La grève perlée engagée, depuis le 5 mai, par des agents de la piscine de Brive, en Corrèze, s'est invitée au conseil municipal, au détour d'une délibération sur la création de deux emplois de maîtres-nageurs, ce mercredi matin 22 mai.
"Qui, autour de la table, voudrait travailler le dimanche et les jours fériés pour 0,74 euro de l'heure ?", a ainsi interrogé Martine Contie (PCF), alors qu'elle demandait au maire où en est ce conflit social.
"Leur revendication d'une revalorisation de leur prime me semble juste", a poursuivi la conseillère municipale d'opposition. "À ma connaissance, ces agents n'ont jamais voulu rompre le dialogue, pourtant les réponses tardent à venir et cela donne l'impression qu'on essaye par tous les moyens de casser le mouvement de grève."
Demande "légitime", grève "absurde""Cette grève, c'est la plus absurde de l'histoire de notre collectivité et je pèse mes mots", a commencé par répondre Frédéric Soulier. Car, pour le maire, qui n'avait pas encore évoqué le sujet publiquement, "elle n'aurait jamais dû commencer" dans la mesure où la collectivité a dit d'emblée qu'elle jugeait "légitime" la demande des agents.
C'était le 26 avril, lors d'une rencontre avec le directeur général des services (DGS), François Hitier, trois jours après le dépôt du préavis de grève des agents. À l'issue, une réunion avait été calée pour le 23 mai pour avancer sur le dossier. "Le temps, pour nos services, d'une étude sérieuse pour réexaminer cette prime. Car cela ne concerne pas que nos agents de la piscine, il faut en mesurer les conséquences à l'échelle de la collectivité, a souligné Frédéric Soulier, qui en fait une question de "cohérence" et "d'équité".
Dans ces conditions, l'élu dit n'avoir pas compris le mouvement qui a suivi :
"On aurait dit, il n'y aura rien. Circulez, y rien à voir. J'aurais compris que l'intention d'une grève se manifeste. Mais, il n'a jamais été question de cette posture. C'est pour ça que je parle d'absurdité [...]. Sur la forme, ce mouvement est absurde, car on ne s'est mis en travers de rien. Je le redis, cette demande est légitime. Je ne sais pas qui parle mal ou entend mal, mais c'est clair"
L'appel à la reprise des discussionsPour Frédéric Soulier, il est donc "grand temps que tous ceux qui revendiquent viennent autour de la table" car "cette grève perlée ne satisfait personne. Je la respecte, mais je n'accepte pas que le service soit interrompu".
Et le maire de poursuivre : "Donnez-nous l'occasion de dire comment les choses vont se passer et je m'engage à ce qu'au bout, ce ne soit pas une discussion improductive. Je fais cette demande solennelle aux agents de revenir dans une simple discussion qui aurait dû avoir lieu depuis un mois. Ce bras de fer n'a pas lieu d'être."
Les conditions du dialogue pour le maireAlors qu'une telle rencontre était initialement prévue ce jeudi 23 mai, elle n'aura finalement pas lieu tout de suite. Mettant en avant le temps perdu du fait du mouvement, Frédéric Soulier s'est engagé à ce qu'elle se tienne désormais "dans un délai maximum de trois semaines".
Il a cependant posé deux conditions. D'une part, que le sujet soit examiné par le CST (comité social territorial) du 13 juin, avec les représentants du personnel. D'autre part, "que cette grève perlée cesse".
"Si je comprends bien, il faut qu'ils arrêtent la grève pour discuter. Ce n'est pas gagné...", a glissé Martine Contie, regrettant "l'impression d'une incompréhension totale" de part et d'autre.
Dans le cas d'une reprise du dialogue, dans les conditions énoncées, le maire a avancé la date du 3 juillet et du prochain conseil municipal pour caler le vote de cette nouvelle prime.
La réaction des agents grévistesDu côté des agents, qui ont une nouvelle fois organisé une grève surprise samedi matin 18 mai, la prise de parole du maire a bien été entendue. "Ils ont pris note. Ils veulent se laisser un moment de réflexion", indique Chris Khider, le secrétaire adjoint CGT à la ville de Brive.
"Il ne faut pas oublier que cette grève ne sortait pas de nulle part, mais d'une vraie urgence, poursuit le représentant syndical. Les agents concernés ont d'ailleurs été très étonnés de la chronologie du maire, car des demandes avaient déjà été faites bien avant le préavis du 23 avril et elles étaient restées sans réponse. C'est pour cela que les agents ont fait cette grève. Quand le maire parle de 'confiance', c'est tout ce qu'ils demandent. Ça fait même longtemps qu'ils attendent."
Au-delà, bien sûr, ils attendent surtout de connaître le montant de leur nouvelle prime. "Et ils espèrent bien qu'elle sera à la hauteur", prévient Chris Khider.
La prime actuelle. La prime de sujétion perçue par les agents de la piscine pour travailler les dimanche et jours fériés a été instaurée en 2016, à Brive. "Cette indemnité horaire découle d'un arrêté ministériel de 1992, ce n'est donc pas nous qui l'avons inventé. Elle s'élève à 240 euros par an pour un agent qui travaille un dimanche sur quatre, à 360 euros pour un agent qui travaille un dimanche sur trois, et à 480 euros pour un agent qui travaille un dimanche sur deux", a détaillé le maire, sans se priver d'ajouter que Brive "est la seule collectivité où ça existe en Corrèze".
Michaël Nicolas