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Soupçons d’agressions sexuelles, omerta et guerre des clans : enquête sur l’affaire Jérôme Pernoo

Soupçons d’agressions sexuelles, omerta et guerre des clans : enquête sur l’affaire Jérôme Pernoo

En mars 2021, la directrice du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, Emilie Delorme, reçoit deux signalements de faits pouvant s’apparenter à des actes de violences sexuelles. Ils mettent en cause le professeur de violoncelle Jérôme Pernoo - qui a, depuis, toujours contesté les faits qui lui sont reprochés.

Confiée par le Conservatoire au cabinet Egaé, spécialisé dans la prévention des violences sexuelles, sous l’égide de la militante féministe Caroline De Haas (en binôme avec Christophe Pillon, chef du service RH du Conservatoire), une enquête interne débute, censée éteindre l’incendie. Loin de faire la lumière sur cette affaire, elle a, au contraire, marqué le début d’une lutte de clans acharnée. D’un côté, les "pro-Pernoo", vent debout contre les méthodes de la féministe et du Conservatoire, qu’ils jugent partiales, et contre les multiples suspensions-réintégrations dont le professeur a fait l’objet tout au long de la procédure. De l’autre, les "pro-Delorme", qui continuent à croire les victimes présumées, malgré des articles à charge et les amalgames dont celles-ci ont pu pâtir - amalgames consistant à considérer que si la méthode du rapport De Haas est biaisée, les témoignages le seraient aussi. Et au milieu, quelques voix rendues inaudibles par ce que certains qualifient de véritable "guerre de tranchées" idéologique entre ceux qui "croient les victimes" et ceux qui dénoncent des "chasses aux sorcières".

Jérôme Pernoo a comparu devant le tribunal judiciaire de Paris, vendredi 26 mai, pour "agressions sexuelles", dont certaines sur mineur de 15 ans, et "harcèlement sexuel". Les quatre plaignants sont tous des anciens élèves. Contactée, la défense du violoncelliste déclare que "M. Pernoo dément fermement l’ensemble des accusations", et a plaidé la relaxe de l’ensemble des poursuites. Le parquet requiert deux ans d’emprisonnement dont un an de sursis probatoire, une obligation de soins, l’indemnisation des parties civiles et l’interdiction d’exercer. Le délibéré sera rendu le 26 septembre.

Pour son enquête, L’Express a notamment sollicité des membres du Conservatoire, des professionnels de la musique classique, des élèves du professeur et a pu consulter deux documents internes relatifs à l’affaire : des procès-verbaux de commissions consultatives paritaires (une procédure disciplinaire spécifique aux établissements publics qui rend un avis concernant les personnels contractuels) s’appuyant sur les enquêtes internes menées par le Conservatoire et sur le rapport disciplinaire de la direction.

En creux, se dessine un milieu en décalage avec les évolutions sociales, démesurément exigeant et en proie à une culture du secret concernant de possibles cas de harcèlement ou agressions sexuelles. Entre omerta et militantisme, l’affaire Pernoo a pâti des travers d’une époque qui s’achève, et de ceux d’une autre qui débute. Récit.

Procédure éclair

Nous sommes le 16 mars 2021. Jérôme Pernoo vient d’être informé qu’il est accusé de faits pouvant s’apparenter à des actes de violences sexuelles par la directrice du Conservatoire, Emilie Delorme. Il est suspendu de ses fonctions et une enquête interne confiée au cabinet Egaé est diligentée, tandis que les faits ont été signalés par la direction au procureur de la République. "Tout à coup l’impression que sa vie s’arrête", décrira-t-il lors de son audition trois mois plus tard, en commission consultative paritaire.

Sur le papier, la méthodologie de l’enquête menée par Caroline De Haas s’annonce irréprochable : "contradictoire, rigoureuse, diligente et impartiale, visant à déterminer si les faits signalés sont établis et si le comportement de l’enseignant expose les étudiants à un danger". Dans ce cadre, 51 personnes seront entendues entre le 19 mars et le 20 avril.

