Rachid serre le poing, alors qu’il vient de marquer un but pour son équipe d’Emmaüs, qui augmente son avance face à celle du Centre d’accueil pour les demandeurs d’asile (Cada). Il jette un regard vers le coach Mourad, sur le banc, et son visage s’ouvre enfin, après quelques occasions manquées.
C’est du sérieux, le tournoi de football disputé entre Accent jeune, Habitat jeunes, le Cada, l’École de la deuxième chance et Emmaüs.
Mourad et PascalÇa fait une à deux semaines qu’on s’entraîne, explique Mourad. La dernière fois, c’est nous qui avions gagné, on était allé voir un match de Ligue 1, à Montpellier. En plus on avait le meilleur buteur, il avait ramené un ballon…
Puis il rappelle l’essentiel, tout de suite. « C’est que du partage. Quand un remplacement est fait, on accepte le changement. Il y a une bonne ambiance. » Les consignes ont été passées par l’arbitre Franck Dardilhac, éducateur sportif de la Fal du Cantal, pour prévenir tout excès d’optimisme : elles ont été respectées.L’idée de ce tournoi de foot est venue d’Accent jeune et d’Habitat jeunes.
Premier tournoi en juillet 2022Morgane Lamanilève, qui intervient pour la première organisation : « C’était une demande qui venait des jeunes. Ils n’ont pas accès aux clubs de football de la région, soit parce que la pratique est chère, soit parce que c’est compliqué administrativement pour les papiers. Ils nous demandaient souvent d’organiser un rassemblement. »Une première édition rassemble ces deux associations et le Cada, puis Emmaüs et l’École de la deuxième chance rejoignent le terrain. Lancé en juillet 2022, c’est la quatrième édition du tournoi.
Il y a une bonne ambiance, continue Rémi Lemoine, d’Habitat jeunes. Pour eux, c’est un moment de rencontres, de partages
« Cela enlève toutes les petites querelles du matin, abonde Christine Martial, intervenante sociale pour Emmaüs. Ce n’est pas toujours facile de vivre en collectivité ! » « Il y a énormément de cultures présentes, entre l’Afrique subsaharienne, la Guinée, le Maghreb, l’Albanie, complète Pascal, bénévole. Le football, c’est quelque chose qu’ils ont tous en commun. »
Et c’est fédérateur, « c’est une fierté d’afficher les valeurs de l’abbé Pierre ! », lance, avec un enthousiasme communicatif, Ibrahima en montrant le maillot de l’US vallée de l’Authre qui permet de différencier les joueurs d’Emmaüs des autres.
« On vit en communauté, on parle toujours foot. Ça fait plaisir de partager ça entre nous »
L’expérience ne va pas s’arrêter. Au contraire. Rémi Lemoine et Morgane Lamanilève travaillent à développer, une fois par mois, des journées multisports. « Ce sera une manière de leur présenter des sports auxquels ils n’ont pas accès, qu’ils connaissent sans avoir pratiqué, comme le basket, le handball, expliquent-ils. Cela nous permettra aussi de mettre un peu de mixité : comme c’est un peu compétitif, les filles qui sont venues une fois au tournoi de foot ne reviennent pas… »Pour cela, une réunion est prévue avec la mairie, le 20 février, afin de pouvoir bénéficier des installations de la Ville. Philippe Couderc, adjoint chargé de la vie sportive, a d’ailleurs passé une tête au gymnase des Camisières, et a pu voir la deuxième victoire consécutive d’Emmaüs, décidément au point, devant Habitat jeunes 1, Habitat jeunes 2, le Cada-France terre d’asile, Accent jeune et l’École de la deuxième chance. Des lots ont été remis au meilleur buteur et au joueur le plus fair-play, ainsi que des coupes à ramener… au sein de la communauté.
Pierre Chambaud