"Je suis venue pour le Nouveau Front populaire, pour montrer que l'on est uni", explique Delphine Canadinhas, sa pancarte "Non à la vague facho" dans la main. Il est 11 heures, ce samedi 15 juin, et la foule, réunie place Piquand, à Montluçon, s'élance doucement dans les rues montluçonnaises. Pour cette professeure d'arts plastiques, accompagnée par sa fille, se mobiliser à deux semaines du premier tour des législatives n'a pas été une question.
Comme elles, ce sont ainsi près de 540 personnes selon les syndicats, un chiffre estimé entre 300 et 400 par les policiers présents, qui ont répondu à l'appel lancé par les représentants de l'intersyndicale (CFDT, CGT, FSU, Solidaires, Unsa) à manifester contre le Rassemblement National. Pour rappel, dans l'Allier, le parti conduit aux Européennes par Jordan Bardella était arrivé en tête dimanche 9 juin dans 311 des 317 communes, dont la cité montluçonnaise (33,69%).
Un Nouveau Front populaire qui unitCe Nouveau Front populaire ? "On a l'impression que ça va marcher", sourit Marie-Annick, en queue de cortège. Conflits, précarités, "quand on voit la misère que sont l'hôpital et l'école, il y a du boulot", soupire cette ancienne médecin du public.
Le cortège s'est élancé de la place Piquand pour rejoindre la place Jean-Jaurès. Quelques rangs plus loin, le discours est le même. "Ça fait longtemps que l'on attend ça [cette union], il y a beaucoup d'idées communes. C'est hyper-intéressant", assure Tao, 26 ans. Féminisme, écologie, pour cet ingénieur employé dans une société de construction de maison en bois isolé, cette manif, c'est aussi l'occasion de stopper "les idées du RN" et de remettre certains sujets sociaux sur la table. "On est pas si loin du faschisme en France", soupire un ami qui l'accompagne :
Voter RN ? "Ça devient cool"
Un manifestant
Une inquiétude partagée par d'autres. "La République est en danger", estime Jean-Christophe Robert, qui dénote dans la foule avec son drapeau tricolore. "Alors, quel meilleur moyen pour la défendre que de porter ce drapeau", explique ce discret monsieur, l'air grave. Pour cet ancien de la police judiciaire de Paris, ex-militant du PS, cette union, c'est un espoir :
"C'est la seule possibilité d'arriver au deuxième tour. Il faut montrer aux gens les plus hésitants qu'on est la solution".
Motiver les abstentionistesC'est qu'avec un taux de participation de 51,83 % aux Européennes, les abstentionnistes restent un vivier de potentiels électeurs et électrices qu'il faut encore convaincre pour les législatives. "Je sais que les gens peuvent être déçus de la politique, je les comprends, mais je pense que dans la vie, il y a ce que l'on ne veut pas et ce que l'on ne veut pas du tout", assure Julie, 19 ans, étudiante en première année de prépa littéraire au lycée Madame de Staël.
Pareil pour son amie Alice qui, jusqu'ici, ne mettait pas trop le nez dans la politique. "Voter, ça m'a impliquée", confie cette jeune femme qui a déposé pour la première fois un bulletin dans l'urne à l'occasion des Européennes. "C'est le moment où jamais." Et si les écologistes et Place publique avaient eu leurs voix aux dernières élections, aucune hésitation pour elles concernant ce premier tour des législatives.
Alice et Julie ont décidé de se mobiliser ce samedi 15 juin.
Les mobilisations se poursuiventPour faire "barrage au risque palpable de l'arrivée au pouvoir de l'extrême droite", les syndicats ont ainsi appelé à voter pour le "Nouvau Front populaire", comme l'explique Laurent Indrusiak, le secrétaire général de l'UD CGT de l'Allier.
Ils affirment aussi poursuivre leur mobilisation dans les prochaines semaines. Au programme : deux nouvelles manifestations qui auront lieu les jeudis 20 et 27 juin. La CGT distribura également près de 142.000 cartes postales contre la politique du RN dans les boîtes aux lettres des foyers du département.
Informations : Deux autres mobilisations auront lieu à Montluçon les jeudis 20 et 27 juin, à 18 heures. Départ place Piquand.
Camille Gagne Chabrol