Un rapport disciplinaire s’appuyant sur les résultats de l’enquête et signé par Emilie Delorme, dont L’Express a pu prendre connaissance, pointe des "témoignages graves" faisant état de violences "psychologiques" et "sexuelles" commises par le professeur, qui se seraient déroulées sur douze ans (de 2002 à 2014). "Jérôme Pernoo semble également avoir tenu des propos sexuels répétés ou eu un comportement à connotation sexuelle avec des élèves femmes", est-il écrit. "Plusieurs jeunes hommes, parfois mineurs, témoignent de comportements à connotation sexuelle qui les ont heurtés. Certains de ces comportements pourraient être qualifiés d’agressions sexuelles aggravées."

Je crois qu'il se frottait à moi, je ne me souviens pas bien

Au total, est-il détaillé, trois personnes mineures au moment des faits se disent victimes d’attouchements par personne ayant autorité, deux de faits qui pourraient s’apparenter à du harcèlement sexuel, cinq d’agissements qui pourraient s’apparenter à une agression sexuelle par personne ayant autorité - une d’entre elles aurait été mineure au moment des faits rapportés.

Parmi les propos recueillis par Caroline De Haas et Christophe Pillon, trois témoins relatent, selon le rapport, des contacts physiques inappropriés alors qu’ils avaient entre 14 et 15 ans. Pour le premier, il s’agit de "massages sur les épaules et le dos, à même la peau". Pour le second, de "contacts sexuels", "par-dessus le pyjama". Enfin, le dernier témoigne du fait qu’après avoir été "embrassé par surprise", il aurait été invité par Jérôme Pernoo à passer la nuit dans sa chambre, ce dernier lui demandant s’il voulait "jouer". "Je ne sais pas exactement ce qu’il a fait, je n’étais pas très présent. Je crois qu’il se frottait à moi, je ne me souviens pas bien", précise l’une de ces personnes.

Jérôme Pernoo est finalement entendu en commission consultative paritaire en juin 2021 (il l’avait déjà été lors de l’enquête interne). Avis de l’assemblée : favorable à un licenciement sans préavis ni indemnité. Commence alors un ballet technique et juridique au cours duquel le Conservatoire choisit de ne pas suivre l’avis de la CCP et de réduire la sanction à une exclusion temporaire d’un an sans traitement (sans salaire), le camp Pernoo dénonçant quelques jours plus tard une sanction "inique et absurde"…

La méthode De Haas

Des oublis, des raccourcis, des questions qui n’apparaissent pas… Après leur audition, les témoins ont reçu un compte rendu écrit de leur témoignage qui, comme le veut la méthodologie, peut être amendé ou corrigé par leurs soins avant d’être retourné signé. Seulement voilà : certains ont enregistré les entretiens et en ont fait une retranscription intégrale. L’accompagnatrice de Jérôme Pernoo, Karine Sélo, remarque par exemple que 21 réponses à décharge pour le professeur n’ont pas été retranscrites dans son compte rendu.

Comme elle, d’autres témoins notent des différences entre leur version et celle qui leur a été soumise. "Elle m’a demandé si j’étais déjà allé chez Jérôme Pernoo, détaille Maka*, un élève du professeur, auprès de L’Express. J’ai répondu “oui, nous dînons parfois avec d’autres amis”. Mais elle a enlevé la mention “avec d’autres amis”. Tout se passait comme si elle voulait absolument trouver un problème, bien que je n’aie rien à reprocher à Jérôme Pernoo". Et puis il y a ces questions qui disparaissent. "Est-ce que vous diriez que c’est votre père ?", demande-t-elle à certains. Une fois retranscrite, la réponse est pourtant formulée sur le mode déclaratif (il est comme "un père"). Le rapport disciplinaire fait ainsi état, s’appuyant sur les résultats de l’enquête, du fait que "Jérôme Pernoo semble entretenir délibérément le flou entre la posture d’enseignant et celle de mentor, d’ami voire de figure paternelle de substitution".

