C'est rarement de gaieté de cœur qu'on se rend dans un cimetière. Mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Christophe Pireyre, lorsqu'il déambule dans les allées de « son » cimetière, a presque toujours le sourire aux lèvres. Et pour cause, le cimetière n'est autre, avec sa collègue Anne-Marie Dupuy, que son lieu de travail. Pour autant, l'employé de la Ville de Thiers n'est pas insensible à la peine des visiteurs, bien au contraire. Et c'est précisément à cause d'elle qu'il s'emploie, à travers son travail, à rendre ces visites un peu moins douloureuses.
Entretenir les espaces vertsMais en quoi consiste ce travail ? Contrairement à son nom, le gardien de cimetière ne fait pas que garder ce lieu où l'animation se fait plutôt rare. En réalité, la mission de Christophe Pireyre est d'entretenir le site, notamment en matière d'espaces verts. Et le travail ne manque pas !
Désherbage, souffleur, fleurissement, arrosage, embellissement. « Il y a du travail tous les jours, sans exception, et toute l'année », assure Christophe Pireyre. Et plus particulièrement en ce début de mois de novembre, où les cimetières sont davantage visités que le reste de l'année. Avant la cérémonie du 11 novembre, le carré militaire est particulièrement soigné. Christophe Pireyre dispose des pots de chrysanthèmes sur chacune des tombes.Alors que la cérémonie du 11 novembre approche à grands pas, Christophe Pireyre prend tout particulièrement soin des tombes du carré militaire. « Certaines familles viennent se recueillir, mais il y a des tombes de soldats inconnus, et même des tombes de soldats russes, sans famille, alors nous en prenons soin pour eux. »
Mais le reste du cimetière n'est pas en reste. Depuis quelques jours, c'est l'affluence dans les allées des Limandons. Les familles viennent mettre un petit coup de propre sur leurs concessions, en vue des visites. Pour celles qui sont « abandonnées », le gardien veille. « Lorsqu'il y a des mauvaises herbes qui viennent se nicher sur les tombes, ce qui arrive souvent, nous les arrachons, pour garder le lieu le plus propre possible. Parfois, les familles viennent mettre des fleurs, mais ne désherbent pas, alors on le fait à leur place. »Lorsque des mauvaises herbes viennent se nicher entre les concessions, le gardien les arrache.
Le plaisir et la passion qui animent Christophe Pireyre peuvent surprendre. Mais il n'y a rien de malsain entre le gardien et le milieu funéraire. Il y a quelques mois, le Thiernois a perdu sa maman, et son envie de faire plaisir aux visiteurs s'est, de fait, décuplée.
« Je comprends ce qu'ils ressentent, j'ai ressenti la même chose. »
Des confidences et parfois... des déconvenuesAlors parfois, sa mission dépasse le cadre habituel. Comme cette fois où il s'est vu « trinquer » avec un défunt et sa femme. « Une dame avait dissimulé une bouteille de whisky et une bouteille de vodka derrière les plaques. Elle insistait pour que de temps en temps, on boive un petit coup à la santé de son mari décédé. Je l'ai fait, une fois, vraiment parce que ça lui faisait plaisir », avoue Christophe Pireyre.
Le cimetière des Limandons, jardin d'Anne-Marie
Il y a ceux, aussi, qui partagent des tranches de leur vie passée. Ou qui, simplement, s'intéressent au gardien de leurs morts. « Quand ma collègue est absente, ils me demandent si elle va bien. Et vice-versa. Ce sont des liens différents. On devient parfois un peu des confidents. » Une raison de plus, s'il en fallait une, d'être aux petits soins pour la dernière demeure des membres de ces familles.
Une gêne au débutÀ la question : Ressentez-vous une gêne à travailler dans un cimetière ? Christophe Pireyre joue la carte de la transparence. « Aujourd'hui, plus du tout. Mais au début, oui, je dois l'avouer. Surtout lorsqu'il fallait monter sur des tombes ou marcher dessus, notamment pour désherber. J'avais l'impression de marcher sur les morts », avoue-t-il. Désormais, la gêne s'est envolée. Mais pour autant, lorsque les concessions abandonnées sont ouvertes, et qu'il y a des restes, Christophe Pireyre ne reste pas à proximité... « Je n'aime pas ça, c'est normal. »
Sarah Douvizy
Des incivilitésAu cimetière, comme ailleurs, respect de ceux qui ne sont plus là ou non, Christophe Pireyre constate, avec regret, des incivilités presque tous les jours. Comme ce bouquet de fleurs en plastique jeté dans un parterre de fleurs. « Je le ramasse et je le jette, il ne faudrait pas que ça donne des mauvaises idées aux autres. On se donne du mal pour que tout soit bien propre chaque jour. On en fait des kilomètres, rien qu’hier, on en a fait 8 en une journée. »