Parce qu’ils militent pour le retour des trains de voyageurs sur la ligne Clermont-Ferrand/Le Mont-Dore, des citoyens organisent une action d’envergure, le 21 octobre : ils vont remettre en service un train entre Clermont et le Sancy.
Le temps s’est figé. Sur les quais de la gare de Vauriat, sur la commune de Saint-Ours-les-Roches, les aiguilles de l’horloge n’avancent plus. Il est, éternellement, 6?h?25. Sous un abri, deux panneaux indiquent encore les directions de Laqueuille et Clermont-Ferrand, mais cela fait huit ans que les voyageurs tournent le dos aux rails : désormais, sans en avoir le choix, ils patientent sur le parking de l’ancienne gare avant de grimper dans l’un des bus mis en place depuis la fermeture de la ligne ferroviaire aux voyageurs, en novembre 2015. Direction Volvic, ou Pontgibaud.
Uniquement du fretLa situation est du même acabit dans les autres gares qui parsèment cette ligne qui reliait à la fin du 19e siècle Paris au Mont-Dore ; elle était aussi partiellement utilisée jusqu’en 2014 pour rejoindre Clermont et Ussel (Corrèze). Désormais, elle n’est dédiée qu’au fret et encore, ce n’est qu’une goutte d’eau, puisque seule la société d’embouteillage des Sources du Mont-Dore en Auvergne (SMDA) l’utilise.
Cette dernière activité fut même menacée, en 2020, en raison d’un besoin de travaux urgents, donnant naissance à une mobilisation citoyenne. "Lorsque la SNCF a voulu mettre fin au fret, on s’est dit que ce n’était pas possible de fermer la ligne alors qu’elle avait été refaite presque à neuf, jusqu’à Laqueuille, en 2015 ! On ne comprenait pas, déjà, qu’ils ferment la ligne aux voyageurs quelques mois après tous ces travaux", raconte Christian Roy, riverain de la gare du Vauriat.
Après deux ans de réflexion, ces habitants se sont structurés au printemps dernier en association, "Retour du train des volcans", pour donner du poids à leur demande : la remise en service d’un service de transport ferroviaire de voyageurs entre Volvic, actuel terminus du train parti de Clermont-Ferrand, et le Sancy. "Au-delà de l’impact environnemental, c’est la seule manière de désenclaver l’ouest de Clermont-Ferrand et de désengorger le trafic routier", considèrent Nicolas Roy et Pierre Robert, membres actifs de l’association, qui poursuivent :
"Ce serait aussi une bonne solution pour les étudiants puisque la ligne passe près de l’université à Clermont. Et il y a l’aspect touristique vert, blanc ou thermal, pour monter au Sancy ou ne serait-ce qu’au puy de Dôme ou à Vulcania, qui ne sont qu’à quelques kilomètres des gares de Volvic et de Saint-Ours. Quand on voit que l’été, le train est plein à craquer jusqu’à Volvic, on se dit qu’il y a un potentiel?!"
Les futurs trains légers innovants espérés ?Les bus mis en place depuis la fermeture de la ligne ? "Ils sont trop petits, pas adaptés au transport de vélo, moins nombreux que les trains et il faut faire plusieurs changements pour aller jusqu’à Clermont", déplorent-ils, pas convaincus et surtout persuadés que l’enjeu financier, souvent bloquant dans la relance des petites lignes ferroviaires, est ici largement surmontable : "La ligne a été presque entièrement rénovée (seule la partie entre La Bourboule et le Mont-Dore est fermée, NDLR), il faudrait 3 à 4 millions d’euros pour reprendre la signalisation et créer des points d’arrêt, sans rénover les gares, ce qui n’est pas utile. C’est un budget à mettre en perspective avec ce que coûte l’entretien des routes..."
S’ils estiment que "la balle est dans le camp de la Région", ils notent aussi avec malice : "La SNCF va développer un train léger innovant, ce serait idéal pour cette ligne. Surtout qu’ils ont communiqué sur ces nouveaux trains en l’imaginant, sur une photo, en gare de Volvic… On espère que c’est un message."
Retour sur la ligne le 21 octobreEn attendant, pour défendre leur cause, "pour rappeler au grand public que cette ligne a existé, pour montrer sa beauté et son potentiel touristique", l’association organise un événement atypique, samedi 21 octobre : ils proposent à 150 personnes de grimper à bord du X2900, surnommé "le bleu d’Auvergne", et de deux X2200, mis à disposition par l’association AAATV de Montluçon, pour un trajet Clermont-Ferrand/La Bourboule. Une manière de remonter le temps, tout en imaginant l’avenir.
Réservation. Il reste une cinquantaine de places pour l’aller-retour Clermont-Ferrand/La Bourboule. Départ le 21 octobre à 8 h 46 à Clermont-Ferrand, pour une arrivée à 11 h 27 à la Bourboule, après des arrêts à Volvic, Le Vauriat, Pontgibaud et Laqueuille. Retour l’après-midi, départ à 14 h 30 de La Bourboule, arrivée à 16 h 50 à Clermont-Ferrand. Tarif : 40 € aller-retour (le prix couvre la location du train et de la ligne). Informations et réservations sur le site de l'association Retour du train des volcans.
Que disent la Région et SNCF Réseau ?"Notre combat, pour l’instant, avant de rouvrir des lignes ferroviaires, c’est de sauver celles qui existent déjà, ce qui n’est pas gagné", répond Frédéric Aguilera, vice-président de la Région en charge des transports, alors que les discussions autour du futur Contrat de plan Etat-Région (CPER), qui doit allouer un certain nombre de crédits pour les lignes ferroviaires, sont en cours. "S’il y a une possibilité de rouvrir cette ligne un jour, pourquoi pas. Mais ce n’est pas d’actualité, et il n’y a aucune étude en ce sens. Il faut aussi prendre en compte que le fret reste menacé : l’argent mis en 2020 sur cette ligne, c’était des rustines."Ce que confirme SNCF Réseau : "La ligne a fait l’objet de travaux et nécessite régulièrement des investissements pour la régénération qui s’inscrivent dans les discussions autour du CPER", dit l’entreprise, qui assure ne pas avoir chiffré le coût d’une éventuelle réouverture de la ligne aux voyageurs. "SNCF Réseau réalise des études de réouverture au trafic voyageur à la demande de la Région Auvergne-Rhône-Alpes. A ce jour, SNCF Réseau n'a reçu aucune demande."
Arthur Cesbron