Je vais essayer d'aller corroborer les faits qui vous sont reprochés

Sans compter cet art d’entretenir le mystère, que décrivent certains témoins. Parfois, Caroline De Haas parle de "harcèlement", d’"exhibition", d’"agression", de "tentative de viol", de "viol". Ou même, comme lors d’une réunion le 9 avril 2021 rassemblant également Emilie Delorme et la classe de Jérôme Pernoo, de "meurtre". "Elle laissait planer le doute sur ce que Jérôme avait pu faire ou non, comme pour nous influencer, car nous ne savions pas quelle était la teneur des signalements qui avaient été faits", se souvient Maka*.

"Cette enquête est partiale", argumentera l’avocate de Jérôme Pernoo, Me Chirine Heydari, lors de la commission consultative paritaire du 21 juin. Elle rapporte un entretien de Jérôme Pernoo avec Caroline De Haas, au cours duquel le premier demandait s’il pouvait faire citer des témoins. "Que les gens ne soient pas surpris du résultat. S’ils passent une demi-heure en entretien à raconter tout ce que vous faites de super en tant qu’enseignant, je vais assez vite les couper, aurait répondu la seconde. Je n’enquête pas sur tout ce que vous avez fait de super en tant qu’enseignant ou qu’être humain. Je vais essayer d’aller corroborer les faits qui vous sont reprochés." Il est loin, le vœu de "déterminer si les faits signalés sont établis et si le comportement de l’enseignant expose les étudiants à un danger". Contactée par L’Express, Caroline De Haas n’a pas souhaité s’exprimer.

Manque d’impartialité

Pour le Conservatoire, les choses se sont gâtées à partir de la décision du tribunal administratif, saisi en référé. Le 7 décembre 2021, celui-ci suspend la décision disciplinaire d’exclusion du professeur et constate le caractère "disproportionné" de la sanction. Ce dont la défense de Jérôme Pernoo se félicite dans un communiqué, spécifiant qu'"il a été relevé qu’étaient sérieuses les critiques tirées du manque d’impartialité de l’enquête administrative qui avait été menée par Caroline De Haas et sa société Egaé".

La défense omet toutefois de préciser que, selon ce même tribunal, "l’utilisation par le requérant de propos inadaptés même pour un enseignement artistique supérieur, ainsi qu’une attitude inappropriée dans le cadre de l’enseignement qu’il délivre peuvent être regardées comme établis. Si de nombreux élèves ont fait part de ce que ces comportements ne les incommodaient pas et ont fait l’éloge de ses techniques d’enseignement, ces faits, s’agissant d’un professeur de l’enseignement supérieur […] constituent des fautes qui sont de nature, à eux seuls, à justifier le prononcé d’une sanction"… Tout comme le camp Pernoo ne détaille pas pour quelles raisons la sanction apparaît "disproportionnée". Il y a certes "la nature des fautes commises", le fait que "Jérôme Pernoo n’a jamais fait l’objet de signalements ni de sanctions disciplinaires depuis son recrutement", mais aussi "l’ancienneté de certains faits, dont certains remontent aux années 2002 à 2016". Reste qu’aux yeux d’une partie de l’opinion, le camp Pernoo a gagné une bataille, grâce au concours de la méthode De Haas…

Guerre des clans

Ce sont des regards furtifs dans les couloirs du Conservatoire, des questions qui n’ont l’air de rien – "tu en penses quoi toi ?". Et puis des mots-clefs qui mettent la puce à l’oreille : "Delorme", "wokisme", "militante", "affaire Télérama", "Egaé". Le fiasco De Haas fait désormais office de ligne de front opposant les pro- aux anti-Pernoo. La décision du tribunal administratif n’ayant fait que renforcer les premiers dans leur combat, et les seconds dans leur sentiment d’injustice.

