Trois jours après l'incident ayant entraîné la blessure par balle du chanteur Kendji Girac, le procureur de la République de Mont-de-Marsan, Olivier Janson, a tenu une conférence de presse, ce jeudi 25 avril. Une prise de parole visant à faire part des avancées sur l'enquête tout en évitant "la propagation de rumeurs".
Le tir "provoqué volontairement"Le tir de la balle a été "provoqué volontairement" par le chanteur lui-même, a affirmé le procureur. Le chanteur avait assuré lundi que l'accident était "un tir accidentel", version qu'il avait maintenu dans un premier temps mercredi 24 avril, lors de son audition par les enquêteurs. Il avait évoqué une mauvaise manipulation de l'arme à feu acquise la veille lors d'une brocante.
Cette version du tir accidentel a été jugée impossible par le parquet. L'arme, identifiée comme étant un pistolet semi-automatique de modèle 1911, nécessite en effet une "mise en fonctionnement". "Un coup ne peut pas partir tout seul", a expliqué le procureur, car "il faut appuyer sur la détente de l'arme." De plus, Kendji Girac, qui a participé à un stage avec le RAID en 2019, "connaît manifestement le fonctionnement de l'arme".
Suicide simulé suite à une dispute conjugaleKendji Girac a finalement avoué mercredi 24 avril son intention de "simuler un suicide" afin de "faire peur" à sa femme, qui menaçait de le quitter. Selon les dires de sa compagne Soraya, rapportés par le procureur, le chanteur était "ivre" le soir du drame. Sa compagne lui aurait reproché de faire du bruit et d'empêcher leur fille de dormir. Elle a expliqué avoir appelé son beau-père pour tenter de raisonner le chanteur.
Vers 3 heures du matin, Kendji serait revenu dans la caravane, en caleçon, en état d'ébriété, poursuit le procureur. La fille du couple, réveillée plusieurs fois par son père, était en larmes. Soraya, en colère, aurait alors demandé à son compagnon de partir. Elle aurait ensuite entendu un coup de feu, alors qu'elle était dans une autre partie de la caravane. C'est là qu'elle a découvert Kendji grièvement blessé.
"Quand j'ai vu qu'elle allait partir, j'ai eu peur", a expliqué le jeune homme de 27 ans, évoquant une "impulsion". Kendji Girac a avoué avoir acheté son arme pour 500 euros, le 18 avril dernier, à un homme — non identifié à ce stade de l'enquête — en visite dans le camp. Il ignorait toutefois que l'arme était chargée au moment du drame.
Le tabou du suicide chez les gens du voyageLe parquet, qui confirme que Kendji Girac avait 2,5 grammes d'alcool par litre de sang dimanche soir, a estimé que le chanteur présente une "addiction à l'alcool". Il prend régulièrement "des cuites", d'après le récit de sa compagne, et se drogue en prenant de la cocaïne "une à deux fois par semaine", a précisé le procureur. Le chanteur aurait avoué aux enquêteurs être "fatigué" et "un peu perdu moralement". Selon sa compagne, il avait déjà évoqué l'envie de mettre fin à ses jours dans le cadre de disputes conjugales.
Kendji Girac est désormais hors de danger, mais "fatigué" du fait de ses blessures. Son état devrait nécessiter des soins "pendant plusieurs mois", précise le procureur. "Sa version lui appartient et doit être mise en rapport avec le tabou de la question du suicide chez les gens du voyage", juge le parquet. "Chez les gitans, on ne se suicide pas", aurait indiqué le chanteur lors de son audition. De fait, l'enquête n'a pas été facilitée par "une forme d'omerta" régnant dans le camp des gens du voyage, a expliqué le procureur. Les gendarmes ont ainsi été invités "à ne pas rester sur place", et les pompiers ont reçu un "accueil rugueux". L'enquêteur de la brigade des recherches a quant à lui dû faire face au silence des personnes sur place, qui ont refusé de décliner leur identité.
Marie-Ange Costantini