RN, le visage se ferme, décrit la candidate. Je voudrais pourtant tellement leur montrer l’inanité du programme d’extrême-droite. Le réveil risque d’être douloureux si le RN arrive au pouvoir."
Une inquiétude que semblent partager les habitants des Chapélies, souvent d’origine étrangère. Amandine Dewaele cible les bureaux de vote où l’abstention a été forte le 9 juin 2024, pour les européennes.Amandine Dewaele en tractage.
Selon son équipe, c’est là que se trouve le potentiel de voix pour passer le premier tour. Hormis Meyssac, Saint-Pantaléon-de-Larche ou Voutezac, tous les autres sont à Brive.
Porte-à-porte, tractage à la sortie des écoles, dans la rue, il faut aller au contact et combattre les arguments des adversaires :
On dit que je ne suis pas d’ici. C’est un peu léger. J’habite en Corrèze depuis onze ans. Si le département gagne quelques habitants, c’est parce que des gens viennent s’installer ici.
En tractage, la candidate n’impose pas de thèmes : "C’est au feeling. Certains me parlent salaires, d’autres sécurité, d’autres encore n’ont pas de revendications particulières. Je réponds hausse du Smic, gratuité des cantines, moins de vidéosurveillance et plus de policiers de proximité."
Des thèmes qu’aborde aussi Frédérique Meunier, candidate de la droite et du centre droit, mais pour les déconstruire : "Rien n’est gratuit. Il faut toujours prendre de l’argent quelque part."
La députée sortante LR (non Ciotti) tracte, mais mène surtout une campagne qu’on pourrait qualifier de sénatrice, en multipliant les rencontres avec les élus locaux. "Ils viennent tous. Je veux avoir le ressenti des petites communes", explique l’élue.
La bataille est rude, même sans candidat macroniste : "Renverser la table, c’est facile, tout comme de dire : je suis contre. Être pour, c’est beaucoup plus compliqué." Frédérique Meunier, à la rencontre d'élus locaux à Noailles.
Ce travail en réseau, la députée l’a développé depuis plusieurs années. "C’est comme ça que j’identifie les problématiques à faire remonter à Paris. Notre force, elle est là ; entre Département, Agglo et ville de Brive, on s’entend tous bien."
" Qui défend vraiment la Corrèze ?", interroge faussement le tract de la candidate. "Prenez la ligne ferroviaire Paris-Toulouse. Je n’ai jamais vu Valéry Elophe (candidat RN, NDLR), pourtant élu régional, sur ce dossier."
À chaque réunion, Frédérique Meunier ressent chez les maires la sidération du 9 juin :
Le clivage droite-gauche a laissé la place au clivage entre extrêmes. Je les sens très inquiets. Ils ont peur d’être fragilisés et que le pays soit ingouvernable.
"La pression va jouer le 30 juin, prophétise un premier adjoint en périphérie de Brive. J’espère que les gens vont se ressaisir."
Eric Porte