L’heure n’est plus à la compréhension des faits, mais à la prise de position. D’un côté, le pianiste Jérôme Ducros, compagnon de Jérôme Pernoo, inonde Twitter de publications au vitriol chroniquant les évolutions de l’affaire, non sans fustiger la partie adverse - à commencer par Emilie Delorme et Caroline De Haas. Cité par Mediapart, l’ancien élève de Jérôme Pernoo, Bruno Philippe, explique de son côté en juin 2021 avoir "la désagréable impression et quasi-certitude que l’on cherche à traîner [Jérôme Pernoo] dans la boue. Les signalements à son encontre me semblent surtout être des témoignages malveillants en vue de le détruire professionnellement et socialement. J’espère sincèrement, au vu de ce qu’il s’est passé avec l’affaire Télérama, avec un jugement récent innocentant la personne incriminée il y a quelques années, que Jérôme Pernoo ne subira pas le même sort, qu’il sera blanchi et que les gens qui l’ont calomnié se sentiront bien bêtes". En décembre, une lettre signée par les parents des étudiants de la classe du professeur est même adressée à Roselyne Bachelot pour l’alerter sur la situation de leurs enfants. Dans une première missive, rédigée en septembre, ceux-ci s’inquiétaient déjà des conséquences d’une sanction leur semblant "disproportionnée" au regard des faits reprochés.

Dire du mal de quelqu'un qui fait partie de la famille peut coûter très cher

Le cas Pernoo polarise tant qu’il devient rapidement, pour une partie de la presse et de l’opinion, non plus une affaire en cours, mais un débat "woke" contre "antiwoke". Ce dont les soutiens de Jérôme Pernoo se saisissent, relayant abondamment les articles du Point (qui avait publié un enregistrement des entretiens de Caroline De Haas) et de Marianne.

En face, c’est plutôt le silence qui prédomine, notamment du côté d’Emilie Delorme. Mais aussi parmi l’ensemble des membres du Conservatoire. "C’est un milieu très corporatiste. Il est très difficile de dire du mal de quelqu’un qui fait partie de la famille, surtout s’il est un peu connu, sauf dans les couloirs et au bistrot. C’est mal vu et ça peut coûter très cher", décrit Ami Flammer, professeur de violon et de musique de chambre pendant trente ans au Conservatoire – qu’il a aujourd’hui quitté. "Certains membres du Conservatoire m’ont confié qu’ils savaient beaucoup de choses sur Jérôme Pernoo, mais ils ne veulent pas s’exprimer publiquement", assure celui qui, sur le plan idéologique, se montre pourtant critique des méthodes militantes "contre-productives" de Caroline De Haas.

Visiblement, se taire ne suffit pas. Selon un document interne, Jérôme Pernoo aurait écrit à trois de ses collègues ayant, durant la procédure, observé une forme de réserve, pour se réjouir d’abord de son retour, puis pour leur reprocher leur mutisme : "que l’ignominie de votre silence, à la suite de mon dernier message, ne vous empêche pas de passer un joyeux Noël. A très bientôt et encore merci pour tout." Ambiance.

Pis : l’une des personnes qui avait accepté de témoigner auprès de L’Express des conséquences qu’a pu avoir pour elle sa participation à l’enquête interne s’est finalement rétractée quelques heures avant la publication de l’article, s’inquiétant du fait que "Jérôme Pernoo connaît beaucoup de monde dans ce milieu, c’est trop risqué". D’autant que cette personne en aurait déjà fait les frais. Après que la nature de son témoignage et son identité ont fuité dans le camp adverse, elle assure "ne plus [avoir] été invitée à certains événements et perdu un certain nombre d’opportunités professionnelles". "Je savais qu’en témoignant, je me fermais des portes."

"Adopter une approche neuve"

C’est dans ce contexte explosif, jalonné de revirements juridiques et administratifs, que prend place une deuxième enquête interne menée, cette fois, par le cabinet d’avocats Oppidum, dont les conclusions sont remises au Conservatoire le 21 février 2022.

Dans le rapport disciplinaire signé par Emilie Delorme qui en résulte, sont notamment reprochées des heures supplémentaires, le fait que "ses étudiants [soient] conviés après le cours collectif du lundi ou l’audition collective du mardi à un repas tous ensemble au restaurant", la consommation d’alcool avec ses étudiants, ou encore des "critiques formulées contre la directrice du conservatoire".

