Peut-on créer et concevoir soi-même des modèles iconiques de sneakers avec son style, ses couleurs et textures ? Beaucoup en rêvent, Claire Angleys le réalise et le propose en workshop. Bienvenue dans le monde merveilleux de la sneaker urbaine home made ! Portrait.
Nichée au cœur d’une historique boutique-atelier de cordonnerie lyonnaise, mansardée dans sa tour, c’est là qu’on retrouve la pétulante et créative Claire. Vous la connaissez peut-être mais derrière le nom « Lyon Sneakers Lab ». À 42 ans, l’artiste maman de deux enfants revient des Pays-Bas, où elle est partie vivre quelques années avant de s’installer fin 2021 avec toute sa petite famille dans la vieille ville de Lyon…
Démissionnaire d’un grand groupe pharmaceutique en 2019, avec à la clé une reconversion à 360° dans la chaussure, Claire Angleys épouse une carrière loin d’être longiligne mais ô combien passionnante ! « Je me suis cherchée toutes ces années, à faire des jobs alimentaires ou pécuniers », se remémore-t-elle, mais tout ça est révolu.
Comment diable se lancer un jour dans un tel projet, alors que rien ne l’y prédestinait ? « J’ai découvert la confection et customisation de sneakers aux Pays-Bas, durant un workshop de 5 jours, avec mon mari. Lui est collectionneur, moi je suis manuelle », décrit la quarantenaire. C’est d’ailleurs ce dernier qui l’a poussé à lancer son activité. « Lui a une âme d’entrepreneur et m’a aidé à le devenir, en m’encourageant, en m’assurant que j’en étais capable et que j’avais de l’or dans les mains. »
Ici les commandes sont encore passées par faxe « parce que c’est vintage », mais on poste sur Instagram, les réparations comme les créations. Car c’est bien un travail créatif, et pas qu’un projet de customisation de sneakers, comme en propose beaucoup.
Claire entend au passage dépoussiérer la vision du métier de cordonnier. Si tout se passe pour le mieux, c’est elle qui reprendra l’affaire de cordonnerie dans laquelle elle a installé son atelier à l’étage. En attendant, elle apprend, beaucoup, auprès du maître actuel des lieux. Il lui apprend à regarder comment la matière travaille. On assiste à une histoire de transmission d’affaire, mais surtout de savoir-faire traditionnel.
Tout ça ne s’improvise pas. Pour en arriver là, Claire s’est formée auprès des Compagnons du devoir notamment en maroquinerie, pour compléter sa formation en botterie. Elle a commencé ses premières paires en 2020, « au départ pas très jolies », avant de prendre le coup de main le vrai.
Ces formations en botterie, maroquinerie, c’est bien beau mais comment on progresse ? En faisant, défaisant. « J’ai une grande admiration pour les sportifs de haut niveau qui deviennent des champions grâce à leur acharnement, parce qu’un domaine leur est devenu obsessionnel ».
Mais avec les sneakers, c’est un peu ça aussi finalement. Il n’y a qu’à voir leur quotidien, imprégné de ça. « Des sneakers, avec mon mari on en est devenu addict. Je lui offre sa paire custom’ à Noël, et nous avons une étagère murale chez nous où trônent nos plus beaux spécimens. C’est comme ça qu’aujourd’hui, je peux assortir ma paire à mon sac à dos ! »
Un plongée dans le monde du lifestyle encore moins évident que Claire pénétrait dans un univers chargé d’hommes. Le précurseur de ce concept est américain et a commencé à oeuvrer dans les années 90. À ce jour, la jeune femme devrait être encore la seule femme à le proposer sous cette forme. Et de ça, elle en est fière ! « Je reviens de loin et ce challenge est une belle revanche, se félicite-t-elle, car les gens autour de moi ont cru en mon projet. Que les femmes prennent du poids dans la société. »
Son petit truc à elle ? les mélanges de textures, type cuir standard, jean, peaux végétales (d’ananas, de liège, de tannerie de sushi shop…). Mais attention, elle ne se frottera pas au cuir de pomme ou de champignon, car trop fragile !
Côté matos, l’artisane de la sneaker s’est outillée d’une machine à coudre à pilier, spéciale chaussure, avec double entraînement à roulettes et aiguille à l’envers. Pour la suite, elle s’arme d’un marteau rond, d’une pince à monter, etc. L’upcycling marche aussi ici. Il lui est arrivé par exemple de déconstruire un sac à main pour en recouvrir une paire de Air Force 1 !
Elle ne part pas complètement de rien, puisqu’elle utilise des semelles existantes, et démonte la paire donneuse pour recoller son modèle. Pour savoir où elle se fournit, Claire a ses petites astuces… qu’elle fait bien de garder pour elle. Quant aux futurs acquéreurs, il faut savoir que ces modèles un peu coûteux couvrent un marché de niche. Les baskets sont conçues sur mesure, avec une personnalisation jusque dans les moindres détails.