Taxer les riches ? La question revient en boucle en France sur fond de déficit public et d’endettement abyssal. Mais qui sont-ils ? Éléments de réponse avec le troisième rapport de l’Observatoire des inégalités.
Pourquoi existe-t-il un seuil de pauvreté, mais pas un seuil de richesse ? Pour la troisième fois, depuis 2020, l’Observatoire des inégalités, structure indépendante basée à Tours, s’empare du sujet, considérant que « connaître le haut de la pyramide des revenus est tout aussi important que d’en décrire le bas ». L’objectif de son rapport bisannuel, financé par des deniers citoyens, est « d’installer le débat, chiffres sur la table », autour d’une question centrale : « Qui doit faire l’effort de solidarité en France ? »
Comment le seuil est-il fixé ? L’observatoire, qui travaille en lien étroit avec l’Université de Tours, a décidé de fixer le seuil de richesse au double du niveau de vie médian. Selon les données Insee de 2021, ce revenu associé à la classe moyenne est de 1.930 euros par mois après impôts et prestations sociales pour une personne seule. Le seuil de richesse vaudrait donc 3.860 euros pour une personne seule, 5.790 euros pour un couple et 9.650 euros pour une famille avec deux adolescents.
Même si cette méthode est utilisée par l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) et le gouvernement allemand, le président de l’observatoire, Louis Maurin, reconnaît qu’elle peut paraître arbitraire. Mais le seuil sert de base et permet de suivre l’évolution d’une année sur l’autre. En 2021, selon ce calcul, la France comptait donc 4,7 millions de riches, soit 7,4 % de la population contre 8,9 % en 2011, ce qui représente 800.000 personnes en moins en dix ans.
Qui sont les ultra-riches ? Le poids des 500 plus grandes fortunes professionnelles a pratiquement décuplé en 20 ans. Selon le magazine Challenge, elles représentaient 124 milliards d’euros en 2003 et atteignent un montant total de 1.170 milliards d’euros en 2023. Les millionnaires représentent 5 % des ménages français. Le 1 % du sommet possède au moins 2,2 millions d’euros par ménage. Quant à la famille de Bernard Arnault, à la tête du groupe de luxe LVMH, ses 203 milliards d’euros correspondent à la valeur de l’ensemble des logements de Marseille et de Nantes, selon les estimations de l’observatoire.
Plus généralement, 16,9 % des ménages disposent de plus de trois fois le patrimoine médian (hors endettement), c’est-à-dire plus de 531.000 euros. Les 10 % les plus fortunés possèdent plus de 716.300 euros selon l’Insee en 2021.
Quel est le profil du riche ? C’est un homme, deux fois mieux rémunéré qu’une femme chez les 10 % les mieux payés, et jusqu’à cinq fois plus chez les plus hauts salaires (1 %). Il est cadre, du public ou du privé, ou occupe une profession libérale. Et, sans surprise, il est âgé : la proportion de riches passe de 1 % des ménages avant 30 ans à 10 % parmi les 55-59 ans et atteint un sommet à 15 % entre 60 et 64 ans, souligne le rapport.
Le logement, indicateur de richesse. Être riche permet tout d’abord d’être propriétaire de son logement, confirme l’Observatoire des inégalités. Selon les calculs de Vivien Charbonnet, de l’Université de Tours, 87 % des ménages riches sont dans ce cas, contre 58 % des autres ménages. « Partout où ils vivent, les ménages riches ont un logement plus grand que leurs voisins. Que ce soit dans l’agglomération parisienne, dans une grande ville de province ou à la campagne, un ménage riche dispose en moyenne d’environ 50 % de surface en plus que les autres ménages », indique le rapport. Les biens immobiliers des riches ne se limitent pas à leur résidence principale. Près des deux tiers d’entre eux possèdent un autre bien, contre seulement 22 % des autres ménages, ajoute l’Observatoire des inégalités.
Où vivent les grandes fortunes ? À Paris, il faut, pour une personne seule, gagner 12.400 euros par mois après impôts pour habiter dans le 7e arrondissement et près de 22.000 euros au pied de la tour Eiffel, renseigne Le Rapport sur les riches en France. En Haute-Savoie, le seuil d’entrée dans les 10 % les plus riches est de 5.000 euros (6.000 euros à Paris). Veyrier-du-Lac, commune limitrophe d’Annecy, est en tête du classement des petites villes les plus riches établi par l’Observatoire des inégalités avec plus de 10.000 euros par mois pour 10 % de ses habitants.
Le Rapport sur les riches en France est en vente sur le site de l’Observatoire des inégalités au prix de 12 euros.