"Les questions [lors des auditions] portaient beaucoup moins sur mon premier témoignage concernant des faits à caractère sexuel. La personne m’interrogeait davantage sur des questions d’argent, sur mes liens avec certains élèves, se rappelle l’un des témoins auditionnés lors des deux enquêtes. La façon dont la première a été menée ne m’a pas choqué. Après tout, nous avions l’opportunité de corriger nos témoignages avant de les retourner signés si nous le souhaitions. Me concernant, je maintiens tout ce que j’ai dit."

Le Conservatoire, en voulant éviter un scénario De Haas, aurait-il péché par trop de rigueur dans ce second volet ? Du côté de l’institution, on répond avoir voulu "adopter une nouvelle approche pour cette seconde enquête ouverte à la suite d’une décision du juge des référés du 7 décembre 2021, alors que la matérialité des faits révélés durant la première enquête interne n’avait pas été remise en question". Le Conservatoire relève aussi que "les critiques dont a pu faire l’objet le premier rapport sur le plan technique ne remettent aucunement en cause le crédit à accorder aux témoignages qu’il contenait".

On était aveuglés, on le suivait comme des moutons

Problème, concernant le second rapport : plusieurs professeurs attestent auprès de L’Express qu’il n’est pas inhabituel de donner davantage d’heures de cours, ou même de boire un verre avec ses élèves. Ce dont la défense de Jérôme Pernoo arguera abondamment lors de la seconde commission disciplinaire d’avril 2022. Le violoncelliste ne se privera pas non plus de pointer "le ressentiment de Mme Delorme à son égard", une "volonté" de "l’évincer", ajoutant que "celle-ci semble en faire une affaire personnelle". Sur ce point, le Conservatoire répond qu’"Emilie Delorme a simplement effectué les démarches légales qui s’imposent dans ce genre de cas". "La première enquête a indéniablement été mal menée, juge de son côté Ami Flammer. La seconde a sans doute pâti des avis que certains s’étaient faits sur l’affaire, s’appuyant sur les partis pris préconçus de Caroline De Haas."

On en oublierait presque que, noyés au milieu d’attaques ad hominem et de reproches obscurs, on retrouve dans le rapport disciplinaire des témoignages faisant état de faits graves – de ceux que certains veulent minimiser comme étant de simples "contrepèteries", comme le fait d'"instaure[r] une ambiance sexuée dans les cours à travers des métaphores ou des gestuelles ("faire un chat-bite pour rigoler", mimer les danses lascives du Moulin Rouge, parcourir la salle en courant et en se cachant les fesses…)". Ou encore de "défend[re] l’idée que les enfants ont droit au plaisir sexuel avec des adultes en tenant un enfant de 7 ans sur ses genoux" et de "condamner avec fermeté les accusations portées contre l’écrivain Gabriel Matzneff".

Sans compter le système d’emprise qui y est décrit, témoignages à l’appui : "On était aveuglés, on le suivait comme des moutons" ; "Aujourd’hui je peux dire que j’étais sous son emprise" ; "J’avais l’impression qu’en entrant dans sa classe j’aurais perdu mon identité". Et surtout, trois signalements - deux pour attouchement sexuel et un pour agression sexuelle - font l’objet d’une enquête pénale confiée à la brigade des mineurs de Paris.

Jérôme Pernoo est finalement licencié. Dans un communiqué publié en avril 2022, ses avocats martèlent que "ni la première enquête interne ni la seconde n’ont permis de retenir la moindre accusation pénale injustement proférée à son encontre", et annoncent introduire un nouveau recours devant le tribunal administratif. Seulement cette fois, celui-ci confirme, le 2 novembre 2022, le licenciement de Jérôme Pernoo, considérant entre autres l’existence d'"une forme d’emprise" du musicien sur ses élèves, et "l’usage de méthodes humiliantes, la teneur de propos à connotation sexuelle, notamment des contrepèteries répétées, ainsi que des gestes et attitudes sexuellement orientés". Jérôme Pernoo a fait appel de la décision.

