Au téléphone, on devine des battants. Une énergie et une volonté à même de faire "bouger les lignes" pour leur enfant et tous les autres. Sandrine et Eric sont les parents d’Oreline (1), une ado de 14 ans atteinte de nystagmus, une maladie congénitale qui se traduit par des va-et-vient incessants de ses yeux, de gauche à droite.
Troubles du langage écritCe handicap, reconnu administrativement, entraîne chez elle des troubles de l’expression écrite qui l’empêche de retenir l’orthographe des mots. Malgré tout, la jeune Puydômoise, grâce à l’investissement de ses parents et à l’écoute du corps enseignements, peut suivre une scolarité normale, en milieu ordinaire.Équipée d’outils spécifiques afin de palier ses difficultés, dotée elle aussi d’une belle force d’âme pour rester dans la course, l’adolescente est même devenue une bonne élève. Mais l’inclusion reste un âpre et long combat.
Comme des milliers de collégiens, Oreline doit passer le brevet en juillet prochain. L’Éducation nationale prévoit bien sûr des aménagements pour permettre aux élèves en situation de handicap de participer aux épreuves.À ce titre, Sandrine et Éric, compte tenu du handicap de leur fille, ont demandé à ce qu’elle soit notamment dispensée de dictée. Refus du rectorat, qui leur a proposé de remplacer l’épreuve par un texte à trous."Oreline n’a aucune difficulté cognitive mais elle ne peut pas écrire sans faute", protestent les parents. "Avec cette épreuve, c’est comme si on imposait la course à pied à un enfant en fauteuil roulant ! C’est la punir à cause de la forme alors que le fond est bon."
L'affaire devant le justice administrativeLe couple par l’intermédiaire de leur avocat, a déposé une requête en référé suspension, devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand. Ils entendent contester la décision concernant la dictée mais aussi celle interdisant Oreline d’activer internet dans l’utilisation de ses outils numériques, ce qui les rend inutiles (2). "Le rectorat applique un arrêté ministériel qui prévoit des dispenses pour certaines matières mais pas pour la dictée", précise l’avocat. Pour lui, cette absence d’exemption contrevient à ce que recherche la loi, à savoir l’égalité des chances.
La collégienne a tout de même obtenu la non prise en compte de l’orthographe dans toutes ses épreuves. Un compromis, selon Sandrine et Eric, en contradiction avec le refus de l’exonérer de dictée mais qui constitue déjà pour eux une « petite victoire »."Nous sommes les premiers à obtenir cette mesure. Il nous reste un seul gros verrou, celui de la dictée, à faire sauter." Un combat qui va au-delà du seul cas de leur fille. "Si on gagne, cela servira à des centaines d’autres enfants", espèrent-ils. Le tribunal examinera le dossier vendredi.
(1) Prénoms modifiés(2) Le rectorat n’a pas souhaité faire de commentaire sur une procédure en cours
Olivier Choruszko