Créé il y a deux ans pour récompenser des autrices et auteurs qui, à notre sens, font véritablement la littérature contemporaine sans recevoir les grands prix qu’ils et elles méritent, nous avons récompensé Eric Reinhardt (ainsi que Constance Debré) en 2020 et Christine Angot en 2021. Tous deux étaient d’ailleurs présents lors de la soirée d’hier, la dernière en sa qualité de présidente du jury cette année.
Émotion vive quand elle s’est adressée à Lola Lafon – à qui nous attribuons le prix du roman ou récit français pour son magnifique Quand tu écouteras cette chanson (Stock)–, sur la place juste qu’elle est parvenue occuper dans son texte pour aborder la Shoah, à travers la figure d’Anne Frank. Une émotion décuplée quand Lola Lafon a pris la parole, pour dire comment, en effet, l’un de ses buts était d’éviter toute obscénité.
Maria Larrea, qui a reçu notre prix du premier roman pour son très maîtrisé Les Gens de Bilbao naissent où ils veulent (Grasset), était venue avec sa bande de filles, dont la cinéaste Rebecca Zlotowski. Elle nous a montré sa chemise à l’effigie de son film culte, Carrie de Brian de Palma, comme pour dire que, contrairement au personnage principal, elle se sentait enfin invitée à la fête.
Le philosophe Paul Audi, prix de l’essai pour Troublante identité (Stock) – manifeste pour cultiver sa singularité plutôt que de se crisper sur ses particularités –, nous a confié que ce prix l’encourageait à s’engager dans une écriture littéraire.
Eileen Myles nous a rejoint par Zoom depuis New York, heureux·euse de voir son Chelsea girls, une évidence pour nous et pour Christine Angot (“quelqu’un qui dit sa vie, tout simplement”), trouver un accueil aussi favorable en France, trente ans après sa parution aux États-Unis, grâce à Adrien Bosc des éditions du sous-sol. Enfin, grande joie de voir Luz présent parmi nous pour recevoir le prix de la bande dessinée, décernée à l’unanimité au deuxième volet de Vernon Subutex (Albin Michel) co-écrit avec Virginie Despentes. Une explosion de créativité, de liberté folle et de beauté hors normes.
“Ce livre parle de convergence”, a déclaré Luz. “Ça commence avec un homme seul et ça finit avec le constat qu’il n’y pas d’autre choix que de se regrouper pour créer un autre monde. On est seul quand on travaille, mais dans mon cas, c’est fort de savoir qu’autour il y a une équipe, une coloriste, une éditrice, de savoir que les convergences sont possibles. Un livre, un film, un journal, ce sont des convergences. Et une réunion comme la nôtre ce soir, c’est une convergence aussi.”