Le revirement Bruno Philippe

C’est un microséisme pour le milieu de la musique classique. En mars, France Musique dévoile que Bruno Philippe, révélation des Victoires de la musique classique 2018, vient de porter plainte contre Jérôme Pernoo, alors qu’il le défendait jusqu’ici. Le 16 mars, l’ancien élève du professeur écrit sur Facebook : "Merci pour les messages de soutien. Merci aussi pour les messages de haine ; ils me permettent de réaliser à quel point ma première intervention sur cette affaire était inappropriée et terriblement injuste vis-à-vis de la personne qui se reconnaîtra." Jérôme Pernoo avait été placé en garde à vue à la brigade de protection des mineurs début décembre, et avait notamment été entendu "sur des faits d’agression sexuelle sur mineur" à la suite de trois plaintes déposées par d’anciens élèves pour des agissements qui se seraient produits hors du Conservatoire, selon nos confrères du Parisien - pendant des stages ou des voyages à l’étranger entre 2005 et 2016.

Je disais aux parents de rester dans les parages

Après ce coup de théâtre, plusieurs sources gagent que "ça va faire bouger les choses". D’autant que l’affaire Pernoo n’aurait rien d’un cas isolé. "Certains professeurs actuels ont eux-mêmes été victimes lors de leurs études de gestes déplacés, et cela continue, assure Ami Flammer. Ça n’est pas un secret dans l’école, mais on n’en parlait jamais ; et je ne peux que me réjouir que la parole se libère enfin." Certains membres du Conservatoire, mais aussi des professionnels de la musique extérieurs, commencent à faire part de leurs interrogations. "Jérôme Pernoo est un excellent musicien, mais lorsque je devais orienter des élèves vers un professeur de violoncelle, je prenais des précautions. Lorsqu’il s’agissait de filles, je pouvais leur recommander Jérôme, mais je disais aux parents de rester dans les parages. Pour les garçons, je les orientais ailleurs", va jusqu’à confier l’un d’entre eux. "J’ai vu une de ses élèves, que j’avais en cours complémentaire, s’éteindre au fil de l’année. A l’époque je n’ai rien fait. Mais c’étaient seulement des bruits de couloirs. On parlait de choses qu’il aurait faites avant son arrivée en 2007. Et dans le milieu, ça n’avait rien d’inédit. Aujourd’hui, je porte toujours un sentiment de culpabilité", regrette un autre.

Du côté des étudiants de la classe actuelle de Jérôme Pernoo, les doutes semblent pourtant inexistants. Il faut dire qu’au sein du Conservatoire, on est d’abord "l’élève de". "Je suis parti de mon pays pour apprendre à ses côtés", explique un membre de la classe de Jérôme Pernoo. "Faire partie de sa classe est une chance sur le plan pédagogique et musical", nous dira un autre, avant d’ajouter : "vous n’imaginez pas ce que ça implique sur le plan de l’apprentissage d’enchaîner les remplaçants, de manquer des cours".

Deux époques semblent s’entrechoquer. Et au milieu, des victimes présumées qui attendent que justice soit rendue.

"J’ai failli me foutre en l’air à cause de lui"

Vendredi 26 mai, 15e chambre correctionnelle du tribunal de Paris. On met des noms sur des visages, et des qualifications pénales sur des "bruits de couloirs". A commencer par ces soupçons d’agression sexuelle sur mineur lors d’un séjour à Londres, en 2005, sur un élève alors âgé de 14 ans qui l’accuse aujourd’hui de lui avoir "caressé le sexe par surprise alors qu’il était endormi dans son lit". A la barre, un trentenaire en colère. Il a été l’élève de Jérôme Pernoo entre ses 10 et 17 ans. D’autres élèves se rappellent aussi ces "câlins", la "proximité", le malaise… "Cette scène n’a jamais existé", balaye Jérôme Pernoo, comme sur le reste des accusations, ajoutant qu’il n’a "jamais réveillé un élève dans son lit".

