Pianiste d’une agilité exceptionnelle, très demandé en festivals et sur les scènes internationales, Tanguy Asselin de Williencourt, 34 ans, a été formé au Conservatoire de Paris (où il enseigne). Il ne craint pas de s’attaquer aux œuvres les plus ardues du répertoire romantique. C’était déjà le cas il y a deux ans, avec son interprétation à la fois magistrale et sensible de César Franck (cf. le CD des œuvres solo et avec orchestre, chez Mirare).
L’unique, monumentale, impérissable sonate composée par Franz Liszt en 1852-1853 et dédiée à Schumann exige de l’interprète une virtuosité plus éclatante encore. Sommet de la littérature pianistique, à l’ampleur quasi orchestrale et d’une modernité confondante, c’est là sans aucun doute le morceau de bravoure du récital que donnera Tanguy de Williencourt lundi prochain à Paris, dans l’écrin acoustiquement fabuleux de la petite Salle Cortot. Alliant intériorité et puissance expressive, il n’hésite pas à détacher les notes, à jouer à plein les ralentissements du 2ème mouvement andante sostenudo, à articuler avec véhémence l’allegro energico du 3ème mouvement. Aigus perlés, scintillants, accords plaqués avec une sorte de fougue juvénile, j’allais écrire de rage, rondeur et souplesse dans les guirlandes arpégées où le magma sonore se fond…
A lire aussi, Emmanuel Domont: Maxime d’Aboville, à la vie à la scène!
Ce concert reprendra l’intégralité du quatrième album publié par le pianiste français, disque dédié à Liszt, donc, et qui vient de paraître sous le titre Muses, pour rappeler les idylles et autres liaisons passionnées qui traversent la très longue vie du compositeur : de la comtesse Marie d’Agoult à la baronne Olga von Meyendorff, en passant par la princesse Carolyne de Sayn-Wittgenstein, à qui l’on doit précisément la création de la fameuse Sonate en si mineur, ou des si délicates Harmonies Poétiques et Religieuses, dont un des extraits les plus inspirés reste Bénédiction de Dieu dans la Solitude, pièce d’un recueillement à la mélodie inoubliable, écrit dans la maturité du maître devenu abbé… Liebestraum n°3 « rêve d’amour », Au lac de Wallenstadt, Au bord d’une source et Vallée d’Obermann complètent cet itinéraire lisztien au prisme de sa vie amoureuse…
Conseillée par l’immense pianiste Maria João Pires, Tanguy de Williencourt a aussi subi l’influence du pianofortiste Badura-Skoda, et cela se sent dans son phrasé tout à la fois très articulé, comme suspendu et à la sonorité somptueusement colorée. Tenté par la direction d’orchestre, chef assistant à l’Opéra de Paris et au Staatsoper de Vienne en tant que chef de chant sur différentes productions lyriques, Tanguy de Williencourt est également directeur artistique du festival Tempo Le Croisic : le 6 décembre, il en présentera la prochaine édition ( u 29 mai au 1er juin 2025).
Autant le dire, le nom de ce jeune artiste très complet est à retenir : Tanguy de Williencourt, ça ne s’oublie pas.
Récital de piano : Muses. Œuvres de Franz Liszt. Par Tanguy de Williencourt. Salle Cortot, Paris. Lundi 2 décembre, 20h.
Récital donné à l’occasion de la sortie du CD Muses, par Tanguy de Williencourt. Mirare prod.
L’article Tanguy de Williencourt, pianiste virtuose sur la trace de Liszt est apparu en premier sur Causeur.