Le 8 décembre 2021, les libraires de bande dessinée recevaient plusieurs fois le même coup de téléphone (ou presque). Au bout du fil, une voix juvénile leur demandait : “Bonjour, vous auriez le One Piece collector ?”
Pour les fans de la série d’Eiichirō Oda, c’était à la fois jour de fête et jour de stress, puisque sortait le 100e tome de One Piece avec, pour les plus rapides, une version collector en tirage limité, glissée dans un étui en simili cuir.
Une semaine plus tard, la maison d’édition française Glénat annonce que ce tome 100 (toutes versions confondues) s’est écoulé à 131 270 exemplaires en seulement trois jours, le plaçant direct à la première place des ventes toutes catégories.
Le manga de tous les records
Depuis sa création en 1997, ce manga roi n’en finit pas d’aligner les records – il a son entrée au Guinness Book pour être la série signée par un seul auteur la plus imprimée au monde (480 millions d’exemplaires !). Il est devenu l’une des franchises modernes les plus rentables, puisqu’il a donné lieu à une adaptation en anime produite par le mythique studio Toei Animation, une trentaine de jeux vidéo et quantité de produits dérivés, dont un livre de recettes ou des romans.
Si One Piece représente désormais un mini-empire dans le monde du divertissement, cette réussite repose uniquement sur les talents de narration d’Eiichirō Oda, qui a su captiver la jeunesse mondiale avec une trame naturellement extensible à l’infini. Qu’il ait eu l’idée de cette série lors de son enfance avant de la concrétiser adulte explique les ingrédients de sa saga à plus de mille chapitres.
Action et humour
D’abord, il a investi un univers romanesque qui, depuis la lecture de L’Île au trésor de Stevenson, constitue un tremplin parfait pour l’aventure : le monde des pirates. L’exploration du territoire de One Piece se confond avec la progression de son personnage-phare, Monkey D. Luffy, capitaine du bateau Le Chapeau de paille, doté du pouvoir d’élasticité et parti à la recherche du trésor mythique qui donne son nom à la série.
Mais, autour de Luffy, Eiichirō Oda a réussi à bâtir une impressionnante galerie de personnages (soixante sont listés dans les premières pages du numéro 100) qui favorise d’autant plus la possibilité d’identification du lectorat. Enfin, l’auteur japonais approchant de la cinquantaine maîtrise un cocktail addictif mêlant fantastique et beaucoup d’humour, sa marque de fabrique. Derrière les scènes de combat et les gags, il a aussi camouflé des sujets sérieux tels que le racisme ou l’esclavage. Cela ouvre la voie à plusieurs niveaux de lecture et permet aussi au lectorat de One Piece de vieillir avec la série.
Conseil aux néophytes qui voudraient s’attaquer à ce monument : ce tome 100 et son gigantesque affrontement entre héros, alliés et ennemis, ne constitue pas la meilleure porte d’entrée. Eh oui, malgré la tâche titanesque que cela représente, il vaut mieux débuter One Piece avec son tome 1. D’ailleurs, depuis la semaine dernière, il s’est aussi écoulé en France 11 843 exemplaires de ce tome inaugural.
One Piece 100 de Eiichiro Oda (Glénat), 208 p., 6,90 € (édition simple), 10,75 € (édition collector), traduction du japonais par Djamel Rabahi et Julien Favereau.