Quand les compteurs s’affolent… D’après le dernier pointage du ministère de la Santé, 96,4 millions de tests de dépistage du Sars-CoV-2 – dont une large majorité de RT-PCR naso-pharyngés – ont été réalisés en France entre mars 2020 et le 20 juin 2021. La barre des 100 millions sera franchie pendant l'été.
1. Combien ça coûte ?Initialement effectués sur présentation d’une ordonnance, les tests PCR sont ouverts à tous, symptomatiques ou pas, sans avis médical préalable ni avance de frais, depuis fin juillet 2020.
Dans un premier temps, chaque prélèvement était remboursé à hauteur de 73,59 € par l’Assurance maladie aux structures privées. Un système de dégressivité des tarifs a ensuite été mis en place en décembre, en fonction de la rapidité du rendu des résultats. Objectif : éviter les retards de diagnostics.
Depuis, deux baisses de prix ont été imposées aux laboratoires – la dernière début juin – par le ministre de la Santé.
« Un test PCR nous rapporte désormais 54 euros l’unité dans le meilleur des cas. Pour arriver à ce montant, il faut livrer le résultat au patient en moins de douze heures. Au-delà, un malus de 10,80 € s’applique ».
En 2020, cette stratégie du "100% pris en charge" a coûté plus de 2,6 milliards d’euros à l’Assurance maladie.
Deux milliards avaient été provisionnés sur ce poste « tests de biologie médicale » pour 2021. Mais la troisième vague épidémique a fait exploser les prévisions: 2,6 milliards ont de nouveau été engloutis en à peine quatre mois, de janvier à avril, selon le comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie. Lequel estime que la facture globale du dépistage pourrait s’élever à 4,9 milliards d’euros d’ici fin décembre.
Photo Jeremie Fulleringer
2. « L’honneur » de la France« C’est l’honneur de notre pays qu’il n’y ait aucun obstacle financier pour pouvoir se tester », assume le ministre de la Santé, Olivier Véran.
Les partisans du cadre actuel font aussi valoir que l’accès de tous au dépistage permet d’éviter d’autres dépenses, plus lourdes encore, pour les finances publiques. À titre d’exemple, le coût d’une journée en réanimation est estimé à plus de 3.000 €.
Payants à partir du 7 juillet pour les étrangers. Dans une interview au journal Les Echos, publiée ce mercredi soir, le porte-parole du gouvernement a annoncé que les tests de détection du Covid-19 seront payants à compter du 7 juillet pour tous les touristes étrangers séjournant en France. Ils seront facturés "à hauteur de 49 euros pour les PCR et 29 euros pour les antigéniques", a précisé Gabriel Attal, pour qui "c'est une question de réciprocité sachant que ces tests sont payants dans la plupart des pays pour les Français qui voyagent".
3. Un obstacle à la vaccination ?Dans un avis publié le 23 juin, l’Académie nationale de médecine s’inquiète pourtant des conséquences néfastes du tout gratuit, accusé de « détourner les individus de la vaccination ».
À l’appui de sa démonstration, la société savante observe que « la pratique des tests de dépistage, renouvelés à volonté pour l’obtention d’un pass sanitaire, s’intensifie à l’approche des vacances estivales ». Notamment chez les récalcitrants aux injections anti-Covid.
Photo Stéphanie Para
D’où cette préconisation : « Suspendre le remboursement des tests RT-PCR et antigéniques (rapides, NDLR) pratiqués pour convenances personnelles (pass sanitaire, voyages internationaux, participation à des événements collectifs) chez les personnes non vaccinées. »
À l’inverse, les tests menés « à des fins diagnostiques et épidémiologiques », pour des cas suspects ou des enquêtes de traçage, resteraient prises en charge à 100 %.
4. « À l’étude »Interrogé ce mardi 29 juin, sur une éventuelle évolution des règles, le ministre de la Santé s’est dit « très ouvert à la discussion ».
« C’est une piste qui est à l’étude mais pas pour tout de suite, sans doute en septembre ».
Le président du syndicat des biologistes est beaucoup plus réservé. « Si vous faites payer ceux qui veulent être dépistés avant d’aller en discothèque, ils vous diront forcément qu’ils ont des symptômes pour ne pas passer à la caisse?! Nous, dans les laboratoires, ne sommes absolument pas en capacité de vérifier leur sincérité. Ce sera donc totalement inapplicable », estime-t-il.
Selon François Blanchecotte, « l’État ferait mieux de cibler ceux qui ont déjà fait 20, 25, 30 tests sans raison valable. L’Assurance maladie connaît ces cumulards, elle a des décomptes précis. Là, l’impact serait réel ».
Stéphane Barnoin
Les laboratoires se sont-ils "gavés"?
Lassé d'entendre que les laboratoires d'analyses médicales auraient "profité de la crise sanitaire pour s'enrichir" sur le dos des patients et de l'Assurance maladie, le président du syndicat des biologistes réplique.
"Pour réaliser les tests, chaque structure a dû s'équiper de plateformes de biologie moléculaire, explique François Blanchecotte. Ce sont des bécanes qui coûtent 150.000 euros pièce. Pour vous donner une idée, le groupe dans lequel je travaille en a acheté 30... Ce sont des investissements énormes, qui ne s'amortissent pas comme ça. D'autre part, nous avons embauché massivement pour répondre à la demande. L'augmentation de notre activité s'est donc traduite par un véritable effet positif sur l'emploi dans notre secteur."