Sur les soupçons de harcèlement sexuel sur deux majeurs entre 2011 et 2016, un autre jeune homme rapporte ces fameuses "claques sur les fesses", les "chat-bite", les "baisers volés". Il décrit notamment une soirée alcoolisée pendant un voyage en Biélorussie, lors de laquelle Jérôme Pernoo l’aurait embrassé sur la bouche au nom d’une "tradition russe" (et réitéré à d’autres moments par trois fois). Après un refus de la part de l’étudiant, ce dernier considère avoir été "mis de côté". Il y a aussi cette ancienne élève, que le professeur surnommait selon elle "ma petite chatte", et dont il aurait touché les seins au retour de ce voyage – le jeu du "pouet-pouet". "Ce n’est pas du tout mon genre d’humour. Je ne fais pas de chat-bite, de pouet-pouet", "ces scènes sont complètement construites", répond Jérôme Pernoo.

Les blagues sexuelles pointées par la présidente ? Tout au plus des "contrepèteries", selon l’intéressé. "On dirait que tu te masturbes avec ton violoncelle", aurait-il pourtant dit à une élève. "Jamais arrivé", assure le professeur. Sur les autres exemples, Jérôme Pernoo pointera des "déformations" et de mauvaises "interprétations" poussant certains à identifier des sous-entendus là où il n’y en a pas. "Est-ce que ça n’est pas vous qui les poussez à chercher des sous-entendus ?" demandera-t-on à Jérôme Pernoo. Réponse de l’intéressé : "l’art de l’interprétation musicale, c’est l’art de chercher les sous-entendus." Regards éberlués dans la salle, sourires empathiques parmi les soutiens du professeur. "M. Pernoo : “Vas-y mollo avec ton ménisque”, envoyé à un élève de 16 ans, ce n’est peut-être pas grivois ?" questionnera plus tard une avocate des parties civiles. Là, le camp Pernoo est mutique.

C’est de l’EM-PRISE

"J’ai failli me foutre en l’air à cause de lui. Il ne sait pas faire la différence entre enfants, adolescents, adultes", lâche de son côté Bruno Philippe qui, pendant des années, a été extrêmement proche de Jérôme Pernoo et son conjoint. Il accuse son ancien professeur (qui le considère "comme son fils") d’avoir "cherché à l’embrasser", "imposé diverses caresses", notamment sur "le ventre sous son tee-shirt et jusque sous l’élastique de son caleçon" en 2009, et envoyé "de nombreux messages d’amour", parfois tard le soir. Dans la salle, certains soutiens du professeur chuchotent en pouffant à l’évocation de certains d’entre eux – "ça c’est sexuel ?"

Tout au long de l’audience, la défense de Jérôme Pernoo s’évertue à pointer les biais du rapport De Haas (dont de nombreuses accusations qu’il contenait ont été réitérées devant la brigade des mineurs), des incohérences entre les témoignages, des erreurs de dates, de lieux (pour des faits remontant pour certains à plus de quinze ans).

La jeune femme qui l’accuse n’aurait-elle pas été influencée par le Conservatoire pour porter plainte ? Bruno Philippe, par sa femme ? A la barre, Jérôme Pernoo dénonce en substance un complot pour "lui nuire". Lui, que certains considéraient pourtant comme un "père", au point d’attendre sa "bénédiction". La plupart des plaignants ont eu un parcours jalonné de drames, la perte de parents, des problèmes financiers... Parcours dans lequel Jérôme Pernoo a pris une place majeure. "J’ai toujours eu peur de le faire passer pour un pédophile parce que j’avais aussi beaucoup d’amour pour lui", expliquera le premier plaignant entendu. "C’est de l’EM-PRISE", jugera de son côté Bruno Philippe.

La salle fatigue, mais désemplit peu, bien que le cadran affiche 1 h 30 du matin. Près de onze heures après le début d’une audience ayant démontré, selon les parties civiles, "l’ampleur d’un système de prédation mis en place par Jérôme Pernoo pour agresser ses élèves", le parquet présente ses réquisitions : deux ans d’emprisonnement dont un an de sursis probatoire, une obligation de soins, l’indemnisation des parties civiles et l’interdiction d’exercer. La défense a plaidé la relaxe de l’ensemble des poursuites. Le délibéré sera rendu le 26 septembre par le tribunal, qui a rappelé en préambule ne pas "être juge d’un contexte sociétal".

*Le prénom a été changé.

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