« J’ai 20 ans. Vous êtes tous jaloux. Vous aimeriez bien avoir mon âge ! », lance Simone Ollagnier. Éclats de rire dans la salle où sa famille et le personnel de l’Ehpad de l’hôpital de Brioude se sont réunis il y a quelques jours, au deuxième étage de l’établissement pour fêter… ses 103 printemps. Ses 20 ans sont déjà très loin, mais le sens de l’humour ou de la bonne phrase ne semble pas avoir quitté Simone. Elle assiste un peu surprise, voire gênée, à la petite cérémonie en son honneur. La zappette de la télé cramponnée en main :
« Ah, Madame Ollagnier et sa télécommande, c’est tout une histoire ».
Simone a quelques soucis d’audition. Ça la rend assez hermétique au petit discours de Pascal Tarrisson. Le directeur de l’hôpital tente de retracer la biographie de la centenaire : « Vous êtes née à Sauxillianges en 1921. Vous êtes la cadette d’une fratrie de 13 enfants… » Simone ne pipe mot. Elle confirme simplement s’être mariée en 1946 et avoir exercé le métier de couturière pendant la Seconde guerre mondiale. Un de ses trois enfants est présent ce jour à l’Ehpad. C’est André Ollagnier, l’actuel maire de Frugères-les-Mines. « Ma mère est plutôt d’une nature solitaire, elle aime beaucoup être dans sa chambre, devant sa télévision. Ça ne l’empêche pas d’avoir de l’humour », précise l’édile. Pas si surprenant que ça pour une dame qui a vécu chez elle jusqu’à l’âge de 100 ans. Autre particularité, Simone Ollagnier ne prend aucun médicament… chose extrêmement rare à un âge aussi avancé. Aux comprimés dont elle n’a pas besoin, elle préfère un traitement plus naturel : le chocolat dont elle ne se prive jamais.
Un double anniversaireEt ce 26 juin, ce n’était pas un mais deux anniversaires qui étaient célébrés ! Assise à côté de madame Ollagnier, Paulette Tournebize arrosait le même jour ses 102 ans. Sa personnalité diffère de celle de sa voisine. Elle semble plus alerte, un peu plus affable aussi. Envahie par l’émotion, elle tente de réfréner quelques larmes, se ressaisit et s’adresse à l’assistance : « Je n’en dirai pas plus… Je ne suis pas encore assez vieille ! » Le personnel de l’Ehpad, la fille et la petite-fille de Paulette sourient. Même quand Paulette marque un temps d’arrêt pour retrouver le prénom de sa petite-fille, Florence : « Alors mamie, tu ne sais plus comment je m’appelle ? »
Une vie bien remplieSur son passé et surtout son enfance, la centenaire retrouve la mémoire. Elle était fille d’agriculteur à Chamberat, dans l’Allier.
On avait des moutons et des vaches laitières. Quand vous avez 100 bêtes en face de vous, croyez bien que ce n’est pas facile à gérer.
Elle ajoute : « Je gardais les moutons et ma sœur s’occupait des vaches. » Ginette, 94 ans, était d’ailleurs présente. Elle réside aussi à l’Ehpad de l’hôpital de Brioude et confirme les propos de son aînée. Paulette a épousé un mineur de Bayard, près de Brassac-les-Mines : « Chaque mineur avait sa petite maison. C’était plutôt agréable à vivre. La mine, c’était un métier très dur. J’en ai versé des larmes derrière ma fenêtre en me disant qu’il ne rentrerait peut-être pas. » Sur sa vie à elle, tout juste concède-t-elle avoir fait un peu de tapisserie, s’être occupée de son jardin et d’un petit bout de vigne : « J’ai toujours travaillé mais je n’ai jamais rien gagné… ». Le secret de sa longévité ? Les membres du personnel de l’Ehpad tentent d’apporter une réponse : « Elle est très dynamique et affirmée. C’est une force de la nature. »Celle qui est aussi la doyenne de la commune d’Auzon n’a pas dit non au gâteau et à la coupe de champagne pour arroser cet anniversaire : « Il ne faut pas se priver. J’espère que vous vivrez aussi longtemps que moi mais même si c’est un petit peu moins, ça sera déjà pas mal ! »
Jérémy Virot
