CONSO - Puisque les petits agriculteurs doivent mieux gagner leur vie, il n'y a qu'à les payer plus. Voilà comment se résume à grand trait le volet sur l'encadrement des promotions de la loi alimentation, présentée ce 31 janvier en Conseil des ministres.
En limitant les rabais sur les produits alimentaires à 34%, et en relevant le seuil de vente à perte de 10%, le gouvernement espère relâcher la pression des centrales d'achats de la grande distribution sur les exploitants agricoles.
Si rien ne garanti à ce stade que la futur loi atteigne son objectif, les consommateurs semblent aussi être les grands oubliés du projet. Comme l'a dénoncé Michel-Edouard Leclerc ce 31 janvier face à Jean-Jacques Bourdin, il pourrait aboutir à une hausse des prix alimentaires.
"Les consommateurs sont prêts à payer plus cher des produits agricoles de meilleure qualité. Mais ils ne veulent pas d'une hausse généralisée des prix !" #BourdinDirect
— RMC (@RMCinfo) 31 janvier 2018
➡️Michel-Édouard Leclerc, PDG d'https://t.co/PD7MJzuoEQpic.twitter.com/V4Gww3owNl
En début d'après-midi, le ministre de l'agriculture Stéphane Travert a évacué ces critiques, lors de la conférence de presse de présentation du projet de loi.
"Les gens disent qu'ils sont prêts à payer plus cher pour des produits agricoles de qualité", a-t-il commencé, avant de renvoyer la patate chaude à la grande distribution: "Le lissage des prix se fera mécaniquement. Les prix n'augmenteront pas de la manière dont certains voudraient le voir."
A voir... Si Michel-Edouard Leclerc est dans son registre habituel de chevalier blanc du pouvoir d'achat, le projet de loi suscite aussi l'inquiétude d'une association de consommateur comme l'UFC Que Choisir.
"(...) A chaque fois que la grande distribution ou l'industrie agroalimentaire ont la possibilité d'augmenter les marges, ils le font. Ils l'ont fait à deux occasions (sic): lors de l'augmentation des prix assez conséquentes de 2008, et une deuxième et troisième fois en 2011 et 2013", a expliqué Olivier Andrault, chargé de mission à l'UFC, sur Europe 1 le 30 janvier.
Olivier Andrault (@UFCquechoisir) : "On ne voit pas vraiment le lien direct entre la limitation des promotions et l'augmentation du revenu des éleveurs" #E1SoirLeDebatpic.twitter.com/cmiD06Ih1w
— Europe 1 (@Europe1) 30 janvier 2018
En clair, il ne faut pas trop compter sur Leclerc, Carrefour et Auchan pour rogner sur leurs marges cette année. Ils vont certainement répercuter les hausses de prix d'achat aux consommateurs.
Ensuite, le gouvernement semble sous-estimer l'importance des promotions dans les comportements d'achat. L'exemple des ruées sur le Nutella à -70% chez Intermarché pour en dénoncer les excès est trop commode. "Les promotions structurent aujourd'hui la consommation de nombreuses familles, témoigne Sandrine Préfaut, co-présidente d'Adrexo, spécialiste des prospectus publicitaires, sur le site de LSA. (...) Les résultats de l'étude (Adrexo-LSA) nous montrent ainsi que les Français classent en haut de leurs préoccupations au moment de l'achat, le prix et les promotions."
Nulle doute que les ruées provoquées par les promos d'Intermarché obéissent à une logique de chasse aux bonnes affaires, mais il ne faut pas ignorer que de nombreuses familles françaises bouclent leur budget mensuel à l'euro près. Une réalité sur laquelle le leader de la France Insoumise a aussitôt surfé.
Quand l'émeute montre la misère l'idiot regarde le #Nutella !
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) 26 janvier 2018
Quand le ministre de l'agriculture assure que les Français sont prêts à payer plus pour la qualité, il confond déclaration d'intention avec la réalité. Que ce soit le "made in France", le bio ou les agriculteurs, les Français se disent toujours favorables.
Dans les faits, cela n'impacte les comportements que de manière très marginale. Pas tant par choix que par contrainte économique. Si la part des courses alimentaires a baissé dans le budget des ménages ces dernières décennies, elles représentent toujours 20,4% des dépenses, selon une enquête IRI citée par Le Figaro.
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