Une tentative de coup d’État et des questions. Le général avait promis de «restaurer la démocratie», ses blindés enfonçant le 26 juin les portes du palais du gouvernement bolivien, avant de se retirer rapidement. En trois heures à peine, le général Juan José Zúñiga était démis de ses fonctions et présenté menotté devant les caméras de télévision.
Le président Arce a affronté le général putschistes dans le couloir du palais : «Je suis votre capitaine et je vous ordonne de retirer vos soldats, et je ne permettrai pas cette insubordination», a-t-il lancé.
Le président est ensuite apparu au balcon du palais présidentiel, la foule l’acclamant, semblant attester de l’absence de soutien populaire au général.
«J'ordonne à tous ceux qui sont mobilisés de rejoindre leurs unités », a déclaré le nouveau chef de l'armée, José Wilson Sánchez. L’armée a d’ailleurs immédiatement obéi sans broncher au nouveau commandement militaire. Le ministre Eduardo del Castillo a indiqué que l'ancien vice-amiral de la Marine, Juan Arnez Salvador, avait aussi été arrêté.
«Quel était l'objectif de ce groupe ? Son objectif était de renverser l'autorité démocratiquement élue», a déclaré del Castillo à la presse. Le gouvernement a tenu à rassurer la population, le ministre de la Défense Edmundo Novillo déclarant, cité par AP, que la situation était désormais totalement «sous contrôle», revendiquant avoir tenu en échec la tentative de coup d’État.
Toujours selon AP, cette menace de putsch serait intervenue après de vives tensions, durant des mois, entre le président Luis Arce et son ancien allié, l'ex-président de gauche Evo Morales (2006-2019), pour le contrôle du parti au pouvoir, le Mouvement pour le socialisme en Bolivie (MAS), alors que le pays fait face à de graves difficultés économiques.
Les alliés d'Evo Morales au Congrès ont constamment contrecarré les tentatives du gouvernement Arce de s'endetter pour alléger une partie de la pression, encore selon AP.
Le général Zúñiga a évoqué cette paralysie durant sa tentative de renversement, revendiquant «écouter le cri du peuple» et déclarant à la presse que l'armée était fatiguée des luttes intestines et cherchait à «restaurer la démocratie». «Regardez dans quelle situation nous nous trouvons, dans quelle crise ils nous ont laissés», a-t-il ajouté.
Le ministre de la Justice, Ivan Lima, a indiqué que les procureurs allaient requérir la peine maximale de 15 à 20 ans de prison contre Zúñiga «pour avoir attaqué la démocratie et la Constitution».
Les troubles politiques sont toutefois récurrents en Bolivie. En 2019, Evo Morales a été évincé de son poste de président à la suite d'une crise politique antérieure.
La question des raisons profondes reste ouverte. La rédactrice en chef de RT Margarita Simonian a quant à elle déclaré : «Cette fois, la révolution du lithium en Bolivie a été stoppée.» Avant de prévenir : «Mais il y aura d’autres tentatives.»
«À cet égard, pourquoi n’envoyons-nous pas des "gens polis" pour protéger la démocratie bolivienne et en même temps les réserves mondiales de lithium (sans lequel l’électronique est impossible) des pattes sanglantes et avides bien connues ?», a-t-elle ajouté, faisant référence aux militaires russes ayant sécurisé la Crimée en 2014 lors du coup d’État du Maïdan en Kiev, avant son rattachement de la péninsule à la Russie.
Et Margarita Simonian d’ajouter, pointant la main de Washington : «De plus, cet hiver, [la Russie a] convenu avec le gouvernement actuel d’exploiter conjointement ce lithium. Ce qui, apparemment, a provoqué le caractère ludique accru des pattes gourmandes.»
#Coïncidence–Tentative (raté) de coup d’Etat en Bolivie, quelques jours après l'annonce de l'exploitation des mines de lithium par la Russie
— Frédéric Aigouy (@frederic_RTfr) June 27, 2024
Le partenariat entre l'entreprise d'Etat Yacimientos de Litio Bolivianos et la société russe Uranium One «doit commencer à fonctionner en… pic.twitter.com/viqbMJYC9a
Un avis partagé par le journaliste Frédéric Aigouy, qui s’interroge sur une coïncidence. «Le partenariat entre l'entreprise d'État Yacimientos de Litio Bolivianos et la société russe Uranium One doit commencer à fonctionner en 2025», avait lancé le président Luis Arce, présent début juin au Forum économique de Saint-Pétersbourg. «La Bolivie, qui possède 23 millions de tonnes de réserves de lithium – les plus importantes de la planète – est candidate à l'adhésion au BRICS», a-t-il souligné.